— Tu vois, je l’ai regardé en face et je lui ai dit que son fichier, c’était de la merde, sans hésiter. De la merde non pas qu’il n’était pas bon, au contraire il était plutôt bien... [+]
Fenêtre sur cour
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Finaliste
Jury
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Cela fait maintenant plus d’un an que Frédo habite cette petite chambre dénuée de tout confort sur les hauteurs de Marseille.
Bien sûr ce n’est pas un palace mais il a connu bien pire pour dormir, entre les abris de bus ou les bouches de métros et sans parler des quais de gares où règne la lame du froid qui pique et les regards obliques des passants.
De la fenêtre de sa chambre, à travers les branches d’un gros platane centenaire il peut apercevoir les toits de briques rouges qui se détachent sous le ciel bleu de Marseille.
Et puis il s’est fait une grande amie dans cette douloureuse solitude, oui elle vient lui rendre visite tous les jours sur le toit, juste en face de sa fenêtre.
Une jolie mouette blanche qui pour le prévenir de son arrivée pousse des cris stridents comme le ferait une amoureuse.
L’unique fenêtre de sa chambre donne sur une immense cour bétonnée dans laquelle les voisins peuvent assister un peu éberlués à un étrange préambule entre cet original et sa mouette bavarde qu’il a baptisée affectueusement Bertha.
Ici tout le monde se connaît, alors forcément quand Frédo roucoule avec sa belle il entend résonner dans l’immense cour les petites remarques tendres ou ironiques de ses voisins.
— Alors Frédo c’est pour quand le mariage...
— Tu me mettras parrain de ta première couvée...
— Pour la sortie de l’église j’ai préparé un sac de graines...
Souvent il sourit aux blagues potaches de ses voisins, il sait bien que ce n’est pas de la méchanceté mais il y a certains jours ou cela devient un peu lourd à porter.
Il aimerait bien que Bertha soit un peu moins bruyante quand elle vient lui rendre visite, mais après tout ce n’est qu’une mouette rieuse et celle-ci est réputée pour être très bruyante.
Et aujourd’hui c’est encore pire que d’habitude parce qu'elle vient d’apercevoir les restes d’une tarte aux pommes posés sur le rebord de la fenêtre et c’est son péché mignon.
Elle traverse la cour d’un battement d’ailes très aérien, se pose sur le rebord de la fenêtre et avec grâce engloutit les miettes du gâteau en poussant des cris stridents qui viennent s’écraser contre les murs épais de l’immense cour.
Bertha a toujours refusé de pénétrer à l’intérieur de la petite chambre, pourtant Frédo a tout essayé pour la convaincre, il a posé bien en évidence des restes très appétissants que sa protégée a snobés avec obstination.
Mais aujourd’hui Frédo a le visage fermé, une ride profonde barre son front et sa bouche ressemble à une vieille cigarette mal roulée.
Il attend un courrier important, une lettre qui devrait changer le cours de sa vie enfin il l’espère...
Et ce pli, il est là entre ses grandes mains cabossées, il tourne et retourne l’enveloppe blanche avec fébrilité, son cœur fatigué cogne aux parois de sa poitrine.
Lui qui n’a jamais été croyant de toute sa vie se met à prier silencieusement sans lâcher du regard ce courrier qui est devenu tout à coup le centre du monde.
***
Après moult hésitations, il se décide enfin et déchire maladroitement la précieuse enveloppe.
A l’intérieur une belle page blanche dactylographiée lui signifie que son contrat de réinsertion en tant que plombier a bien été accepté pour une durée de six mois au bout desquels il pourra, si tout se passe bien obtenir un contrat à durée indéterminée.
Sur l’enveloppe déchirée posée sur la table, on peut lire :
Mr Frédéric MARTEL
Prison des Beaumettes
Ecrou 29-22
Marseille (Bouches du Rhône).
Les yeux embués Frédo cherche du regard son amie Bertha mais celle-ci n’est plus sur le rebord de la fenêtre.
Soudain, derrière lui, il entend un léger froissement d’ailes...
Pour la première fois depuis trois longues années, Bertha est là, immobile et majestueuse elle l'observe, posée sur le rebord de son lit...
Bien sûr ce n’est pas un palace mais il a connu bien pire pour dormir, entre les abris de bus ou les bouches de métros et sans parler des quais de gares où règne la lame du froid qui pique et les regards obliques des passants.
De la fenêtre de sa chambre, à travers les branches d’un gros platane centenaire il peut apercevoir les toits de briques rouges qui se détachent sous le ciel bleu de Marseille.
Et puis il s’est fait une grande amie dans cette douloureuse solitude, oui elle vient lui rendre visite tous les jours sur le toit, juste en face de sa fenêtre.
Une jolie mouette blanche qui pour le prévenir de son arrivée pousse des cris stridents comme le ferait une amoureuse.
L’unique fenêtre de sa chambre donne sur une immense cour bétonnée dans laquelle les voisins peuvent assister un peu éberlués à un étrange préambule entre cet original et sa mouette bavarde qu’il a baptisée affectueusement Bertha.
Ici tout le monde se connaît, alors forcément quand Frédo roucoule avec sa belle il entend résonner dans l’immense cour les petites remarques tendres ou ironiques de ses voisins.
— Alors Frédo c’est pour quand le mariage...
— Tu me mettras parrain de ta première couvée...
— Pour la sortie de l’église j’ai préparé un sac de graines...
Souvent il sourit aux blagues potaches de ses voisins, il sait bien que ce n’est pas de la méchanceté mais il y a certains jours ou cela devient un peu lourd à porter.
Il aimerait bien que Bertha soit un peu moins bruyante quand elle vient lui rendre visite, mais après tout ce n’est qu’une mouette rieuse et celle-ci est réputée pour être très bruyante.
Et aujourd’hui c’est encore pire que d’habitude parce qu'elle vient d’apercevoir les restes d’une tarte aux pommes posés sur le rebord de la fenêtre et c’est son péché mignon.
Elle traverse la cour d’un battement d’ailes très aérien, se pose sur le rebord de la fenêtre et avec grâce engloutit les miettes du gâteau en poussant des cris stridents qui viennent s’écraser contre les murs épais de l’immense cour.
Bertha a toujours refusé de pénétrer à l’intérieur de la petite chambre, pourtant Frédo a tout essayé pour la convaincre, il a posé bien en évidence des restes très appétissants que sa protégée a snobés avec obstination.
Mais aujourd’hui Frédo a le visage fermé, une ride profonde barre son front et sa bouche ressemble à une vieille cigarette mal roulée.
Il attend un courrier important, une lettre qui devrait changer le cours de sa vie enfin il l’espère...
Et ce pli, il est là entre ses grandes mains cabossées, il tourne et retourne l’enveloppe blanche avec fébrilité, son cœur fatigué cogne aux parois de sa poitrine.
Lui qui n’a jamais été croyant de toute sa vie se met à prier silencieusement sans lâcher du regard ce courrier qui est devenu tout à coup le centre du monde.
***
Après moult hésitations, il se décide enfin et déchire maladroitement la précieuse enveloppe.
A l’intérieur une belle page blanche dactylographiée lui signifie que son contrat de réinsertion en tant que plombier a bien été accepté pour une durée de six mois au bout desquels il pourra, si tout se passe bien obtenir un contrat à durée indéterminée.
Sur l’enveloppe déchirée posée sur la table, on peut lire :
Mr Frédéric MARTEL
Prison des Beaumettes
Ecrou 29-22
Marseille (Bouches du Rhône).
Les yeux embués Frédo cherche du regard son amie Bertha mais celle-ci n’est plus sur le rebord de la fenêtre.
Soudain, derrière lui, il entend un léger froissement d’ailes...
Pour la première fois depuis trois longues années, Bertha est là, immobile et majestueuse elle l'observe, posée sur le rebord de son lit...
Je profite de mon passage pour vous inviter à soutenir mon "Papy Rolling Stones" dans la dernière ligne droite du Prix d'été : https://short-edition.com/fr/oeuvre/nouvelles/papy-rolling-stones
Très belle histoire, racontée avec beaucoup de tact et d'émotion.
Amicalement. GG.
Merci et bravo pour ce texte, Djany !
Dans un autre contexte, mon très très court "Gu'Air de Sang" est actuellement en finale du Prix Court et Noir ! Si tu le souhaites, n'hésite pas à aller le lire et le commenter, j'en serai ravi :)
https://short-edition.com/fr/oeuvre/tres-tres-court/gu-air-de-sang
Je vous invite à lire mon haïku d'automne .... Merci !
Un bien joli conte...
Si le cœur vous en dit, peut-être aimeriez-vous découvrir "Le crime parfait", en lice pour le prix Court et Noir?
Dans une chambre coquette
Une fenêtre sur cour pour horizon
Une télévision pour toute distraction.
♫ Il met du vieux pain sur son balcon
Pour attirer les moineaux les pigeons ♫
Il vit sa vie par procuration
Derrière les barreaux d’une prison.
Il s’évade en regardant le ciel, une mouette, visiteuse occasionnelle égaie ses journées, lui tient compagnie, le distrait dans son ennui. Il l’attire de mille appâts gourmands mais la mouette rieuse fait la moue, c’est une mouette capricieuse qui n’en fait qu’à sa tête.
Si la belle a le cri strident, elle a l’œil perçant et l’odorat fin et délicat. Aujourd’hui la cellule de Frédo embaume la tarte aux pommes, Bertha engloutit aussitôt les miettes du gâteau.
Comme un bonheur ne vient jamais seul, le même jour il reçoit une bonne nouvelle de l'Administration et hérite d’une nouvelle locataire à plumes. Frédéric est aux anges. Par la fenêtre grand ouverte souffle comme un vent de liberté, les écrous sautent, une porte s’ouvre, une page se tourne, une nouvelle vie s’offre à lui. Un Court tendre et charmant empli de poésie.
toutes mes voix
Merci d’avance !
je suis en lice aussi Poésie Eté , si vous aimez ...
Après avoir lu et apprécié "Sérénade champêtre", je crois que nous avons affaire à une belle belle plume.
Bonne chance à votre texte...
+ 5 voix !
Si vous voulez passer, dans un registre plus sombre et guerrier, mais invitant a l aventure d une saga https://short-edition.com/fr/oeuvre/nouvelles/le-cheval-et-la-fleche
Merci à vous pour votre joli texte, on y entend la mer , la solitude et surtout la plénitude, l'attachement à ce qu'il nous reste lorsqu'on se sent seul .
Amitiés à vous.
Mon vote .
merci
sylvie
Si vous aimez les haïkus : "vague à l'âme" à découvrir sur ma page
Vous avez su par vos mots semés le doute. C'est une belle histoire que celle de cet homme et de cette mouette/Bertha...
+ 5 voix !
Si vous aimez la liberté, je vous propose http://short-edition.com/fr/oeuvre/tres-tres-court/le-lierre-1
Mes votes
Bonne journée à vous
la mouette se transforme en princesse
jolie fable
et de parloir
qui annonce
la liberté
à venir^^+5
Je vous attribue mes 3 VOIX
A l'occasion je vous invite à aller lire le poème sur les cuves de Sassenage. Je vous conduirai dans la visite de ce lieu magique et sacré. MERCI d'avance
A bientot de vous lire sur d'autres lectures.
si vous n'êtes pas passée chez moi, ' les soldats imposent ' Printemps , ' le chasseur alpin ' Paysages et mes haïkus et tanka Eté ...
Et si tu veux bien entendre la pluie violette ... https://short-edition.com/fr/oeuvre/poetik/et-dans-ma-tete-en-boucle-reviendra-purple-rain
Je vous invite si vous le souhaitez à découvrir "choc" https://short-edition.com/fr/oeuvre/poetik/choc-2
http://short-edition.com/fr/oeuvre/poetik/you-hanoi-me-part-2
! Une invitation à découvrir “Ses lèvres rougissent” et “Isère en Mouvement” ! Merci d’avance !
bien sûr je vais venir vous lire amitiés
Elle est touchante cette "fiancée" qui vient faire ses adieux à Frédo en acceptant d'entrer dans la chambre de l'homme libre qu'il sera bientôt...