La chute aux enfers

SUIS-JE DANS LE NOIR OU AI-JE LES YEUX FERMÉS ? PEUX-ETRE LES DEUX. Certaines altérations sont si brusques qu'on ne voit rien venir. En un clic, on passe du tout blanc au tout noir, d'un univers paradisiaque au tréfond de l'enfer. On est tellement stupéfait, tellement horrifié que la seule chose que nous nous efforçons de croire en ce moment, est que l'instant après le clic ne soit qu'un mauvais tableau peint dans un mauvais rêve et qu'en réalité nous sommes dans un lit les yeux fermés, la lumière éteinte ; bref ce n'est qu'un cauchemar. Oups, on a juste eu peur pour rien. Mais malheureusement chaque petit grain de sable qui tombe du sablier, chaque tic-tac de l'horloge nous éloigne de cette réalité que nous nous concevons, il nous cale dans ce malheureux tableau, un tableau dont la couleur noire est si pure qu'elle n'a rien à envier aux ténèbres. Souvent l'on dit après la pluie le beau temps mais parfois le beau temps vient avant l'orage et ce qui reste après n'est que destruction.
Avant que la goutte blanche de bonheur n'atterrît dans le lac noir de douleur qu'étais-je ? Que s'est-il passé ? que suis-je devenu ?
Avant le fameux clic, j'étais encore enfant, je vivais dans un petit village situé en altitude, une hauteur à laquelle on admirait pleinement le ciel et ses merveilles. Avec une merveilleuse nature qui nous dorlotait, on était en plus béni par une belle cascade d'eau pure, douce, hyper rafraichissante. Au centre du village se trouvait notre jolie maison accolée à l'atelier de papa. Mon père était un ébéniste, un homme au corps affermi, doté d'une grande force, travailleur, qui s'efforçait d'avoir la perfection dans tous ses œuvres. Malgré qu'il soit le meilleur dans son domaine, d'après lui comme œuvre, la perfection n'est jamais venue à lui mais d'après moi comme femme, il l'a eu. Ma mère était la plus ravissante du village, elle était comme un phénix aux plumages étoilés, jalousée par les autres femmes, elle était extrêmement convoitée par les hommes. Maman était une femme altruiste et était d'un abord affable. C'était une femme qui relevait en tout point d'un fait divin. Elle parvenait toujours à apaiser mon père et moi par ses mots. On n'était une famille euphorique. Le père et la mère s'aimaient énormément. Parlant d'amour, malgré que je n'eusse que huit ans, j'étais attiré par une fille affriolante du nom d'Afi ; âgée de plus que moi de 3 ans, elle était amitieuse et charmante. Malgré que je sois éclopé et bossu, j'étais le garçon le plus épanouie du village mais à coté de ma ravissante Afi, j'étais super timide. J'ai plusieurs fois tenté de faire le premier pas mais je n'y arrivais pas. Lorsque je suis avec elle, j'ai la chair de poule, mes dents claquent ; ce qui m'énervait le plus, c'est quand mon petit cœur se fout de moi et bat la chamade. Sur le coup je frissonnais de peur et j'agissais comme un con. Un jour j'y arriverai, pourquoi pas ? en restant toujours optimiste, c'était ce que je me disais chaque jour quand je me plantais. C'était des moments de joie, de plaisir mais le bonheur ne venant jamais seul c'était le tour du mal de venir toquer à ma porte.
Je me rappelle comme si c'était hier, le jour où tout a chamboulé, c'était un samedi midi. Quelque minute avant le fameux clic, on était tous au village. J'étais avec ma mère au salon. Tout droit dans la cuisine, on entendait la marmite siffloter. Une sauce d'aïoli était au feu, elle embaumait toute la maison. Sans réfléchir on savait déjà qu'elle serait suave car en matière de cuisine ma mère était un cordon-bleu. Mon père lui, était dans l'atelier. Il apportait quelques dernières retouches à des œuvres qu'il devait normalement aller livrer en ville le jour-là mais qu'il a dû reporter. En fait on devait tous aller avec le père et passer quelques semaines de l'autre côté. La simple maudite raison pour laquelle on n'avait pas quitté le village ce matin-là était que, je voulais passer la soirée au village et profiter de la fête des moissons qu'organisaient les villageois. Mon père et ma mère eux, n'étaient pas vraiment trop intéressés par cette fête mais voulant faire ma joie, on était tous resté le jour-là.
Brusquement on entendit des hurlements, des coups de fusils, des cris de peur. Le daron nous ordonna d'aller se cacher et s'est précipité comme un guerrier pour aller voir ce qui se passait. Les femmes, les enfants étaient tous allés se réfugier dans une grosse case derrière le village. C'était la procédure dans ces genres de situation. Effrayé et inquiet, dans la case on l'était tous. Blotti dans les bras de ma maman, je me posais plusieurs questions. Deux semaines avant tout cela, à la dernière assise des grands du village, notre oracle avait prédit qu'un vent sinistre allait s'emparer du village. En réalité personne n'avait prêté attention. L'oracle avait l'habitude de faire des prédictions. Il en avait fait plus d'une centaine portant sur quand la saison pluvieuse allait commencer, sur quand tant allait se produire, mais rien ne respectait ses prédictions. Sincèrement arrivé à un moment, il nous arrivait d'oublier que c'est un oracle. On le prenait pour un griot.
Après avoir attendu plus d'une trentaine de minutes, on vit la porte de la case s'ouvrir. A ma grande surprise, ce n'était pas mon père, ce n'était pas les hommes du village. C'était des hommes très bizarres. Certaines femmes les appelaient par des noms comme si elles les connaissaient. Sans parler, ils se sont mis à nous enchainer, ils ont fait sortir les enfants. Moi à cause de mon handicap, ils m'ont laissé avec les femmes. Afi aussi était restée avec nous. Quelques minutes après, ils sont revenus et se sont mis à violer les femmes, y compris ma mère et Afi. J'étais abasourdi, je ne cernais plus rien. Elles hurlaient, elles se débattaient mais ils étaient d'une grande animalisme, ils les battaient. C'était des êtres sadiques. En battant l'une des femmes, ils l'ont brisé le chyle, elle était à l'agoni mais il continuait à abuser d'elle. Elle était morte dans ses bras mais lui il continuait comme si de rien n'était. Après avoir fini, l'un des hommes d'un air pervers dit : « ce n'est point de l'adultère car vos maris on les a tués, prenez-en du plaisir parce qu'on est là pour un long moment ». Ces dits transperçaient le cœur de ces femmes d'amertume, elles étaient anéanties. J'étais meurtrie, je m'efforçais de me réveiller car pour moi ça ne relevait plus du réel. Leur acte n'était pas humain. Chaque jour du matin au soir ils abusaient de ces femmes. C'était abominable. Voir ma mère, Afi et tous ces autres femmes souffrir ainsi m'était insupportable. C'était trop douloureux. Pour moi rien ne pouvait être pire mais je me trompais. Un jour l'un des hommes a voulu abuser de moi. Ma mère s'est déchainée comme un félin enragé brisant ses os pour se libérer, elle s'agrippa à cet homme et d'un coup de dent sec elle lui arracha la gorge. Avant que l'homme ne succombe il lui donna un coup qui mis fin à sa vie. Sans même un adieu elle s'en est allée. Je venais de boire le calice jusqu'à la lie. Mon monde venait de s'effondre, Je souffrais comme un damné, pourquoi Dieu faisait il abstention. En ce moment j'étais capable de signer un pacte avec le diable juste pour faire souffrir ces hommes. Mon regard était devenu vide. Mon âme brulait de douleur, J'abdiquais avec force mon existence. Sur le coup je m'étais évanoui.
Après avoir passé toute ma vie dans le coma à hurler et à fuir la réalité, je me suis réveillé 70 ans après dans un hôpital. D'après les dits, 2 semaines après m'être évanoui, un assaut a été mené par l'armé qui les cherchait depuis longtemps. Ces hommes barbares étaient des enfants du village, des villageois qui étaient partis à la guerre. A leur retour, étant abêtis par des médicaments qu'ils prenaient pour se fortifier, ils avaient perdu leur humanité.
Malgré tout ce temps, je garde encore espoir qu'un jour je me réveillerai et que toute ce calvaire ne soit qu'un cauchemar