Rayon de soleil

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Une nuit calme au mois de mai. J’ouvre la fenêtre et je jette un coup d’œil sur le ciel, ce n’est plus un ciel ordinaire avec étoiles, il a plutôt l’air d’un grand trou noir. Seule la lueur de la lune essaie de percer cette obscurité. Je ferme les yeux et je commence à naviguer avec cette barque dorée à travers les noirceurs. Je dois aller plus profondément pour découvrir si ces ténèbres sont réelles ou si elles ne sont que dans mon âme puisque là-bas est aussi obscure que dehors.
Ce n’est pas ma faute, je n’ai que 20 ans. Moi ainsi que ma génération, nous ne connaissons pas les malheurs, les guerres, les épidémies, toutes ces catastrophes dont l’humanité a souffert. Je suis née dans un temps calme où tout suivait son cours. Je n’arrive plus à reconnaître le monde qui m’appartient. Les villes sont désertes comme si des gens n’y habitaient jamais. Il règne un silence insupportable qui tourmente aussi bien que le tapage. Nous vivons une scène de film d’horreur et de laquelle nous ne pouvons pas y échapper, elle nous hante constamment. Cette obscurité s’appelle Corona. Un ennemi invisible qui a envahi notre quotidien. Sa présence pèse comme un châtiment, comme un avertissement. Le comportement inconscient de l’homme a entraîné des conséquences lourdes. Beaucoup d’actions de gens sont destructives si bien qu’il n’y a place sur la Terre qui ne soit pas affectée par la pollution. Peut-être il est venu le temps pour payer ces erreurs, il faut rendre à la nature tout ce que lui on a ôté.
Je continue à naviguer dans l’obscurité. Nous sommes amenés dans une situation qui a mis fin à nos jours insouciants, à nos habitudes agréables, à toutes ses choses que nous faisions avec volupté. Maintenant, nous ne sommes plus que des hommes effrayés portant des masques. La vie que nous avons mené jusqu’à présent s’est fondue comme un cube de glace. Nous avons pensé que ce mal est tant de kilomètres de nous, mais le non invité s’est rendu devant nos portes. Maladie. Contagieuse. Mortelle. Répandue dans le monde entier, elle met en danger nos vies, mais surtout celles de plus âgés, ceux qui sont malades et fragiles, qui ne peuvent pas lui faire face. Nous sommes dans un temps où naissent des nouveaux héros en manteau blanc et qui mènent inlassablement la lutte contre ce fléau. Mais qu’est ce qui se passe avec des gens sains ? Il ne se serrent pas la main, il n’y a plus de sourires sur leurs visages. Nous ne sommes en sécurité tant qu’on nous tient éloignés. Comment interdire aux gens de ne nous pas rapprocher ? Que pourrait combler ce manque de communication, de partage que la distance a provoqué ? Les gens sont séparés comme s’ils étaient des ennemis. Mais, le plus grand perdant reste certainement l’amour. Les étreintes et les bisous ont disparu. Les cœurs des amoureux ne battent pas autant qu’auparavant. L’amour y est endormi dans l’espoir qu’il sera réveillé.
Je flotte dans les ténèbres. Il semble que c’est l’incertitude constante qui nous fait tomber dans le désespoir. L’avenir ne peut rien nous promettre. Chaque nouveau jour apporte la peur et la panique. Le temps est arrêté, les pendules tournent à l’envers. Pourquoi cela nous est arrivé ? Nous votons pour la vie et pourtant nous obtenons la mort. La liberté. Où est-elle ? Elle est restée comme oiseau aux ailes brisées. S’il n’y a pas liberté, il y a le noir. Et s’il n’y a pas le noir il y aura la vie. Le noir apporte la violence. C’est un moment favorable pour se comporter brutalement envers les femmes. La solitude prend une dimension nuisible. Isolés, abandonnés on ne peut se livrer qu’à des pensées noires teintes d’horreur qui déchirent, empoisonnent, démembrent.
Je continue à naviguer sur cet espace infini. Je ressens que cette nuit ne finira pas, c’est comme tunnel sans sortie. Je tiens mes yeux fermés, je peur de ce que je vais voir. Ne pourrons-nous jamais revenir à notre état précédent ? Où trouver ce morceau de bonheur perdu sans lequel nous sommes incomplètes ?
Lentement je termine mon voyage. Le soleil se lève. Les premiers rayons caressent mon visage. Je commence à ressentir des étincelles et frémissements dans mon âme, celles de l’espoir. J’ouvre les yeux. Autour de moi c’est encore obscur. Mais je n’ai pas peur. Je suis guidée par ce point éclair. Je comprends que je veux vivre pleinement, je veux la vie qui me rend heureuse. Personne ne peut m’empêcher de rêver. Merci à celui qui a inventé le rêve. C’est n’est que là-bas que je peux être ce que je veux devenir. Ce n’est de là qu’on puise la force, l’énergie de changer le monde, de le transformer dans un lieu agréable pour tous. Après la pluie, le beau temps. Cette pandémie doit partir. Que notre vie soit belle comme les couleurs de l’arc-en-ciel. Que la lumière de la bonté des gens ralliés brise ces ténèbres pour pénétrer et réchauffer les âmes des gens.