La terre renaissante irrigue le jardin
Courtise la rosée, réveille le matin
Le masque de l’hiver dans un linceul repose
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Le bossu arriva au cul d'une charrette,
Bien vite on l'entrava : lanières et chaînettes
Lui entraient dans la chair ; il était étonné,
On le connaissait sourd, on l'eût dit aveuglé.
Il fut mis à genoux, sur le bois circulaire,
On ôta sa chemise et il se laissa faire,
Pourtant, de temps à autre, il soufflait bruyamment
Comme un veau dont la tête oscille en ballotant.
L'amorce d'un fou rire essaima dans la foule
Puis enfla sur la place, une forme de houle :
Au spectacle effrayant de sa gibbosité
Se mêlaient des accents d'une folle gaieté.
La stupeur se peignit sur la face difforme
Quand la roue entama sa révolution ;
Le fouet amorça d'amples rotations
Pour s'abattre soudain sur la gargouille informe !
Bientôt le sang jaillit, on le vit ruisseler
Par mille et un filets sur les noires épaules,
Et la grêle lanière, semblant hors de contrôle,
Aspergeait de vermeil le peuple amoncelé.
Du condamné, pour fuir ce terrible supplice,
Prodigieux, puissant, tendu était l'effort.
L'étonnement passé, résigné et complice,
Son œil unique il referma et fit le mort.
Dès lors, ne bougea plus. Les coups pleins de furie
Du tourmenteur zélé, servant de la tuerie,
S'excitant, s'enivrant de l'exécution
Ne purent lui tirer la moindre émotion.
La flagellation, enfin était finie ;
Deux valets lavèrent le torse du patient,
Le frottèrent avec une sorte d'onguent.
Le peuple insatisfait, fidèle à sa manie,
Demandait encore plus, l'œil sur le pilori ;
Il ne partirait pas avant d'avoir bien ri !
Les injures pleuvaient, les rires et les pierres,
Sur le pauvre bossu ignorant les prières.
S'agitant de nouveau, il se mit à crier :
— À boire ! en aboyant, pareil au lévrier !
Mais sa détresse – humaine – excita l'assemblée,
Le raillant sur sa soif, sur sa face empourprée.
— À boire ! enchaîna-t-il pour la troisième fois
Avant de se trouver apeuré et pantois :
Une jeune fille, bizarrement vêtue,
Émergea de la foule. Une allure têtue
Se lisait sur son front que ceignait un bandeau,
Une petite chèvre accolée à son dos.
Notre belle monta rapidement l'échelle,
Se saisit d'une gourde, et tout comme une écuelle
La porta doucement aux lèvres du damné.
Et dans son œil alors si sec et si brûlé,
Une larme roula qui tomba, pathétique,
Le long de son visage affreux, inesthétique.
Sa soif était ardente et il but à longs traits,
Attentif à la femme aux candides attraits.
Quand il en eut fini, il allongea ses lèvres
Pour lui baiser la main, emporté par sa fièvre
Amoureuse, éperdue. Oh ! spectacle touchant
Que cette belle fille à l'aspect si charmant
Pieusement accourue auprès d'un misérable
— Sourd, difforme et méchant – d'un élan charitable.
Le peuple en fut saisi et il battit des mains
Comme s'il découvrait sous le bossu l'humain.
Bien vite on l'entrava : lanières et chaînettes
Lui entraient dans la chair ; il était étonné,
On le connaissait sourd, on l'eût dit aveuglé.
Il fut mis à genoux, sur le bois circulaire,
On ôta sa chemise et il se laissa faire,
Pourtant, de temps à autre, il soufflait bruyamment
Comme un veau dont la tête oscille en ballotant.
L'amorce d'un fou rire essaima dans la foule
Puis enfla sur la place, une forme de houle :
Au spectacle effrayant de sa gibbosité
Se mêlaient des accents d'une folle gaieté.
La stupeur se peignit sur la face difforme
Quand la roue entama sa révolution ;
Le fouet amorça d'amples rotations
Pour s'abattre soudain sur la gargouille informe !
Bientôt le sang jaillit, on le vit ruisseler
Par mille et un filets sur les noires épaules,
Et la grêle lanière, semblant hors de contrôle,
Aspergeait de vermeil le peuple amoncelé.
Du condamné, pour fuir ce terrible supplice,
Prodigieux, puissant, tendu était l'effort.
L'étonnement passé, résigné et complice,
Son œil unique il referma et fit le mort.
Dès lors, ne bougea plus. Les coups pleins de furie
Du tourmenteur zélé, servant de la tuerie,
S'excitant, s'enivrant de l'exécution
Ne purent lui tirer la moindre émotion.
La flagellation, enfin était finie ;
Deux valets lavèrent le torse du patient,
Le frottèrent avec une sorte d'onguent.
Le peuple insatisfait, fidèle à sa manie,
Demandait encore plus, l'œil sur le pilori ;
Il ne partirait pas avant d'avoir bien ri !
Les injures pleuvaient, les rires et les pierres,
Sur le pauvre bossu ignorant les prières.
S'agitant de nouveau, il se mit à crier :
— À boire ! en aboyant, pareil au lévrier !
Mais sa détresse – humaine – excita l'assemblée,
Le raillant sur sa soif, sur sa face empourprée.
— À boire ! enchaîna-t-il pour la troisième fois
Avant de se trouver apeuré et pantois :
Une jeune fille, bizarrement vêtue,
Émergea de la foule. Une allure têtue
Se lisait sur son front que ceignait un bandeau,
Une petite chèvre accolée à son dos.
Notre belle monta rapidement l'échelle,
Se saisit d'une gourde, et tout comme une écuelle
La porta doucement aux lèvres du damné.
Et dans son œil alors si sec et si brûlé,
Une larme roula qui tomba, pathétique,
Le long de son visage affreux, inesthétique.
Sa soif était ardente et il but à longs traits,
Attentif à la femme aux candides attraits.
Quand il en eut fini, il allongea ses lèvres
Pour lui baiser la main, emporté par sa fièvre
Amoureuse, éperdue. Oh ! spectacle touchant
Que cette belle fille à l'aspect si charmant
Pieusement accourue auprès d'un misérable
— Sourd, difforme et méchant – d'un élan charitable.
Le peuple en fut saisi et il battit des mains
Comme s'il découvrait sous le bossu l'humain.
Cet effet de masse est vraiment affolant.
Enfin, très bien écrit l'ensemble, ici une césure dérangeante :
Son œil unique il referma et fit le mort.
L'ensemble est très imagé, très plastique, très fort. Ça me plaît.
Beau rendu
Sur ce bossu...
Mon soutien et rien d'autre ce que je voulais dire a été dit dans les commentaires ci-dessous.
À bientôt sur nos lignes
La "transposition" est parfaitement maîtrisée et interprétée et, si vous permettez le jeu de mot, en vers et contre tous telle "l'histoire" originale.
Bravo.