Le vieux paysan Séverin est maintenant si vieux que son corps s'est ratatiné au point de ressembler à une grosse tortue avec une tête de momie. Il est très laid, sent la bave de vipère et sa ... [+]
La meilleure place que vous puissiez lui offrir est une cave, une vraie jolie petite cave voûtée bien aérée par l’œil du soupirail.
Si vous n’avez pas de cave, offrez-lui un cellier, non chauffé bien sûr, et aéré jusque aux premières gelées.
Sensible aux égards que vous lui aurez ainsi prodigués, ce petit meuble grillagé à l’armature de bois vous rendra fidèlement service.
Le contenu du garde-manger n’est pas officiellement défini, mais il est notoire qu’il doit contenir avant tout un saucisson. En effet, le saucisson est quasi éternel et constitue une provision très sûre en cas de disette impromptue. Le saucisson ne vous lâchera jamais. Tout au plus faudra-t-il vous munir d’une scie pour le trancher s’il a plusieurs années, mais vous pourrez toujours compter sur sa saveur et ses qualités nourricières pour vous sauver de la dénutrition.
Seront également entreposés sur les étagères du garde-manger, destiné à assurer votre survie, quelques fruits secs, tels que dates et figues dont la longévité égale à coup sûr celle du saucisson. Ces fruits secs sauront vous tirer du mauvais pas de la famine, le cas échéant.
Le garde-manger abritera encore quelques fromages bien mûrs dans une assiette, un délicat assortiment de pâtes de fruits, un paquet de cacao dans lequel, chaque année, viennent se rouler les truffes de Noël... Une banane entamée qui mûrit lentement à l’ombre des fromages, un pot de confiture veillant sur un carré de pâte de coing de deux ans d’âge... Une part de gâteau qui a séché au fil des mois mais qui, une fois cassé par des dents en béton (les vôtres ?) et amolli en bouche pourra vous apporter une certaine satisfaction et vous éviter de perdre connaissance, affamé que vous pourriez être dans un monde dévasté par un cataclysme malvenu.
En tout état de cause, c’est avec un respect palpable que vous approchez de la porte grillagée du garde-manger. En humble pénitent qui rejoint la grille du confessionnal, vous osez un œil respectueux à l’intérieur de l’isoloir. Une agréable surprise vous attend : en lieu et place d’un sévère confesseur, ce sont nourritures quasi divines qui vous accueillent avec de doux murmures gourmands vous invitant à vous régaler dans l’instant. Votre faiblesse devant la tentation appellera une absolution ex abrupto et sans réserve. Douce confession que celle d’un pénitent affamé se confiant à l’oreille bienveillante d’un léger treillis qui abrite autant de délices !
C’est au petit matin que le garde-manger vous sera le plus précieux ; un rapide passage à proximité saura vous tirer du magma des rêves nocturnes et vous recentrer d’un coup sur le rail inébranlable de la journée qui s’annonce. Rien de tel en effet que les effluves conjugués d’un antique saucisson flanqué d’un fromage puissant pour vous réveiller. Un coup de fouet ne serait pas plus efficace.
Vous me feriez plaisir immense en me proposant une visite à votre garde-manger. En échange, c’est avec joie que je vous présenterai le mien. Vous aurez même le droit d’y choisir une denrée, mais je vous demanderai de refermer très soigneusement la porte afin que soit assurée une aération fine et lente qui ne saurait être supplantée par une franche ventilation.
Vous dites ? Vous n’avez pas de garde-manger ?... Vous mettez vos fromages dans le bas du frigo ? Quelle imprudence !
Adieu, je vous laisse à vos convictions réfrigérées tandis que je vais faire honneur à mes saints amis Nectaire et Marcellin, qui embaument sans retenue mon petit confessionnal domestique.
Si vous n’avez pas de cave, offrez-lui un cellier, non chauffé bien sûr, et aéré jusque aux premières gelées.
Sensible aux égards que vous lui aurez ainsi prodigués, ce petit meuble grillagé à l’armature de bois vous rendra fidèlement service.
Le contenu du garde-manger n’est pas officiellement défini, mais il est notoire qu’il doit contenir avant tout un saucisson. En effet, le saucisson est quasi éternel et constitue une provision très sûre en cas de disette impromptue. Le saucisson ne vous lâchera jamais. Tout au plus faudra-t-il vous munir d’une scie pour le trancher s’il a plusieurs années, mais vous pourrez toujours compter sur sa saveur et ses qualités nourricières pour vous sauver de la dénutrition.
Seront également entreposés sur les étagères du garde-manger, destiné à assurer votre survie, quelques fruits secs, tels que dates et figues dont la longévité égale à coup sûr celle du saucisson. Ces fruits secs sauront vous tirer du mauvais pas de la famine, le cas échéant.
Le garde-manger abritera encore quelques fromages bien mûrs dans une assiette, un délicat assortiment de pâtes de fruits, un paquet de cacao dans lequel, chaque année, viennent se rouler les truffes de Noël... Une banane entamée qui mûrit lentement à l’ombre des fromages, un pot de confiture veillant sur un carré de pâte de coing de deux ans d’âge... Une part de gâteau qui a séché au fil des mois mais qui, une fois cassé par des dents en béton (les vôtres ?) et amolli en bouche pourra vous apporter une certaine satisfaction et vous éviter de perdre connaissance, affamé que vous pourriez être dans un monde dévasté par un cataclysme malvenu.
En tout état de cause, c’est avec un respect palpable que vous approchez de la porte grillagée du garde-manger. En humble pénitent qui rejoint la grille du confessionnal, vous osez un œil respectueux à l’intérieur de l’isoloir. Une agréable surprise vous attend : en lieu et place d’un sévère confesseur, ce sont nourritures quasi divines qui vous accueillent avec de doux murmures gourmands vous invitant à vous régaler dans l’instant. Votre faiblesse devant la tentation appellera une absolution ex abrupto et sans réserve. Douce confession que celle d’un pénitent affamé se confiant à l’oreille bienveillante d’un léger treillis qui abrite autant de délices !
C’est au petit matin que le garde-manger vous sera le plus précieux ; un rapide passage à proximité saura vous tirer du magma des rêves nocturnes et vous recentrer d’un coup sur le rail inébranlable de la journée qui s’annonce. Rien de tel en effet que les effluves conjugués d’un antique saucisson flanqué d’un fromage puissant pour vous réveiller. Un coup de fouet ne serait pas plus efficace.
Vous me feriez plaisir immense en me proposant une visite à votre garde-manger. En échange, c’est avec joie que je vous présenterai le mien. Vous aurez même le droit d’y choisir une denrée, mais je vous demanderai de refermer très soigneusement la porte afin que soit assurée une aération fine et lente qui ne saurait être supplantée par une franche ventilation.
Vous dites ? Vous n’avez pas de garde-manger ?... Vous mettez vos fromages dans le bas du frigo ? Quelle imprudence !
Adieu, je vous laisse à vos convictions réfrigérées tandis que je vais faire honneur à mes saints amis Nectaire et Marcellin, qui embaument sans retenue mon petit confessionnal domestique.