Angoisse

 
"Ça a duré une bonne minute. Une vraie minute. Une éternité." Un instant torturé à observer les murs maussades de mon mausolée. J'étais assise là, par terre, sur les carreaux grisâtres de ma triste chambre. Seule, comme à l'accoutumée, bien trop faible pour qu'un son quelconque sortît de ma bouche pâle. J'allais donc enfin mourir. Mais pourquoi était ce si long? Je la sentais si proche mais si loin pourtant, la mort. Ma tendre amie désirée. Je l'avais bien planifiée : une fois la maisonnée vidée, m'ouvrir les veines et regarder ma vie s'épancher courageusement à mes pieds, avant de m'endormir dans un sommeil imperturbable.
J'aurais voulu chanter . Une dernière fois, avant que les forces ne me quittent. Ou tout au moins crier, autant que je puis. Offrir à ce seul espace qui m'avait vue me déchirer, un dernier élan de vie.
 

Ah Ciel! J'allais donc mourir! Peu à peu, ma sombre joie se transformait en appréhension. J'allais mourir, vraiment? Je n'étais plus si sûre de le vouloir. Cela semblait beaucoup moins long en théorie, beaucoup moins douloureux, et surtout moins effrayant. Pourquoi avais-je décidé de mourir déjà ? Je ne m'en souvenais plus. Mon esprit m'envoyait de faibles rappels pour m'encourager à aller jusqu'au bout: ta vie est nulle! Personne ne t'aime.
Et ma raison renchérissait: Juste ça ?
C'était décidé. Je ne voulais plus mourir. J'essayais alors dans un las effort d'appeler à l'aide.
À l'aide! À l'aide! Aidez-moi , murmurais-je...
Qui donc viendrait me secourir? J'avais pris soin d'enclencher les hostilités une fois la maison vidée de toute présence humaine. Il n'y avait plus que moi, ma chambre et le mobilier, avec lequel je m'amusais souvent à converser. Tout me manquerait. Les choses inanimées comme celles animées. Soudain consciente de ma bêtise, j'essayais encore une fois.
À l'aide! Au secours! Aidez-moi , disais-je toujours plus bas..
Lou! Lou! Réveilles toi, disait ma petite soeur, d'un ton inquiet. Tu fais encore un cauchemar.
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