Emile:" Jusqu'à quand "

-Maitre ? Vous plaisantez ? Vous pouvez me cogner,comme l'ont fait tous les autres mais je ne vous appellerai pas maitre.
Voilà des mots qui retentirent dans les oreilles de Monsieur Bourgon tel une onde de choc . Il baissa alors les yeux et observa attentivement ce jeune homme de qui ils venaient, accroupit devant lui , et qui ramassait du bois stocker dans le hangar pour les couper en morceaux plus petits et facile à bruler , car l'hiver était proche. Intrigué, irrité, mais en retard pour un rendez vous avec son médecin il ne pouvait s' éterniser là ; Mr Bourgon ne rajouta guerre de mot et rentra dans son chalet. Gigantesque et impressionant , ce chalet s' imposait de part son architecture à nul autre pareil dans les alentours de cette petite commune du nord de l'Europe ; Cet homme bourgeois qui avait fait fortune dans la finance, avait élu domicile là , pour lui ,sa femme et sa fille , afin de commencer ses agréables jours de retraite. Emile , en transportant le bois à travers cet immense cour de gazon , pour le lieu où il devait les fendre ,était dans un état psychique profond , une introspection , des questions lui montait à l'esprit à tout va :
- Qui suis je ? Qu'est-ce que je fais là ? Est-ce à ceci que se résume ma misérable existance ? Pourquoi suis je né ? Pour être assujettit à un joug extérieur indéfiniment ? N'ai-je pas droit à une part de liberté ?
La rage montait en lui, et frappant de toutes ses forces le bois se brisa d'un coup sec en deux morceaux , mais il eut mal à un de ses doigts posés sur la hache et qui reçut mal le choc, Il s'écria alors...
-Raaaaaaaahhhhhh...
Tel un ras le bol venant du plus profond de ses tripes, qui le calma . Il s'assit un instant sur le gazon pour souffler un peu. Dans ce paysage magnifique, le chant du soir des oiseaux qui migraient , il leva les yeux au ciel , et il fut comme transporté...
Là dans sa chambre d'étudiant à Ouagadougou , d'à peine dix mètres carré. Il vit alors la première de couverture de l'un de ces bouquins sur le chevet de son lit où il rangeait le peu qu'il pouvait se procurer. Féru de lecture , c'était le premier bouquin sur la traite des noirs en Afrique du Sud qu'il avait pu lire ; Œuvre d'un grand écrivain américain pro démocrate : «  Une Saison Blanche et Sombre ». Se plongeant à nouveau dans les méandres de sa lecture , il se vit lui comme vivant ce qu'avait vécu le personnage principal de cet œuvre ; Souffrant un martyre sans issu ,comme écrasé dans un tunnel de mine , étouffant , transpirant et n'apercevant pas de lumière au bout. Il ressentit alors réellement au plus profond de lui ; les sensations qu'avait essayer de transmettre l'auteur.
Emile est un étudiant studieux , du haut de ses vingt trois ans il étudiait à l'université de Ouagadougou ,sous la tutelle financière d'une ONG ,parvenant à survivre tant bien que mal ,dans une chambre de la cité universitaire. Ses parents où étaient-ils ? Il n'en savait rien ; Depuis ce jour où, fouillant la guerre ,il avait par mégarde lâché la main de sa mère qui tenait fermement la sienne, après un assaut de terroristes ,dans sa localité. Il se trouva là tout seul ; Il avait huit ans ,pleurant et criant faiblement le nom de ses parents. Capturés , tués , perdus,qu'était-il arrivé à ses parents ? Il n'en pouvait dire mot ! Il avait alors été recueilli par une ONG dans un camp de refugiés , puis placé en orphelinat, et enfin, en famille d'accueil. Battu , cogné , maltraité,enfermé dans le noir pendant des heures ; Emile avait tout vu , dans chacune de ces familles ; Il était principalement rejeté , et traité comme l'enfant à tout faire. Il avait un caractère de conquérant, un enfant qui voulait sa liberté, il en rêvait , perspicace et observateur , il s' était toujours montré comme un enfant à l'écart des autres. Heureusement l'aide humanitaire qui l'avait pris en charge, se rassurait à chaque fois que sa scolarité était effective. Là au moins il trouvait un grain de liberté, et il évoluait à l'école d'année en année malgré tout. Mais comment avait t-il fait pour se retrouver là !
La nuit était tombée et les aboiements du chien de la maison voisine rappela Emile à la réalité. En face de lui une silhouette dont les traits s'apparentait à ceux d'une jeune femme élancé et fine s' approchait. C'était Nelly, la fille de Monsieur Bourgon qui venait lui signifier la volonté de sa mère, qui l'appelait pour faire monter les courses. Nelly était une jeune femme très belle, élégante et charmante , sa beauté était assez éblouissante ; Elle avait pris l'habitude depuis l'arrivé d'Emile, de lui lancer des regards ci et là , et de se faire remarquer ; elle était obnubilée par son charme et son charisme , l'envie de s'offrir à lui naquit dans ses pensées. Mais alors, Emile ne se laissa pas allez à ce jeu , il ne pouvait se permettre quelque chose d'aussi impure , pour lui, l'amour ne se résumait guerre aux désirs.
Emile est un étudiant brave , très vite , il avait obtenue une licence en physique , et décrocha une bourse pour aller continuer ses études en Europe ;Il entreprit alors bien péniblement toutes les procédures requises et en fin de compte il put s'offrir un vol dans un avion qui fit escale en Tunisie , à la frontière avec la Libye. L'attente pour le décollage fut longue , Emile se permit alors les cents pas hors de l'aéroport. Placé devant un marchand de pop-corn ,il observait la ville. D'une seconde à l'autre, l'on sortie du vacarme continu du trafic à celui causé par une troupe de personnes qui fuyaient tel des braconniers pourchassés par un éléphant en colère. C'était tous de jeunes gens à la peau noire qui courraient pour se sauver. Puis, surgit de nul part des hommes armés tel des policiers. C'était la police des frontières, qui , dut à une fourgonnette qui avait été mal fermée laissa s'échapper ces jeunes gens qui avaient illégalement traversés la frontière. Emile était là, stupéfait, paralysé par la scène. Pendant ce temps , un des policiers l'observait. Emile était grand, les épaules larges , beau de figure et de peau noire et claire . Ces paramètres suffit pour qu'il soit arrêté et paralysé par terre par plusieurs policiers, il essaya de se débattre et de leur expliquer qu'il n'avait rien à voir là-dedans, mais élas, ce fut en vain. On le menotta et l'emmena dans un fourgon tel un brigand. Gardant son calme , il se dit qu'il aurait à s'expliquer au poste de police des gardes frontières. Il attendit longtemps mais jamais il n'arriva. Le fourgon s'arrêta devant un hangar abandonné , on le fit sortir et le mit dans une cage tel une cellule, pleine à craquer de personnes maltraitées et battues, criant à la liberté, on aurait dit des marchandises .C'était essentiellement de jeunes gens d'origines divers , blancs ,noirs, métissés, jaunes. L'on entendit dans tout l'entrepôt bondé la voie d'une jeune fille crier d'une façon assourdissante –« LIBERTEEEEEE... »
Une mâtiné calme au nord de l'Europe dans une petite ville, au café du coin ; Monsieur Bourgon :
-Un café sans sucre s' il vous plait
Le gérant.
-Tout de suite Monsieur
-Merci
-Alors Mr Bourgon, c'est nouveau, vous êtes dans la ville depuis plus longtemps que d'habitude, envisageriez-vous rester définitivement ?
-C'est le cas, en effet mais je manque cruellement de main d'œuvre chez moi, et j'aimerai si possible un homme à tout faire , mais hélas!
-Je connais quelqu'un qui pourra résoudre votre problème , il est capable de vous offrir des hommes ou femmes prêts pour la tache , vous n'aurez qu'à payer et il sera à vous tel votre propriété
-Alors renseignez vous et dites moi combien il faudra
-C'est comme si c'était fait
Un matin, alors que Mr Bourgon se rapprochait de son homme à tout faire :
-Ramasse et coupe du bois sec l'hiver est proche
-Oui Monsieur
Levant la main comme pour lui donner un soufflet, et avec un ton autoritaire
-C'est « OUI MAITRE » !
- Maitre ? Vous plaisantez vous pouvez me cogner comme l'on fait tous les autres mais je ne vous appellerai pas maitre.