A qui la faute ?

« Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Je ne sais pas. Toutefois, je garde de mon inconditionnel Sessi, qu'il est de ces moments que l'on traverse et qui laissent au tréfonds de notre être une marque éternelle, comme si le destin nous prédestinait à les porter gravés, non sur notre front corporel, mais au fronton de notre esprit, pour que sans cesse, nous puissions nous les ressasser et qu'à chaque occasion de notre existence, nous nous en rappelions ou nous en servions pour canaliser nos actes. Ces moments, aussi divers sont-ils, nous couvrent soit de honte et de désespoir, soit de joie et de bonheur, soit de tristesse et de profonds chagrins.
Je suis Tchègoun, Directeur d'une entreprise de plomberie. Vingt-cinq années en arrière, je n'avais pas un statut social stable. Néanmoins, je ne manquais point du pain quotidien. Mon charme et mes grâces divines, m'ont valu Anifath, m'a-t-elle confié plus tard. Une jouvencelle aux airs gracieux et à la physionomie gracile, de qui j'étais éperdument tombé amoureux. Elle pareil. Les connaissances parentales furent faites sans coup férir. Une entreprise à Parakou me recruta deux mois après pour un poste de comptable auquel j'avais postulé. Ma nouvelle prime me convainquit de la prise d'une épouse. Sans me jeter des propos dithyrambiques, ma paye mensuelle était considérable. Je ne manquais presque de rien que d'une femme. Ma fiancée et moi prîmes trois mois pour organiser les événements nuptiaux. Ce furent faits selon les normes juridiques et familiaux ; un jour indélébile par ricochet pour ceux qui le font. Nos premières années conjugales nous rassurèrent de notre capacité à vivre réellement ensemble, et ce pour toujours.
Deux ans succédant notre union, mon épouse eut une fausse couche. Cet événement tragique nous ankylosa. La force de l'amour nous releva de cette chute. Les conseils fusèrent tous azimuts et vinrent nous boucher les tympans deux mois durant. La majorité préconisait le recours aux sciences occultes, etc. Cependant, nous n'en fîmes rien. Confiants en dame Nature, nous continuâmes notre vie maritale en placardant aux oubliettes cette expérience.
Trois années après, l'Être Suprême gratifia notre couple d'un jumeau, soit une fille et un garçon. Ce fut une joie incommensurable. J'organisai in facto une fête en guise de réjouissance en cet honneur. Nous reçûmes de nombreux présents de nos familles ainsi que de nos amis. Tous furent ravis de notre courage et de notre foi quils félicitaient dailleurs.
Avec le temps, les enfants ont grandi. A trois ans, je les inscrivis dans une école bilingue. Tout allait bon train jusqu'au jour où ma chère épouse obtint un boulot. Sa formation en Assistance Générale lui valut un poste de secrétaire dans une entreprise de fabrication d'objets biochimiques de la place. Nous en fûmes ravis car les dépenses coutumières ne pèseraient dorénavant uniquement plus sur moi. Cette embauche déplut à mes parents. Lors d'une discussion avec eux, je démontrai à mon père que la femme moderne n'est plus faite aux murs d'une clôture, et pris soin de mettre l'accent sur l'émancipation de celle-ci ; comme le défend l'homme à la marmite de Koka Mbala. Il en rit. Je m'en moquai. Les facteurs d'opinion divergent selon les époques même si l'homme à l'arbre fétiche disait que la nôtre est cousue de la leur. Après cette intrication idéologique, il me fallut sept mois afin que je ne pénétrasse la quintessence de l'avis de mon père : mon épouse me cocufia.
Pour une première fois, je regrettai la stupidité de mes yeux à se poser sur ce corps pourtant plein d'envies. Je divorçai de ma femme puisque non seulement la législation du pays m'y autorisait mais aussi celle de ma famille. Selon les exigences du procureur en charge de l'affaire, la garde des enfants me revint. Ceux-ci avaient déjà douze ans et étaient en troisième année du collège.
Aussi longtemps qu'ont duré mes moments de réflexion, je n'arrivais jamais à m'expliquer l'aval total de mon épouse au divorce. Mes enquêtes me renseigneront tardivement que le nouveau conjoint de mon épouse était son chef de service avec qui elle eut bien avant moi, une fille qui vit à New York aux États-Unis.
En effet, avec les enfants, je devins très strict et extrêmement rigoureux. Du retour des classes, aucune distraction ne s'imposait outre dévorer des livres, et les jeux-vidéo. Pas de visites d'amis. Leur chauffeur les déposait et bien évidemment les ramenait à une heure très précise suivant leur programme de cours. Mon épouse ou ex-épouse dirai-je, ne m'aurait joué un tour pareil si elle était restée, comme le voulait mon père, à la maison comme ménagère. Je n'eus plus de nouvelles de la mère de mes enfants. Pour assurer le ménage à mon domicile, j'engageai une domestique. Mes enfants obtinrent brillamment leurs premiers diplômes secondaires.
Alors qu'ils traînaient encore leur postérieur sur les bancs de la dernière classe du secondaire, je remarquai des attitudes étrangères chez ma jeune fille. Habituellement convalescente, je l'ai maintes fois surprise sous la douche en vomissant. À cela s'ajoutaient ses absences aux cours qui m'ont été signalées par le Proviseur de leur lycée. Le plus inquiétant est le silence qu'a gardé son frère. Cette doute ne me sombra pas car les jumeaux demeurent protecteur l'un de l'autre.
Ce fut un soir, je fis asseoir ma fille afin que nous discutassions. Pour ce faire, je la rassurai de la pleine confidentialité qu'elle pouvait y espérer. Au terme d'une longue haleine, ma fille m'avoua qu'elle attendait un enfant ; pour faire court, cest qu'elle était enceinte. Là n'est pas le problème. Son état, a-t-elle ajouté, datera bientôt de trois mois. Là n'est non plus le problème. Elle vomit de trop or la date de composition de leur examen était si proche, a-t-elle complété ; là n'est toujours pas le problème. L'irrecevable et l'impensable est que son frère jumeau en est l'auteur. Pour une deuxième fois, le ciel me tomba dessus. Pardieu ! Mon réveil se fit une semaine plus tard à l'hôpital, m'a-t-on rapporté ou peut-être ma-t-on trompé. Réellement, il est de ces moments que l'on traverse et qui laissent au tréfonds de notre être une marque ineffaçable. On est tenté de douter de lexistence de Dieu et de ses anges.
A mon réveil, je me remis et exigeai la suite du traitement à domicile. Interné, des recommandations de mes proches fusèrent comme à l'accoutumée. D'aucuns me proposèrent une interruption de la grossesse. D'autres me conseillèrent une mise à jour des passeports de mes enfants et les fais faire un voyage sur la France ou la Belgique, pays que je maîtrise bien. Je me résolus à tenir informé leur mère. Les heures qui ont suivi furent de terrifiantes invectives et de menaces de sa part. Un week-end écoulé, une âme attristée, des jours noirs. Je convoquai une réunion familiale afin de tirer au claire cette affaire. Le linge sale se lave en famille, disent-ils. Pour ne point épiloguer sur les prises de paroles de chaque intervenant, la décision finale prise est............................ ».
Gbbbbbbbbbouuuuuuuuuuuuuuuummmmmmmmmmmmmmmmm..............
Encore une déflagration de roquette à quelques encablures du camp. Tous les réfugiés qui suivaient d'une oreille religieuse l'émission à la radio et nattendaient que la fin de lhistoire avant de partir pour une destination inconnue, se dispersèrent aussitôt. Un amalgame de panique et d'affliction planait dans l'atmosphère pourtant quiet il y a un moment. Pendant que dautres, dépourvus démotion dû aux incessants ethnocides ponctués par des coups de grenade par-ci, coups de fusil par-là, et quon appelle les « habitués de guerre », disparaissaient, daucuns se désolèrent de navoir pas su la décision finale.
Gbbbbboooooooooummmmmmmmmmrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrnnnnnnnn.
Encore une autre...


Quelque part dans le monde. MsgV. Position Nord sud centre. 005566-A8. 34°C. 31 février 1807.