J’aimerais tant...

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Tout cet inconfort quotidien m’enivre les sens. Amères désolations. Souffrance. Rejet. Gémissements de peines sans fins. J’essaie de fuir un passé ténébreux qui prédomine mon existence. Un passé qui continue sans cesse de meurtrir mon être malgré les luttes que je mène pour l’oublier. Aujourd’hui encore, j'aimerais tant que je ne me souvienne plus du timbre de cette voix résonnant encore à mes oreilles, afin d'apporter à mon âme un pardon, un répit. Les séquelles de mon passé me hantent. L’apogée de mes souffrances heurte ma chair journalièrement et m’afflige de bien nouvelles cicatrices. J’ai finis par m’habituer petit à petit à ces mauvais moments, à ces faux sourires, à ces non-dits. Au final, tous ces souvenirs gravés en moi déconstruisent à petit feu mon être. Mon histoire n'a pas eu de commencement pourrais-je vraiment y mettre fin? Pourtant, elle a juste pris chair sur la route en rentrant du collège en début de soirée. Aujourd'hui n'est plus pareil, si différent des autres jours mais pourtant plus douloureux qu'avant. Ce fût ce jour que j'ai cru perdre ce que je pouvais avoir de plus cher pour certains et pour d'autres, il ne représentait qu’une simple perte de sang. Le jour où j’ai perdu toute ma joie de vivre pour embrasser un fossé de mal-être.

J'étais la fille unique de ma défunte mère partie trop tôt. Elle avait péri lors d'un accident de la route ainsi que mon beau-père avec lequel elle s’était mariée trois ans plus tôt. Après ce terrible accident, étant donné que mon père faisait profil bas dans ma vie, j'étais allée vivre chez ma tante ainsi que mon demi-frère Paul. Un malheur ne venait jamais seul, et ce fût ce jour qu’a débuté mon enfer. J'ai cessé de faire confiance depuis. Plus rien n'avait de l'importance à mes yeux. Plus rien ne réussissait à me redonner cette joie de vivre qui émanait de moi avant la mort de ma mère. Au final, plus rien n'était pareil. Néanmoins, beaucoup de questions hantaient mon esprit. Et, ce que je n’arrivais pas à saisir, m’observait-il avant de passer à l’acte ? M’épiait-il chaque soir? Je ne saurai jamais les réponses à ces questions. À présent, je m’en veux d’être rester tard à l'école ce jour-là. Je voulais toujours être la meilleure dans tout ce que j'entreprenais afin que mes choix futurs ne soient pas restreints. Je ne voulais pas être nulle dans un domaine et que cela me fasse perdre une opportunité de carrière. Je regrette encore d’avoir pris ce chemin que j'empruntais chaque jour pour rentrer. Il était sombre certes mais accessible et facile.

Tout semblait se passer rapidement pourtant chaque seconde était plus longue que la précédente. Je marchais rapidement car je pensais apercevoir une ombre derrière moi grâce au lampadaire situé non loin de moi. Je changeai quelques minutes plus tard de comportement car je m’étais dit que j’avais seulement peur et que mon cerveau me jouait simplement des tours. Quand, brusquement quelqu'un m'avait surpris tout près de chez moi. Je n'avais pas eu le temps de prendre mes jambes à mon cou qu’une main m'agrippa sauvagement la nuque. Je me débattais, mais sans succès. Il était plus fort et plus robuste. Il me fit face. Étonnée, de voir le visage de celui qui me faisait tant souffrir, je perdis l’usage de la parole. Je me débattais toujours, il me faisait mal. Je hurlais mais aucun son ne sortit. Avec rage, il me poussa au sol. Je tombai avec fracas. Je ne sentis plus mes membres. Je voulais fuir. Je n'arrêtais pas de me dire que tout ceci n'était qu'un mauvais rêve. Je me trouvais pourtant là, gisant dans mon sang. Des égratignures, des blessures, des ecchymoses parsemaient mon corps. Mon âme voilée et mon corps inerte essayaient tant bien que mal d’échapper au brouhaha de mes pensées assassines. Dos écorché par le bitume fraîchement posé à l’entrée, membres moites, j'étais fatiguée de lutter. Fatiguée d’avoir lamentablement échouée. Je crachais beaucoup de sang. Je ne pouvais percevoir aucune saveur. Sa main faisait pression sous ma gorge, il m'étouffait. Je suffoquais. À un moment donné, je pensais qu'il allait me tuer. Je pleurais, je lui suppliais d'arrêter mais il prit plaisir dans ma souffrance. J'avais mal, extrêmement mal. Mes sens se sont déconnectés de mon être. Je ne luttais plus. Je n’en pouvais plus.

Avec un sourire moqueur au coin des lèvres, il n’hésita pas à abuser de moi sans retenue. Je lui suppliais encore d’arrêter. Il était là , me maîtrisant au sol comme un chien. Tout ça devenait insupportable et à chaque fois il me serra plus fort contre terre afin que je ne puisse m’échapper. J’étais dans une sorte de coma apparent ne pouvant plus réagir. Il avait gagné. Je restais allongée sur ce sol à contempler les étoiles en espérant qu’il finisse un jour. Je me sentis comme une droguée, et ne pouvant plus supporter ce choc, je m’étais évanouie. Mon corps ne s’était pas habitué aux coups qui m’étaient destiné. Mon crâne lui, ne pouvait plus supporter cette céphalée. Quelques minutes plus tard, je pouvais à peine entrouvrir mes yeux. Tout me semblait flou pourtant mon subconscient était en train de me peindre chaque parcelle de ce moment qui allait ronger continuellement jusqu’à la fin, mon existence. Retrouvée par un voisin tout près de l'entrée qui a accouru avertir ma tantede mon état. Il m'avait laissé pour morte. Ma chère tante n'a jamais su digérer ce qui m’était arrivée. Elle s'est voulue toute sa vie et je parie que c'est à cause de cet incident qu'elle nous a quitté plus tôt. Elle n'a manifesté aucun signe de maladie mais elle est morte subitement.

Ce fardeau amer de mon passé constitue le centre de mes cauchemars, qui jusqu’à nos jours me persécute la vie. Je voulais tout expliquer mais je ne pouvais le faire. Je voulais partager ma peine mais, me sentirais-je mieux après? Ne serait-ce pas pour moi un affront, de dire à tous que j'ai été sauvagement violé et perdu ma virginité́ par mon demi-frère un soir sur ce sol froid au coin de la rue tout près de l'entrée ? Il était ma famille peut m’importait les liens du sang, il en faisait parti. Il devait me protéger après la mort de nos parents mais il a abusé de moi ouvertement. Maintes fois j’ai voulu me suicider, finir ce cauchemar car je n’en pouvais plus. Mais, je n’avais point la force nécessaire. J'étais dépressive et anxieuse. J'avais peur surtout des hommes. Cette fille joyeuse au sourire rayonnant avait disparue. Devrais-je dire aussi à quelqu’un que je suis aussi tombée enceinte de mon demi-frère et failli mourir à cause d'un avortement planifié à la va-vite par ce dernier? Pourrait-on comprendre que depuis ce jour, je suis devenue muette et que l'envie de parler m'effrayait beaucoup plus que ces cauchemars? Les gens pourront-ils comprendre que l'envie de commettre un meurtre m'agace les sens? Allaient-ils avoir la même considération à mon égard quand ils sauront ce que je suis en train de vivre réellement chaque jour ?
Enfin, malgré les nombreux coups bas de la vie, je me dis que demain tout ira mieux. Je me devais d’être forte pour les affronter mais au final, j’ai sombré. Certains jours, vivre me parait difficile. Et, je porte encore ces cicatrices qui me font toujours mal. Pour des raisons qui encore me dépassent, je danse toujours à fond sur la musique de mes déboires et de mes peines. Et, chaque nuit, à la même heure je revis cette scène et je me demande si un jour, j'aurai la force de tout oublier et de recommencer.