Amina, la petite villageoise

Toute histoire commence un jour, quelque part... Et la mienne s'est passée dans la ville de Bukavu, une ville à l'Est de la République Démocratique du Congo.
Une ville qui m'était inconnue à mon arrivée mais plus le temps passait plus je me sentais chez moi mais malheureusement elle a gravé en moi un événement que je ne saurai jamais oublier.
Je m'appelle Amina Bisimwa , je suis née à Kabare mais à 13 ans j'ai quitté mon village natal pour Bukavu. Je suis allée m'installer chez ma cousine Marie qui venait de mettre au monde et avait besoin de quelqu'un pour l'aider à faire des travaux ménagers.
J'étais hyper contente de vivre dans un milieu plus évolué que mon village. C'était la première fois que je quittais Kabare, tout était nouveau et étrange pour moi. De belles maisons, de jolies voitures , des gens plus civilisés...
Je m'occupais quotidiennement du ménage, et du bébé Amélia à l'absence de ses parents .
Depuis l' âge de 10 ans ma mère m'a appris à être une femme , et à assumer les responsabilités d'une femme africaine.
Celle qui doit tenir convenablement une maison et qui doit s'occuper de toutes les tâches ménagères.
Cependant après deux ans tout a bousculé dans ma vie.
Pendant toute mon existence je maudirai ce jour, ce jour où le goût de vivre m'a quitté, ce jour où je n'avais qu'une envie: disparaitre de ce monde méchant....
– Amina ! Mina enda , chunga mutoto na uchunge nyumba muzuri.
Chacula ya muchana na njo tuta kula busiku. Leo nda rudiya nyuma kidogo
( _Amina! je pars au boulot, prends soin de l'enfant et garde bien la maison. La nourriture que nous allons manger au déjeuner c'est la même que nous allons prendre pour le dîner. Je vais rentrer un peu tard aujourd'hui_ )
–Sawa( _d'accord_ ) Da Marie ( _en swahili dada signifie soeur et comme en Afrique on n'appelle pas les aînés seulement par leur prénom, il faut faire précéder le prénom de dada , si c'est une fille ou de l'ellipse da_ )
Après qu'elle soit partie, c'est alors que M. Didier l'époux de Da Marie sortit de la chambre
– Amina!
–Abeee!( présente)
– Ta soeur est déjà partie ?
–Oui elle vient de partir
–A-t-elle précisé l'heure à la quelle elle devra rentrer?
–Elle a juste dit qu'elle rentrera un peu tard par rapport à ses heures de retour habituelles.
–Ok. Je quitte aussi
–D'accord

Le soir , vers 18h , comme je venais de terminer de faire la cuisine et Amélia dormait, j'en avait profité pour mettre un peu de l'ordre dans ma chambre.
C'est alors que M. Didier fit son entrée dans la maison
–Bonsoir M. Didier!
–Bonsoir Amina!
–Bienvenu
–Merci! Tu vas bien ?
–Oui je vais bien!
–Da Marie est déjà rentrée ?
–Non! Pas encore
–Et Amélia est où ?
–Elle dort dans sa chambre.
–D'accord.
Il partit dans sa chambre et moi je continuai à ranger mes effets.
Ce n'est qu'après 20 minutes que je sentis un coup violant sur ma porte qui soudainement s'ouvrit...
C'était M. Didier.
Sans attendre que j'ouvre ma bouche pour lui demander ce qu'il voulait, il me prit de force et me jeta au lit!
C'était le début du cauchemar...
Il me viola !

Pendant environ 15 minutes,je criais comme une folle mais ma voix ne se faisait pas entendre car sa main était sur ma bouche.
Je pleurais comme je ne l'avais jamais fait au paravant. J'étais vide de force, la douleur que je ressentais était actros. Franchement c'était horrible!
Lorsqu'il avait satisfait ses envies déplacées, il sortit de la chambre et après quelques minutes il claqua la portail.
J'étais terrifiée au plus haut degré, mon lit et ma jupe étaient pleins de sang, la douleur que je ressentais s'atténuait , je pleurais et je pleurais encore...
Ce n'est que vers 19h que quelqu'un entra dans la maison.
J'étais dans la chambre assise par terre, je ne comprenais rien de ce qui venait de m'arriver.
–Amina aye?( _Amina comment tu vas ?_ )
C'était la voix de Da Marie. Je ne pouvais pas faire semblant, tout était clair: je pleurais.
–Nini? Mbone uko na Liya?
Mungu wangu, na iyi damu ku ngo na ku kitanda ni ya nini? ( _Mais tu pleures? Qu'est-ce qu'il y'a ? Mon Dieu! Que veut signifier ce sang sur tes habits et sur le lit?_ )
Je voulais lui répondre mais j'avais manqué des mots appropriés pour lui expliquer ce qui venait exactement de se passer.
Elle insistait et en sanglotant je lui dis
–C'est... C'est M. Didier, il m'a... , il m'a...
–Mais en fin! Il a fait quoi????
–Il m'a... Violé
Elle n'en croyait pas ses yeux. Elle avait poussé un crie de stupéfaction qui avait réveillé Amélia. Elle accourut prendre son enfant dans la chambre et ensuite elle se mit aussi à pleurer.
Elle n'arrivait pas à croire que son marie pouvait poser un acte si diabolique.
Pendant au moins une demi-heure elle était sur le sol, elle ne pouvait pas parler, elle était abasourdie et impuissante.
Et moi dans mon coin je ne pouvais me retenir de pleurer, j'avais mal par tout, je tremblais. Le monde venait de s'écrouler sur moi, le goût de vivre venait de me quitter. Un tas de question tourmentait mon esprit : comment un homme pouvait être inhumain jusqu'à ce point ? Qu'ai-je fait ,moi Amina, une petite villageoise pour mériter tout ceci?
Ma vie venait d'être transformée en pire cauchemar.
Après 3 heures de temps M. Didier rentra à la maison. Il eut une forte querelle entre lui et sa femme et avec méfiance M. Didier décida de partir de la maison pour rentrer le lendemain.
Da Marie m'a aidé à tout remettre en ordre dans ma chambre et avec les larmes aux yeux elle m'a donné des calmants et m'a rassuré qu'elle allait s'occuper de tout une fois le jour levé.
Après une semaine Da Marie s'était concertée avec ses parents et m'avait demandé de m'apprêter car je devais retourner à Kabare.
Je n'avais plus revu M. Didier depuis le lendemain de l'incident ,j'avais appris qu'il avait quitté la ville, il était parti à Kalemi dans la province du Tanganyika.
Ce fut un certain jeudi que j'ai pris le bus pour Kabare.Ma famille m'avait bien accueilli mais elle ignorait tout ce qui s'était passé à Bukavu. Moi également j'avais peur de leur narrer ce qui m'était arrivée et ce n'est qu'après 2 mois que j'ai été obligée de tout raconter à ma mère car mon état de santé n'était pas bonne.
–Badungu! Si bulozi iyi! S'exclama ma mère ( _Ça! C'est de la sorcellerie!_ )
Le lendemain elle décida d'aller à Bukavu voir Da Marie. Après 2jours elle était rentrée et apparemment elles avaient trouvé un compromis.
Après, ma mère m'a amené consulter le Dr Denis Mukwege à l'hôpital de Panzi.
Le test était positif, j'étais enceinte à 15 ans...
Je n'avais plus senti mes pieds , le monde venait encore une fois de s'écrouler sur moi.
Pour plus de suivie, J'ai été interné à l'hôpital de Panzi
Je ne parlais plus, je ne mangeais plus, je ne passais mes journées qu'en larmes.
Plus souvent je recevais les conseils du Dr. Mukwege, il me remontait la morale et avec le temps mon état s'améliorait. Enfin j'ai fini par accepter les conditions dans les quelles je me trouvais et petit à petit j'ai retrouvé le sourire.
Chaque matin je me disais que si je mettais au monde une fille, je la protégerai pour qu' aucun homme n'abuse d'elle comme c'était le cas avec moi.
Je donnerai le meilleur de moi-même pour l'élever dans de bonnes conditions.
Et après mon accouchement, je ne continuerai pas à me taire. Il faudrait que cette ordure qui a ruiné ma vie réponde à tous ses actes devant la justice.

Malheureusement à 7mois de grosse, suite à plusieurs complications, j'ai perdu mon bébé.
Il m'a fallu 3 mois pour rentrer dans mon état normal et comprendre que les problèmes faisaient partis de la vie et qu'il fallait être forte pour tout surmonter .
Le Dr. Denis Mukwege m'avait accompagné devant les instances judiciaires pour porter plainte contre M. Didier qui m'avait violé. Heureusement qu'il était déjà rentré à Bukavu mais il s'était séparé avec Da Marie et vivait déjà avec une femme qu'il avait rencontré à Kalemie.

Il a été condamné pour viole à 20 ans de servitude pénale et j'avais été indemnisée.
Physiquement et psychologiquement je me portait déjà bien, j'étais retournée à l'ecole et j'avais repris ma vie normale.

Toute histoire, bonne ou mauvaise commence un jour, quelque part et toute histoire a une fin.