Crépuscules

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Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Que suis-je donc devenu après toutes ces horreurs ? Non ! ne t’en souviens pas ! Tu ne peux pas, tu ne dois pas y penser. Je t’en prie, éloigne-toi de cette douleur...

Elle s’appelait Zendaya, Zendaya Ngassi Samba et elle était le « joyau » de son père. Régulièrement, il lui offrait des bijoux pour l’embellir encore plus. Mais en avait-elle besoin ? Non ! Zendaya était belle. Dieu qu’elle était belle !
M. Ngassi fulmina lorsqu’il fut au courant qu’elle s’était éprise de moi. Bien que je ne me souciai guère de son consentement, je constatai avec peine que Zendaya semblait angoissée. Une nuit, elle vint me voir à l’improviste. Je découvris les sillons de larmes qui avaient scarifié sa beauté. Elle refusa de répondre à mon inquiétude. Elle préféra m’enlacer puis m’embrasser. Je l’embrassai sous un ciel radieux. Et au bout de la nuit, elles s’en allèrent.
Quelques heures après, j’appris la disparition de Zendaya. Elle s’était évaporée. Personne ne savait où elle pouvait se trouver !
Ce matin-là, je me réveillai très gai. Ma nuit avec mes belles avait été magique. Malgré cela, je me faisais du souci pour Zendaya. Je me demandais ce qui pouvait l’affadir autant.
Mme Samba et son fils débarquèrent chez moi. Quand ils surent que j’ignorais où elle se trouvait, l’effroi les enveloppa. Je ne comprenais pas ce qu’il se passait. Non ! je ne voulais pas comprendre. La police fut mobilisée. Les médias se précipitèrent. Le pays tout entier fut alerté. Zendaya était-elle la nouvelle victime du mal qui s’enlisait dans nos villes, nos rues, nos murs, nos mains ?
Le crépuscule, le crépuscule nous envahissait. Mme Samba perdait espoir. Son fils la réconfortait. Quant à moi, je luttais contre la désolation. M. Ngassi écourta son voyage d’affaire afin de s’enquérir de l’état de son joyau. Sa femme et son fils paniquèrent dès qu’ils le virent. Il les jeta un terrifiant regard froid et il me lança un très large sourire. Un sourire ? Pourquoi ce sourire ?
Cet homme que je connaissais très peu, m’apparut encore plus mystérieux. L’air dédaigneux, il s’avança vers moi. Et plus il s’approchait, plus il souriait et se moquait de moi. Il renvoya tous ceux qui s’intéressaient à cette sombre affaire. Et lorsque nous nous retrouvâmes seuls, il nous révéla qu’il savait où se cachait Zendaya. Choqué, j’essayai de lui tirer les vers du nez, mais impassible il demeura. Sa femme et son fils, étrangement, n’avaient pas l’air surpris par cette annonce.
D’un coup, il les réprimanda pour avoir interpellé « le monde entier ». La violence et la haine brillaient dans ses yeux. J’étais confus, abasourdi. Je ne comprenais pas pourquoi il réagissait ainsi. Après les avoir copieusement blâmés, il m’empoigna, toujours avec son sourire railleur, et m’embarqua pour « un périple plein de surprises ».
Après plusieurs minutes de route, la voiture s’arrêta dans un quartier lugubre situé à des kilomètres du centre-ville. Nous entrâmes dans la maison où était censée se cacher Zendaya. Qu’y faisait-elle aussi loin de la maison familiale ? M. Ngassi refusa de me répondre. Il pouffa presque de rire quand il vit mon visage se parer de colère.
Zendaya n’y était pas, du moins, elle n’y était plus. On ne trouva que du sang et des indices de lutte. Je voulus signaler à la police cet éventuel enlèvement. M. Ngassi m’en empêcha. Sa femme et son fils n’essayèrent même pas de l’en dissuader. Ces gens cachaient quelque chose de grave, quelque chose qu’ils n’étaient pas prêts à me révéler.
Dans la cuisine, je ramassai un couteau. J’en avais marre. Ma famille était en danger et ces gens ne faisaient rien pour lui venir en aide. J’étais prêt à tout pour sauver Zendaya et ma fille. Je me jetai sur M. Ngassi. Je le poignardai au bras gauche. Ce dernier, voyant ma fougueuse détermination, me dévoila son immoral secret.
Que sais-tu de l’amour, gamin impertinent ? Qu’est-ce qui te fait croire que tu es fait pour ma fille ? Idiot ! C’est moi le seul homme qui l’aime. Je l’aime, tu m’entends ? Je l’aime plus que tout sur cette terre. Je sais que je devrais avoir honte de le dire. Mais, en fait, je n’ai jamais été aussi heureux. Pourquoi devrais-je abandonner ma bien-aimée dans les bras d’un vaurien ? Jamais ! Zendaya mérite mieux. Elle n’aime que moi ! Elle m’a toujours aimé ! Mets donc fin à ton petit jeu. Crétin ! peux-tu lui donner un plaisir charnel équivalant à celui que je lui offre depuis son enfance, et surtout, depuis qu’elle est devenue une femme, une vraie ?

Aaaaahhhhh ! Zendaya ?! Comment as-tu pu violé ma fille ? Mon Dieu ! qu’est-ce que j’ai fait ? Pourquoi ai-je laissé un monstre rôdé autour d’elle ? Tu as détruit ma vie et celle de mon enfant. Tu vas payer pour tout le mal...

Bon sang, fermez-là ! Je vous conseille de vous taire. Maa, tu veux dire que tu n’as jamais remarqué son attachement immodéré pour elle ? Oh ! ne joue pas à l’ignorante ! Tu l’as laissé faire. Tu ne trompes personne.

Ma petite sœur a voulu vivre loin de vous. Cette oppression, votre oppression...vous êtes tous deux des monstres ! Elle est venue ici uniquement parce que tu as menacé de mort cet homme qu’elle aime vraiment. Elle ne t’aime que comme un père. Quand le comprendras-tu ?

Je vous préviens ! S’il lui arrive la moindre chose, je vous tuerai ! Vous faites déjà assez de mal à ce pays. Tous ces enfants que vous arrachez à leurs familles, tous ces enfants que vous tuez pour leurs organes, tous ces crimes rituels... Non ! Je n’aurai pas dû vous laisser faire. Je suis devenu aussi répugnant que vous. Je suis devenu une...

Mon téléphone retentit. J’étais tellement consterné par tout ce qui venait d’être dit, que je ne constatai pas que c’était Zendaya qui me contactait. Ses ravisseurs ne me laissèrent pas le temps de connaitre son état physique. Ils nous ordonnèrent de nous rendre dans un entrepôt situé à l’autre bout de la ville.
Vers quatre heures, dans l’obscurité absolue et l’inquiétude la plus glaçante, nous y arrivâmes. La porte était entrouverte. Nous entrâmes, à pas feutrés, dans cet édifice ténébreux. Daimon, le frère de Zendaya, parvint à trouver l’interrupteur. Je fermai les yeux. Lorsque je les ouvris à nouveau, je découvris, je...découvris...le carnage, la boucherie, le massacre le plus sanglant de tous les temps.
Corps décapité, dépecé. Bras et pieds arrachés, disséqués. Tête émiettée, réduite en poudre. Os brisés et concassés. Mare de sang.
Je vomis. M. Ngassi s’écroula. Mme Samba lâcha des cris de désolation et Daimon, sidéré, pleura. Sur les murs, on lisait en lettres de sang, les mots « vengeance » et « justice ». Je regardai, avec pitié et colère, ces trois êtres inhumains déchirés par la douleur.
Le mal que l’on fait à autrui pour satisfaire notre bien, le mal pour le bien, le bien par le mal, le crépuscule, devrait-il existé ? La satisfaction qu’il nous offre devrait-elle nous réjouir ? Devrions-nous laisser nos monstres décarcasser le monde afin de satisfaire le mal qui gronde en nous ? Mais, au fait, qu’est-ce que le mal ? qu’est-ce que le bien ? et qu’est-ce que nous sommes ?
Daimon étrangla ses parents. L’un après l’autre, il les assomma jusqu’à en faire une pâte de chair et d’os visqueuse. Leur sang se mêla à celui de leur fille. Les cris de joie de Daimon traduisaient sa démence galopante, son esprit détraqué. Il me jeta un regard dépouillé d’humanité.
Zendaya était morte. Que ferai-je du reste de ma vie ?
À l’aube, Daimon but tout le sang de ses proches. Il était devenu une abomination. Et moi, je devins un simulacre d’homme, un homme calamiteux, un ersatz de moi-même piteusement en vie et sombrant dans la déchéance.
...M’éloigner de ma douleur ? Non ! je ne le ferai plus. J’ai besoin d’elle pour me reconstruire, pour redevenir cet homme que Zendaya a aimé. Pour elle, pour notre enfant, pour l’être que j’ai autrefois été, je choisis de revivre à présent dans la lumière, dans la lumière de la vie.
Je choisis, aujourd’hui, de rouvrir mes yeux.