Ma mère est-elle morte ?

Je suis né seul. J'ai grandi seul. Je vis seul. Je vieillirai seul et mourrai seul. Tel est mon destin funeste.

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Serait-ce
possible ? Est-ce vrai ?
Ma mère nous a quittés ! Mon cœur fragile agonise. Mes yeux la regardent. Allongée sur son lit, Mes larmes m'échappent. Le drap est retiré. Mes jambes me font défaut. Mon corps frisonne. Je glisse. Le sol est inaccessible. Le temps me paraît interminable et mon corps plane dans le vide en laissant échapper mon âme.
J'ouvre les yeux. Je contemple la salle. Je suis surpris. Je suis sur mon lit. Où est ma mère? Je sors de ma chambre. Les gens se sont rassemblés dans la maison. Ils me parlent. Je vois leurs lèvres bouger. Je sais ce qu'ils disent. Néanmoins, je ne perçois rien, si ce n'est le léger souffle du vent.
Ma mère est vraiment morte ! Je la trouve allongée sur une natte à même le sol. Elle est dans des tissus blancs qui recouvrent tout son corps. La famille et moi avons pris le corps. L'un parmi nous trébuche. Le corps se retrouve sur le lit. Le visage se découvre. Le regard de la famille, se porte sur moi. Ils craignent ma réaction. Je fixe ma mère. Je pleure. Je maudis la terre et tout ce qu'elle contient comme richesse. Tous n'est que prêt et humiliation. Le corps est soigneusement couché sur le lit. Il sera conduit, demain matin, au cimetière; conformément à la tradition de mes
pères.
Il fait nuit. La tristesse me gagne. Je m'occupe. Je répare les prises électriques. Je répare les fuites d'eau. Je pars voir mon père. Il reçoit les condoléances de la foule. Il est seul même parmi toute cette masse. Que faire ?
Je me rends dans la chambre des invités. Elle est sombre et déserte.
Elle n'a pas servi depuis deux mois. La flaque d'eau la rend inhabitable. Je place
l'échelle. Je retire l'ampoule grillée. Je pense à ma mère. J'entends un bruit. Est-ce mes oreilles qui sifflent ? Peut-être! Je continue.
Un pas... deux pas... trois pas. J'écoute avec attention.
Rien ! Pourtant, je suis sûr que c'étaient des pas d'un individu marchant dans la flaque d'eau. Je continue. Le bruit persiste derrière moi. Je me retourne. Je perçois une silhouette blanche à l'autre bout de la pièce. Je ne dis rien. J'attends. Le bruit s'arrête. Je regarde. La silhouette a disparue. Je continue mon travail. J'ai peur mais
à quoi bon hâter le pire ? Je suis en haut. Je place l'ampoule. Je descends. Je
l'allume. La peur me glace le sang.
Dans la flaque d'eau, je vois un tissu blanc pareil à celui de ma mère. Je me
précipite dans sa chambre. Le morceau de tissu qui recouvre son visage a
disparue. Je retourne réparé la fuite d'eau. Je me dis: « C'est juste un hasard ».
À ma grande surprise, je trouve un second bout de tissu. Il est sur le précédent. Il est rouge de sang. Je hurle. La famille ce précipite. Ils disent qu'ils ne voient aucun morceau de tissu. Je frotte mes yeux. Je regarde. Ils ne sont plus là ! Je panique d'avantage.
Ils me ramènent au salon. Je m'assois sur le canapé. Je fixe la télévision mais je ne vois rien. Certe c'est le cœur qui voit et entend. Certe c'est le cœur qui comprend. Je ne sais comment; je m'assoupis.
J'entends une voix. Qui est-ce ? Est-ce ma mère ? Pourquoi je l'entends ? Elle est là! Qu'est-ce qui m'arrive ? J'ouvre les yeux. Toute la famille est là. On me sermonne pour avoir dormi sur le canapé.
Moi, je suis heureux. Ma mère me regarde. Elle sourit. Je souris. « Ce n'était qu'un cauchemar! » : Me suis-je dis.
Ainsi, J'ouvre la porte. Je vais au lycée technique. Ma mère me regarde. Je regarde l'extérieur. Rien n'existe ou plutôt, tout existe mais je ne vois rien. Un frisson me parcourt le dos. J'ai peur !
Je ne crois plus en rien. Non, je crois en tous et ne comprends rien. Je me tourne vers ma mère. Elle n'a plus de visage. La peur grandit en moi. Je recule.
Mon père me tiens par l'épaule. Je sursaute. Il me pousse dans le vide. La main, est-elle celle de mon père ? Je ne le sais. Je tombe dans le vide. La main de mon père s'évanouit dans l'ombre.
Je tombe. J'observe. Ma mère est-elle morte ? Est-ce ma faute ? Est-ce mes yeux ? Est-ce mon cœur ?
Dans le noir, Je panique. Dans les ténèbres, je me bats. Je ne peux rien. Je tombe. Je cris. Je sursaute. Je me réveille. Je suis sur mon lit. Je suis trempé. Je suis à l'internat. Il est deux heures. J'appelle ma mère. Personne ne décroche. Je réessaierai demain.
En attendant, suis-je dans le noir ?