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Juste avant
Un bruit de sabots, un hennissement de cheval, assis sur les bords de la Seine à l'ombre de ce peuplier d'Italie, les yeux de Patrick ressemblaient à deux soucoupes volantes prêtes à décoller.
Il s'était assoupi quelques minutes sur les berges du fleuve romantique et voilà que passait à sa hauteur un fiacre bruyant conduit par un hurluberlu en costume amidonné sous un haut de forme poussiéreux.
L'homme aux généreuses bacchantes lui lança un regard amusé et poursuivit sa route sans se retourner.
Un peu perplexe, il aperçut soudain un bateau-mouche avec à son bord de nombreuses personnes en habits d'époque, les hommes en costumes sombres et les femmes ombrelles à la main, qui peinaient sous d'interminables robes de taffetas.
Il pensa tout de suite au tournage d'un film historique et voulut immortaliser ces instants à l'aide de son téléphone portable.
Celui-ci était toujours dans la poche arrière de son jean, mais là impossible de lui mettre la main dessus, pourtant il en était sûr, juste avant de s'assoupir il avait envoyé un s.m.s. à son agent pour connaître les dates de sa nouvelle tournée.
Trop occupé à chercher son Iphone dernier cri, il n'avait pas remarqué l'ambiance étrange qui régnait tout autour de lui, tous les Parisiens habillés à l'époque ancienne et surtout fait étrange, personne ne semblait le reconnaître.
Il chercha du regard une quelconque caméra ou le minois d'un réalisateur connu, mais rien de tout cela à l'horizon, juste des gens qui passaient en le dévisageant d'un œil oblique et interrogateur.
Il voulut récupérer sa voiture, une mini-Austin qu'il avait garée quelques rues plus loin, mais celle-ci avait disparu.
C'est à cet instant précis que Patrick se rendit compte que Paris grouillait de figurants plus vrais que nature, il s'approcha de cette jeune femme qui traînait derrière elle un titi pleurnichard et lui demanda dans un sourire charmeur si elle le reconnaissait.
A l'expression de son regard étonné et de son visage légèrement crispé, il comprit tout de suite que non seulement elle ne le reconnaissait pas mais que de surcroît elle le dévisageait avec beaucoup de stupeur.
Pour lui rafraîchir la mémoire, Patrick empoigna sa guitare et se mit à lui fredonner un de ses airs les plus connus......
« On s'était dit rendez-vous dans dix ans, même jour même heure même pomme.... »
Elle continuait à le dévisager avec un étonnement non dissimulé pendant que les pleurs du gamin redoublaient d'intensité.
Un peu déstabilisé, Patrick se dirigea vers le pont des arts où il venait d'apercevoir un couple occupé à regarder les remous de la Seine.
D'un pas rapide il les rejoint et passa devant eux pour voir leurs réactions, et justement aucune manifestation de leurs parts, leurs visages restaient impassibles et ils semblaient beaucoup plus passionnés par les tourbillons de l'eau que par la présence du chanteur.
Au loin se dressaient dans la brume épaisse du ciel, les deux tours de la cathédrale Notre- Dame De Paris, un point de repère dans ce paysage un peu surréaliste dans lequel Patrick déambulait totalement désorienté.
C'était quoi ce délire, une caméra cachée, une blague de son agent, ou tout simplement un mauvais cauchemar où il venait de glisser malencontreusement.
Heureusement, il lui restait sa guitare comme un bouclier protecteur et ses chansons qu'il fredonnait dans sa tête pour se rassurer sur son identité.
Il continua de déambuler sur les berges de la Seine où il était devenu complètement anonyme en répétant dans sa tête les paroles d'une de ses chansons au titre prémonitoire: Je suis dans la dèche « Sur le boulevard d'un pas rapide, les gens passent indifférents, et moi je vais la tête vide »......
Tout en marchant Patrick venait d'atteindre le Pont Notre Dame et ses arcades vertes qui enjambent le fleuve capricieux, il ne pouvait se résoudre à croire que tout le monde l'avait oublié, ce contact avec le public il en avait besoin, c'était son oxygène et sa raison de vivre.
Un peu désemparé il se laissa tomber sur une berge froide et humide et entama d'une voix nostalgique, « Casser la voix » un titre phare de son répertoire, juste pour se persuader que tout cela avait bien existé.
Si ce soir j'ai pas envie d' rentrer tout seul
Si ce soir j'ai pas envie d' rentrer chez moi
Si ce soir j'ai pas envie d' fermer ma gueule
Si ce soir j'ai envie d' me casser la voix
Casser la voix,
Casser la voix
Casser la voix,
Casser la voix
Patrick hurlait de toutes ses forces pour chasser l'envie de pleurer qui montait en lui, sa voix se brisait en mille éclats sur les flots de la Seine, il ne pouvait se résoudre à ne plus entendre les ovations de son public et cet amour immense qui éclabousse tout autour.
Il regarda vers le lointain et aperçut la vieille dame de fer qui perçait la brume rose du soir, son cœur se serra un peu plus, les notes de sa guitare s'envolaient vers d'autres horizons.
Il avait mis tellement de temps, de rage, de conviction et d'envie pour arriver tout en haut de cet escalier en colimaçon, c'est sûr il ne lâcherait pas cette rampe vertigineuse quoi qu'il arrive.
La guitare entama quelques notes et les paroles suivirent naturellement, comme une évidence, « Tout change si vite. »
Le jour se lève sur nos illusions
Un drôle de rêve, où est ma raison?
Tout change si vite
Dis moi pourquoi , je tourne comme çà
autour de tout, autour de moi?
Tout change si vite .
C'était exactement cela, tout change si vite, passer de la gloire à l'anonymat était une expérience très douloureuse à laquelle Patrick n'était pas du tout préparé.
Il se remit à marcher le long de la Seine, d'un pas mal assuré, ne sachant où aller, ni vers qui se tourner, une brume épaisse s'était formée, elle ressemblait à un mur immense qui se dresse infranchissable.
Il se mit à chanter les paroles d'une chanson qui lui trottait dans la tête « Combien de Murs ».
"Les murs qu'on a dans la tête
Sont plus hauts que vos peut-être.
Pourquoi personne les arrête... jamais !
Bien sûr qu'on va les casser,
Mais on n'effacera jamais
Les maux qu'ils auront laissés... gravés !"
Soudain Patrick entendit des applaudissements, à travers la brume épaisse il aperçut d'abord des yeux très clairs qui l'observaient, puis un blouson de cuir noir, une main tendue vers lui avec générosité lui montrait le chemin à suivre pour sortir de ce labyrinthe.
- Moi je m'appelle Jean-Philippe Smet, je serai bientôt plus connu sous le nom de Johnny Hallyday et toi tu vas croiser ma route, surtout ne te retourne pas, regarde droit devant, je te promets une grande carrière, peut-être avec le temps à la force d'y croire, on peut juste essayer pour voir....
Il s'était assoupi quelques minutes sur les berges du fleuve romantique et voilà que passait à sa hauteur un fiacre bruyant conduit par un hurluberlu en costume amidonné sous un haut de forme poussiéreux.
L'homme aux généreuses bacchantes lui lança un regard amusé et poursuivit sa route sans se retourner.
Un peu perplexe, il aperçut soudain un bateau-mouche avec à son bord de nombreuses personnes en habits d'époque, les hommes en costumes sombres et les femmes ombrelles à la main, qui peinaient sous d'interminables robes de taffetas.
Il pensa tout de suite au tournage d'un film historique et voulut immortaliser ces instants à l'aide de son téléphone portable.
Celui-ci était toujours dans la poche arrière de son jean, mais là impossible de lui mettre la main dessus, pourtant il en était sûr, juste avant de s'assoupir il avait envoyé un s.m.s. à son agent pour connaître les dates de sa nouvelle tournée.
Trop occupé à chercher son Iphone dernier cri, il n'avait pas remarqué l'ambiance étrange qui régnait tout autour de lui, tous les Parisiens habillés à l'époque ancienne et surtout fait étrange, personne ne semblait le reconnaître.
Il chercha du regard une quelconque caméra ou le minois d'un réalisateur connu, mais rien de tout cela à l'horizon, juste des gens qui passaient en le dévisageant d'un œil oblique et interrogateur.
Il voulut récupérer sa voiture, une mini-Austin qu'il avait garée quelques rues plus loin, mais celle-ci avait disparu.
C'est à cet instant précis que Patrick se rendit compte que Paris grouillait de figurants plus vrais que nature, il s'approcha de cette jeune femme qui traînait derrière elle un titi pleurnichard et lui demanda dans un sourire charmeur si elle le reconnaissait.
A l'expression de son regard étonné et de son visage légèrement crispé, il comprit tout de suite que non seulement elle ne le reconnaissait pas mais que de surcroît elle le dévisageait avec beaucoup de stupeur.
Pour lui rafraîchir la mémoire, Patrick empoigna sa guitare et se mit à lui fredonner un de ses airs les plus connus......
« On s'était dit rendez-vous dans dix ans, même jour même heure même pomme.... »
Elle continuait à le dévisager avec un étonnement non dissimulé pendant que les pleurs du gamin redoublaient d'intensité.
Un peu déstabilisé, Patrick se dirigea vers le pont des arts où il venait d'apercevoir un couple occupé à regarder les remous de la Seine.
D'un pas rapide il les rejoint et passa devant eux pour voir leurs réactions, et justement aucune manifestation de leurs parts, leurs visages restaient impassibles et ils semblaient beaucoup plus passionnés par les tourbillons de l'eau que par la présence du chanteur.
Au loin se dressaient dans la brume épaisse du ciel, les deux tours de la cathédrale Notre- Dame De Paris, un point de repère dans ce paysage un peu surréaliste dans lequel Patrick déambulait totalement désorienté.
C'était quoi ce délire, une caméra cachée, une blague de son agent, ou tout simplement un mauvais cauchemar où il venait de glisser malencontreusement.
Heureusement, il lui restait sa guitare comme un bouclier protecteur et ses chansons qu'il fredonnait dans sa tête pour se rassurer sur son identité.
Il continua de déambuler sur les berges de la Seine où il était devenu complètement anonyme en répétant dans sa tête les paroles d'une de ses chansons au titre prémonitoire: Je suis dans la dèche « Sur le boulevard d'un pas rapide, les gens passent indifférents, et moi je vais la tête vide »......
Tout en marchant Patrick venait d'atteindre le Pont Notre Dame et ses arcades vertes qui enjambent le fleuve capricieux, il ne pouvait se résoudre à croire que tout le monde l'avait oublié, ce contact avec le public il en avait besoin, c'était son oxygène et sa raison de vivre.
Un peu désemparé il se laissa tomber sur une berge froide et humide et entama d'une voix nostalgique, « Casser la voix » un titre phare de son répertoire, juste pour se persuader que tout cela avait bien existé.
Si ce soir j'ai pas envie d' rentrer tout seul
Si ce soir j'ai pas envie d' rentrer chez moi
Si ce soir j'ai pas envie d' fermer ma gueule
Si ce soir j'ai envie d' me casser la voix
Casser la voix,
Casser la voix
Casser la voix,
Casser la voix
Patrick hurlait de toutes ses forces pour chasser l'envie de pleurer qui montait en lui, sa voix se brisait en mille éclats sur les flots de la Seine, il ne pouvait se résoudre à ne plus entendre les ovations de son public et cet amour immense qui éclabousse tout autour.
Il regarda vers le lointain et aperçut la vieille dame de fer qui perçait la brume rose du soir, son cœur se serra un peu plus, les notes de sa guitare s'envolaient vers d'autres horizons.
Il avait mis tellement de temps, de rage, de conviction et d'envie pour arriver tout en haut de cet escalier en colimaçon, c'est sûr il ne lâcherait pas cette rampe vertigineuse quoi qu'il arrive.
La guitare entama quelques notes et les paroles suivirent naturellement, comme une évidence, « Tout change si vite. »
Le jour se lève sur nos illusions
Un drôle de rêve, où est ma raison?
Tout change si vite
Dis moi pourquoi , je tourne comme çà
autour de tout, autour de moi?
Tout change si vite .
C'était exactement cela, tout change si vite, passer de la gloire à l'anonymat était une expérience très douloureuse à laquelle Patrick n'était pas du tout préparé.
Il se remit à marcher le long de la Seine, d'un pas mal assuré, ne sachant où aller, ni vers qui se tourner, une brume épaisse s'était formée, elle ressemblait à un mur immense qui se dresse infranchissable.
Il se mit à chanter les paroles d'une chanson qui lui trottait dans la tête « Combien de Murs ».
"Les murs qu'on a dans la tête
Sont plus hauts que vos peut-être.
Pourquoi personne les arrête... jamais !
Bien sûr qu'on va les casser,
Mais on n'effacera jamais
Les maux qu'ils auront laissés... gravés !"
Soudain Patrick entendit des applaudissements, à travers la brume épaisse il aperçut d'abord des yeux très clairs qui l'observaient, puis un blouson de cuir noir, une main tendue vers lui avec générosité lui montrait le chemin à suivre pour sortir de ce labyrinthe.
- Moi je m'appelle Jean-Philippe Smet, je serai bientôt plus connu sous le nom de Johnny Hallyday et toi tu vas croiser ma route, surtout ne te retourne pas, regarde droit devant, je te promets une grande carrière, peut-être avec le temps à la force d'y croire, on peut juste essayer pour voir....
Un petit mot pour l'auteur ?
Bienséance et bienveillance pour mot d'encouragement, avis avisé, ou critique fine. Lisez la charte !66 commentaires
Il y a, dans cette finale, des textes de moins bonne qualité, mais le système de votes est ce qu'il est et cela fait partie du jeu... Ce système est un bon système parce qu'il récompense les gens qui votent et font des commentaires sur les textes mais il a aussi un effet pervers : il ne reflète pas réellement les goûts du public.
Je vous invite donc à venir prolonger le plaisir en participant à la "sélection du public" du Festival Off, sur le forum : http://short-edition.com/fr/forum/la-fabrique/imaginarius-2017-le-festival-off
Que la fête continue et longue vie au prix Imaginarius !
Je suis aussi en compétition :
http://short-edition.com/fr/oeuvre/tres-tres-court/ainsi-soit-il-2
Apprécierez vous "Un scoop" dans une tout autre atmosphère ?