Juillet, les marcheurs sont nombreux sur le chemin qui mène au refuge. D’un creuset de verdure, le vallon s’élance vers les arêtes de granit ocre encore parsemées de névés. Du glacie ... [+]
C'était une drôle de ville. Elle paraissait un peu démodée, comme une vieille carte postale intemporelle. Les urbanistes et les marchands de bureaux n'avaient pas encore déclaré la guerre au vieux centre historique pour le transformer en boîtes à bobos et les quartiers périurbains s'appariaient avec des petits jardins ouvriers où chacun et chacune pouvait à loisir faire pousser quelques légumes.
Dans la drôle de ville il y avait de drôles de gens. Des gens qui avaient le coeur sur la main, c'est à dire que leur générosité était sans égale. Ils donnaient, ils passaient leur temps à donner et comme on ne sait pas toujours à qui donner à l'instant où l'on veut donner, ils avaient inventé les boîtes à dons.
Le principe avait déjà été expérimenté dans de nombreuses autres villes où ça n'avait pas vraiment fonctionné, car si personne ne donne alors la boîte à dons reste bêtement vide et très vite elle est squattée par les chats de gouttière.
Les boîtes à dons jalonnaient l'espace urbain tout entier, sur les trottoirs, dans des renfoncements d'immeubles, à l'entrée des parcs et jardins, collées aux abribus ou simplement posées au milieu d'un terrain vague, car il y avait encore des terrains vagues dans cette drôle de ville. C'était le plus souvent de vieilles armoires, des coffres ou des caisses de tous les styles, Louis XVI, Empire, Arts déco...ou pas de style du tout, mises au rebut ou trop grandes pour les appartements standards construits en banlieue. Boîtes parfois un peu vermoulues, avec des gonds cassés et qui, une fois réparées et bien nettoyées avaient encore belle allure.
Chaque boîte avait sa spécialité. On trouvait bien sûr des boîtes pleines de livres ou de disques vinyle, il y avait les boîtes à jouets, à vaisselles, à linges de maison, à vêtements, à petits appareils électroménagers, à matériels de puériculture, des boîtes spécialisées dans lesquels il n'y avait que des interrupteurs, des ampoules, des stylos ou du matériel de dessin. Et puis il y avait des boîtes hyper-spécialisées qui contenaient des objets dont on ne savait pas très bien quel en était l'usage, comme des composants électroniques, des bobines de cuivres, ou des outils mystérieux. Bref, chaque boîte à dons avait sa spécialité et la population savait où donner et où trouver ce dont elle avait besoin. Les habitants de la drôle de ville avait inventé la plus grande bourse d'échange du monde. Tout ce qui pouvait exister dans la drôle de ville circulait librement de main en main par l'intermédiaire des boîtes à dons. Certes les commerçants faisaient grise mine, mais finalement tous s'accommodaient de cette économie circulaire.
Quand les jardins ouvriers produisaient trop de blettes et que les cerisiers craquaient sous le poids des cerises, les maraîchers allaient vite ouvrir une boîte à cerises ou à blettes qui une fois vidée se trouvait immédiatement affectée à d'autres dons.
Et puis il y avait des boîtes très particulières. Celles ci étaient plutôt petites et rares, souvent bien dissimulées sous des écrins de verdure à l'angle d'un square, ou au fond d'une impasse, cachées sous un lierre de façade. Elles étaient souvent peintes de couleurs vives et décorées par des artistes de rues. C'était, les boîtes à rêves et dans les boîtes à rêves les gens donnaient et prenaient leurs rêves pour des réalités sous forme de dessins, de poèmes, de poteries, de sculptures, de broderies, d'aquarelles ou de bijoux. Des boîtes à étagères multiples qui composaient des univers fantastiques, colorés, magiques et pleins de surprises. Souvent quand on en ouvrait la porte ou soulevait le couvercle une petite musique s'en échappait dans la rue comme une invite à les découvrir.
Je suis passé un jour dans cette drôle de ville au cours d'un déplacement professionnel, et j'ai cherché les boîtes à rêves, j'ai cherché parmi toutes les boîtes à clous, à chaussettes, à petite cuillères, à chaussures et autres cocottes minutes. J'ai demandé aux drôles de gens où je pouvais trouver une boîte à rêves, on me répondait toujours de façon évasive, un peu mystérieuse. J'ai cherché longtemps, longtemps si bien qu'à la fin de la journée je n'avais trouvé aucune boîte à rêves. Je décidais de rentré à mon hôtel, alors que je remontais vers la vieille ville par un bel escalier médiéval, je croisais une petite fille assise sur une marche qui attendait sa maman devant une boulangerie. Je lui demandais si par hasard il y avait une boîte à rêves dans le coin, elle me regarda fixement avec l'air de dire que j'étais bien naïf pour poser ce genre de question. Elle sortit de sa poche de jogging une feuille de papier pliée en quatre et me la tendit ostensiblement en disant: « Voilà Monsieur, tu dois lire cette histoire pour trouver les boîtes à rêves car tu viens d'arriver dans la mienne.»
Dans la drôle de ville il y avait de drôles de gens. Des gens qui avaient le coeur sur la main, c'est à dire que leur générosité était sans égale. Ils donnaient, ils passaient leur temps à donner et comme on ne sait pas toujours à qui donner à l'instant où l'on veut donner, ils avaient inventé les boîtes à dons.
Le principe avait déjà été expérimenté dans de nombreuses autres villes où ça n'avait pas vraiment fonctionné, car si personne ne donne alors la boîte à dons reste bêtement vide et très vite elle est squattée par les chats de gouttière.
Les boîtes à dons jalonnaient l'espace urbain tout entier, sur les trottoirs, dans des renfoncements d'immeubles, à l'entrée des parcs et jardins, collées aux abribus ou simplement posées au milieu d'un terrain vague, car il y avait encore des terrains vagues dans cette drôle de ville. C'était le plus souvent de vieilles armoires, des coffres ou des caisses de tous les styles, Louis XVI, Empire, Arts déco...ou pas de style du tout, mises au rebut ou trop grandes pour les appartements standards construits en banlieue. Boîtes parfois un peu vermoulues, avec des gonds cassés et qui, une fois réparées et bien nettoyées avaient encore belle allure.
Chaque boîte avait sa spécialité. On trouvait bien sûr des boîtes pleines de livres ou de disques vinyle, il y avait les boîtes à jouets, à vaisselles, à linges de maison, à vêtements, à petits appareils électroménagers, à matériels de puériculture, des boîtes spécialisées dans lesquels il n'y avait que des interrupteurs, des ampoules, des stylos ou du matériel de dessin. Et puis il y avait des boîtes hyper-spécialisées qui contenaient des objets dont on ne savait pas très bien quel en était l'usage, comme des composants électroniques, des bobines de cuivres, ou des outils mystérieux. Bref, chaque boîte à dons avait sa spécialité et la population savait où donner et où trouver ce dont elle avait besoin. Les habitants de la drôle de ville avait inventé la plus grande bourse d'échange du monde. Tout ce qui pouvait exister dans la drôle de ville circulait librement de main en main par l'intermédiaire des boîtes à dons. Certes les commerçants faisaient grise mine, mais finalement tous s'accommodaient de cette économie circulaire.
Quand les jardins ouvriers produisaient trop de blettes et que les cerisiers craquaient sous le poids des cerises, les maraîchers allaient vite ouvrir une boîte à cerises ou à blettes qui une fois vidée se trouvait immédiatement affectée à d'autres dons.
Et puis il y avait des boîtes très particulières. Celles ci étaient plutôt petites et rares, souvent bien dissimulées sous des écrins de verdure à l'angle d'un square, ou au fond d'une impasse, cachées sous un lierre de façade. Elles étaient souvent peintes de couleurs vives et décorées par des artistes de rues. C'était, les boîtes à rêves et dans les boîtes à rêves les gens donnaient et prenaient leurs rêves pour des réalités sous forme de dessins, de poèmes, de poteries, de sculptures, de broderies, d'aquarelles ou de bijoux. Des boîtes à étagères multiples qui composaient des univers fantastiques, colorés, magiques et pleins de surprises. Souvent quand on en ouvrait la porte ou soulevait le couvercle une petite musique s'en échappait dans la rue comme une invite à les découvrir.
Je suis passé un jour dans cette drôle de ville au cours d'un déplacement professionnel, et j'ai cherché les boîtes à rêves, j'ai cherché parmi toutes les boîtes à clous, à chaussettes, à petite cuillères, à chaussures et autres cocottes minutes. J'ai demandé aux drôles de gens où je pouvais trouver une boîte à rêves, on me répondait toujours de façon évasive, un peu mystérieuse. J'ai cherché longtemps, longtemps si bien qu'à la fin de la journée je n'avais trouvé aucune boîte à rêves. Je décidais de rentré à mon hôtel, alors que je remontais vers la vieille ville par un bel escalier médiéval, je croisais une petite fille assise sur une marche qui attendait sa maman devant une boulangerie. Je lui demandais si par hasard il y avait une boîte à rêves dans le coin, elle me regarda fixement avec l'air de dire que j'étais bien naïf pour poser ce genre de question. Elle sortit de sa poche de jogging une feuille de papier pliée en quatre et me la tendit ostensiblement en disant: « Voilà Monsieur, tu dois lire cette histoire pour trouver les boîtes à rêves car tu viens d'arriver dans la mienne.»