Précipice

Musulmane ♡ Libanaise ¤ Futur traductrice ☆

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux.

L’obscurité m’enveloppe pleinement et le goût amer de la frayeur me regagne de nouveau. Physiquement, je ne sens que la lourdeur de mes paupières. Je décide alors de faire bouger mon corps qui, étrangement, ne répond pas à mes efforts. Le silence pèse lourd sur mes épaules et j’essaie d’émettre un quelconque son. Je panique, suis-je dans un cauchemar ?

De loin, j’aperçois la lueur d’une flamme qui avance vers moi. La bougie brise le silence en tombant des mains de l’ombre que je ne vois toujours pas clairement. Le feu commence à se propager nonchalamment sur le sol, je coupe ma respiration. Et si c’était de cette façon que se passait la mort, au creux d’un cercle de flammes sans pouvoir avoir l’aide d’un autre être humain ? Même si cette théorie est complètement contraire à mes croyances, un très mauvais pressentiment me gagne.

Les flammes forment un rectangle parfaitement dessiné autour de mon corps qui ne s’anime toujours pas. La situation empire devant mes yeux et mes questions sans réponses doublent dans mon crâne. Sous mon regard ébahi, deux personnages se dessinent sur le sol, l’un à ma gauche et l’autre  à ma droite. Une mélodie étrange leur donne vie et la scène paraît si irréelle.

Une créature à l’apparence androgyne se tient à ma droite, la lumière émanant d’elle me tient bouche bée. Elle est pâle et calme, du moins jusqu’à l’instant. Elle fixe la créature qui se tient devant elle et elle ignore complètement ma présence, suis-je devenue invisible maintenant ? Je tourne ma tête vers la troisième personne, elle est grande et je sens de la négativité en sa présence, contrairement à l'autre qui semblait plus agréable à regarder. Je voulus échapper à ce sentiment de spectatrice. Les deux se tiennent l'une en face de l'autre et je ressens que le danger s’approche. Un débat s'annonce à coup sûr, le conflit entre les deux est bien visible.

La créature sur ma droite rompt le silence d'un coup.

-"Je préfère que tu commences par t'expliquer Thanatos, ce que tu as fait aujourd'hui n'a fait qu'empirer les choses. “Commença-t-elle.

-"Tu sais très bien que pour moi c'est le contraire, je ne fais qu'approcher de mon but."

J’en conclus que la créature qui m'effraie s'appelle Thanatos.

-"Ton but n'est pas le mien."

-"C'est ton problème pas le mien, Éros."

La deuxième créature s'appelle Éros. Elles ont des buts différents.

-”Tu ne la guides qu’à l'anéantissement.”

-"Je la guide à sa destinée."

-"J'essaie de lui donner une raison de vivre." répondit Éros innocemment.

-"Elle n'a pas besoin de vivre, c'est une perte de temps."

-"Elle était si proche du but aujourd'hui, elle allait laisser chaque faute derrière elle et avancer, elle allait avancer vers une version meilleur d'elle-même. Si tu ne t'étais pas mis dans le chemin de ses idées, elle aurait pu faire des miracles aujourd'hui et j'aurais pu lui montrer qu'elle mérite de vraiment vivre, qu'elle mérite de sentir l'amour en elle, qu'elle mérite d'être humaine."

-"Tu lui aurais montré des choses qui ne valent pas le coup d'être, tu lui aurais donner une raison de retomber dans le même panneau. Elle se colle aux problèmes comme un aimant et au fond elle aime ça, même si ça lui fait du mal, elle aime s'accrocher à mon instinct, elle m'aime car je ne lui coûte pas mille efforts."

-"Mes efforts donnent au moins des résultats qui en valent le coup. Ton chemin conduit toujours au même endroit tragique."

Je commence mieux à voir les choses, la conversation tourne autour d'une fille que je connais peut être bien.

-"Au final je suis le gagnant."

-"Je ne vois pas les choses comme ça et tu le sais bien, notre combat éternel ne t'as toujours pas montré que demain est une autre chance pour recommencer ?"

-"Demain est juste un temps supplémentaire pour montrer que j'ai raison."

Éros haussa des épaules comme signe de désespoir. Je me demande s'ils veulent que je sache à propos de cette conversation ou s’ils ne savent pas que je l’entends.

Mon instinct de mort, Thanatos, s'évapora d'un coup et s'en suivit mon instinct de vie, Éros, aussi.Je me retrouve seule à nouveau dans le noir et au moins maintenant je sais que j'ai les yeux ouverts.

J'ai toujours vécu en sachant qu' Éros et Thanatos vivaient en moi, mais en cet instant tout est en train de prendre un tout autre sens à mes yeux. Je suis dans ma tête et je réalise combien elle m'en veut.

Sauf que je n'arrive toujours pas à s'échapper de ce trou noir, y a-t-il encore une suite ? Un bruit interrompt d'un coup le fil de mes pensées, je relève la tête pour observer un tourbillon de phrases, de mots emmêlés. Dès que je les fixe je remarque que les mots commencent à se propager dans tous les sens en une course folle dont je ne vois pas la fin. J'ai peur, je veux que tout se termine, je veux que ça s'arrête je crie de toutes mes forces et je réalise que j'ai ma voix de nouveau. Mes cris aboutissent au moins à quelque chose, tout autour de moi est bouche-bée, tout ne bouge plus. J'arrive à déchiffrer les mots, les phrases: "tu peux y arriver", "tu ne vas jamais t'en sortir", "il y a une solution", "le temps passe et tu ne peux rien y faire".

Je comprends et je n'ai plus besoin de continuer, je me suis toujours jetée sur l'un des deux côtés. J'ai toujours cru trouver le plaisir et la solution en une seule face, soit le bien, soit le mal, et en voyant ce qui se passe ici je réalise combien je suis en train de me perdre.

L'équilibre, l'équilibre entre Éros et Thanatos, l'équilibre entre mes idées. Je me réveille d’un coup, je suis dans mon lit et trempée de sueur.