Ce soir-là, il a entendu les avions bourdonner, là-bas, au-dessus de la ville.
Tous ont entendu les avions, et le sifflement mortel des bombes.
Il a vu le feu tomber sur Guernica, et la fumée
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Après des semaines, voire des mois de préparation et de préparatifs, c’est le grand jour. Enfin !
Toutes les voitures en compétition, sorties du secret des « écuries », sont maintenant alignées sur la bande blanche du départ, moteurs ronflants, prêtes à s’élancer.
Le public est venu nombreux pour applaudir la course, « la course du siècle » aux dires de certains. Et ils sont nombreux à le penser.
Soudain, une grosse voix tonitrue au-dessus du brouhaha.
« Prêts ! Partez ! » Le bras du starter s’abaisse.
Le Grand Prix de France de Formule 1 vient d’être lancé.
Je me cramponne au volant de mon bolide et je mets les gaz. A fond. Ma Ferrari s’arrache brusquement du sol et poursuit sa trajectoire en prenant de la vitesse.
Je dois me concentrer sur ma conduite. La piste dévale une pente raide et se redresse ensuite pour amorcer un virage serré. Je le négocie sans freiner, en doublant au passage un concurrent qui se traine dans sa Porsche ! « Le pauvre ! Il n’a pas vu le virage ! Sortie de route en plein dans les ronces ! »
Mes mains sont moites, le vent redresse mes cheveux, mes pieds jouent librement sur les pédales, ralentir, aller plus vite... Le circuit est truffé de pièges et les éviter demande une attention de tous les instants.
Les yeux rivés sur le ruban d’asphalte, j’entends les spectateurs trépigner, les filles se bousculer pour nous encourager, nous les pilotes intrépides. Tous crient de joie quand je dépasse un escargot en Renault. Ils scandent « Ferrari, Ferrari... »
J’essaie d’accélérer encore, mais mon moteur chauffe, je transpire à grosses gouttes. Pourtant, je la vois là-bas, au bout de la piste, L’ARRIVEE !
« Je vais gagner, je vais gagner !!! »
Soudain, un bruit mécanique m’alerte alors que je savoure déjà ma victoire. Je sens ma voiture diminuer peu à peu sa vitesse. « Noon ! Je ne vais pas perdre, non, pas maintenant ! » Mes muscles se tendent au maximum dans un ultime effort.
Mais rien n’y fait ! Au bout de quelques mètres, mon rêve s’écroule ! Les pédales et le bloc moteur de mon engin tombent par terre, l’escargot Renault me passe devant et me tire la langue. Il agite les bras en vainqueur, sûr maintenant d’être le premier !
Mon bolide rutilant, que j’ai tant bricolé et chouchouté, mon beau cheval rouge m’a laissé tomber.
Il s’est transformé en un tas de ferraille et de carton, m’obligeant à abandonner la course.
« La honte » devant mes supporters.
J’ai les larmes aux yeux, et, en sortant du cockpit de ma voiture, je lui donne un coup de pied rageur !
Dans mon village d’autrefois, quand nous étions enfants, nos caisses à savon, équipées de roues, avaient presque toujours des mollets Ferrari, Porsche quelquefois, Renault plus rarement !!!