- Excusez moi, c'est bien ici pour les retours-arrières ?
- Oui, Madame. Voici le formulaire. Merci d'indiquer la date-cible de retour-arrière. N'oubliez pas de... [+]
Hercule, héros légendaire, armé de son épée d'acier, protégé par son armure de cuir, s'élançait à l'encontre de l'immonde Hydre aux têtes toujours plus nombreuses. Pourtant il les coupait avec ferveur et bravoure, ces têtes, courant de l'une à l'autre, escaladant la créature, s'approchant sans peur au plus près des dents acérées. Oui, Hercule faisait honneur à la race des vrais héros. Il mettait son cœur à l'ouvrage, et sa tête, et ses muscles, et tout son être. Et pourtant, rien ! L'Hydre semblait immortelle, toujours plus puissante, toujours plus féroce, tandis qu'Hercule malgré son énergie divine sentait s'accumuler sa fatigue humaine. Comment tuer un être qui, chaque fois qu'il meure, renaît démultiplié ? Toutes les stratégies ont échoué : couper toutes les têtes d'une seule attaque, transpercer le cœur en une puissante estocade, faire exploser le corps de l'intérieur, utiliser le feu, la glace, la foudre... Rien n'y fait. Car l'ensemble des organes de l'Hydre se régénèrent et se multiplient aussi, accroissant d'autant la puissance de la créature. Reprenant son souffle quelques minutes caché au fond d'une caverne tout juste accessible à un homme bien bâti, Hercule commençait à désespérer.
Alors Hercule pria. Il pria qu'on lui vienne en aide. Il implora son père Zeus, ainsi que tous les dieux de l'Olympe. Il supplia Hadès lui-même. Mais aucun ne répondit car ces douze travaux devaient prouver au monde des hommes et des dieux que sa composante humaine ne le rendait pas faible. Derrière lui grondait encore et encore l'Hydre, grattant de ses griffes empoisonnées l'entrée de la caverne.
Alors Hercule pria encore. Il pria les dieux monothéistes, polythéistes, ainsi que toutes les idoles qu'il savait exister, qu'elles aient la forme d'animaux, de végétaux, de pierres,... Il pria le vent, la terre, la foudre, le feu. Mais aucun ne répondit, car ce panthéon éclectique ne voyait pas d'un très bon œil d'être rangé dans le même panier de charité. Et puis c'était l'occasion de remettre l'Olympe à sa place, et de profiter au passage d'un bon spectacle.
Alors Hercule pria encore et encore. Il pria pour tout ce qu'il ne comprenait pas en ce monde : la déformation du métal chez le forgeron, la croissance du blé chez le paysan, la naissance des agneaux chez l'éleveur, l'extraction des pierres précieuses chez le mineur, la construction de monuments chez le maçon,... Les dieux l'abandonnant, il pria pour sa partie humaine. Et miracle ! Sa partie humaine répondit !
"Tout n'est question que de relativité, mon cher Hercule." dit une voix aigue et hésitante d'un coin sombre de la caverne. Une silhouette se dessina et se coloria peu à peu. Un petit vieillard dégarni à la moustache grise.
"Je me présente, Albert Einstein. Comme tu peux le voir, je ne suis pas vraiment d'ici. Mais ta prière fut tellement puissante qu'elle a traversé les âges, et il a semblé que j'étais le mieux placé pour t'aider car même les créatures divines sont soumises aux lois de la physique quantique."
Attrapant un morceau de pierre, Albert commença à dessiner l'Hydre sur l'une des parois de la grotte, et entama sa démonstration.
Vois-tu, la solution réside dans les lois de la logique. L'Hydre est soumise à la loi suivante : "Si un organe de l'Hydre passer de la valeur 1 à la valeur 0, alors la valeur de l'organe passe à 2.". La logique nous conseille donc, mon cher Hercule, de ne faire passer aucun organe à 0. Il te suffit de les taillader en petits morceaux jusqu'à ce que leur valeur tombe, disons, à 0.1. Blesser sans tuer, voilà la voie de la logique.
J'entends la vérité dans ta voix, répondit l'humble Hercule, mais que faire ensuite. Pour terminer mes douze travaux, je n'ai d'autres choix que de la tuer.
Dans ce cas, mon cher Hercule, transforme l'Hydre en chat de Schrödinger. Enferme-la blessée dans cette caverne et bloques-en définitivement l'entrée. Ainsi, tant que personne ne regarde dedans, l'Hydre sera à la fois morte et vivante, à iso-probabilité. Tu réalises ainsi ton défi en l'ayant tué, bien que dans le même temps tu ne l'aies pas tué, à iso-probabilité. Tuer sans tuer, voilà la voie de la probabilité."
A ces mots, Albert Einstein disparut en un nuage de poussière. Hercule se releva, dégaina, et parcourut d'un pas fier et sûr de lui la distance le séparant de l'entrée. Tout se déroula parfaitement, laissant le courageux Hercule s'atteler à d'autres quêtes. Personne jusqu'à nos jours n'osa jamais vérifier si l'Hydre dans sa boite était vivante ou morte, chacun se satisfaisant de cette demi-mort infligée par un demi-dieu. Jusqu'à nos jours...
Alors Hercule pria. Il pria qu'on lui vienne en aide. Il implora son père Zeus, ainsi que tous les dieux de l'Olympe. Il supplia Hadès lui-même. Mais aucun ne répondit car ces douze travaux devaient prouver au monde des hommes et des dieux que sa composante humaine ne le rendait pas faible. Derrière lui grondait encore et encore l'Hydre, grattant de ses griffes empoisonnées l'entrée de la caverne.
Alors Hercule pria encore. Il pria les dieux monothéistes, polythéistes, ainsi que toutes les idoles qu'il savait exister, qu'elles aient la forme d'animaux, de végétaux, de pierres,... Il pria le vent, la terre, la foudre, le feu. Mais aucun ne répondit, car ce panthéon éclectique ne voyait pas d'un très bon œil d'être rangé dans le même panier de charité. Et puis c'était l'occasion de remettre l'Olympe à sa place, et de profiter au passage d'un bon spectacle.
Alors Hercule pria encore et encore. Il pria pour tout ce qu'il ne comprenait pas en ce monde : la déformation du métal chez le forgeron, la croissance du blé chez le paysan, la naissance des agneaux chez l'éleveur, l'extraction des pierres précieuses chez le mineur, la construction de monuments chez le maçon,... Les dieux l'abandonnant, il pria pour sa partie humaine. Et miracle ! Sa partie humaine répondit !
"Tout n'est question que de relativité, mon cher Hercule." dit une voix aigue et hésitante d'un coin sombre de la caverne. Une silhouette se dessina et se coloria peu à peu. Un petit vieillard dégarni à la moustache grise.
"Je me présente, Albert Einstein. Comme tu peux le voir, je ne suis pas vraiment d'ici. Mais ta prière fut tellement puissante qu'elle a traversé les âges, et il a semblé que j'étais le mieux placé pour t'aider car même les créatures divines sont soumises aux lois de la physique quantique."
Attrapant un morceau de pierre, Albert commença à dessiner l'Hydre sur l'une des parois de la grotte, et entama sa démonstration.
Vois-tu, la solution réside dans les lois de la logique. L'Hydre est soumise à la loi suivante : "Si un organe de l'Hydre passer de la valeur 1 à la valeur 0, alors la valeur de l'organe passe à 2.". La logique nous conseille donc, mon cher Hercule, de ne faire passer aucun organe à 0. Il te suffit de les taillader en petits morceaux jusqu'à ce que leur valeur tombe, disons, à 0.1. Blesser sans tuer, voilà la voie de la logique.
J'entends la vérité dans ta voix, répondit l'humble Hercule, mais que faire ensuite. Pour terminer mes douze travaux, je n'ai d'autres choix que de la tuer.
Dans ce cas, mon cher Hercule, transforme l'Hydre en chat de Schrödinger. Enferme-la blessée dans cette caverne et bloques-en définitivement l'entrée. Ainsi, tant que personne ne regarde dedans, l'Hydre sera à la fois morte et vivante, à iso-probabilité. Tu réalises ainsi ton défi en l'ayant tué, bien que dans le même temps tu ne l'aies pas tué, à iso-probabilité. Tuer sans tuer, voilà la voie de la probabilité."
A ces mots, Albert Einstein disparut en un nuage de poussière. Hercule se releva, dégaina, et parcourut d'un pas fier et sûr de lui la distance le séparant de l'entrée. Tout se déroula parfaitement, laissant le courageux Hercule s'atteler à d'autres quêtes. Personne jusqu'à nos jours n'osa jamais vérifier si l'Hydre dans sa boite était vivante ou morte, chacun se satisfaisant de cette demi-mort infligée par un demi-dieu. Jusqu'à nos jours...
http://short-edition.com/oeuvre/tres-tres-court/histoire-a-l-eau-de-rose
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