… Bref, comme je vous le disais, j’étais confortablement installé dans un fauteuil quand M. Stims m’a expliqué ce qu’il voulait faire avec son invention. Mais s’il vous plaît, ne me... [+]
En pleine fleur de l’âge, un jeune homme entre en possession d’un épais manuel comportant des instructions aussi complexes qu’abstruses indiquant comment construire une machine indéfinie. Cela l’intrigue. Rapidement, cela l’obsède si bien qu’il passe des heures à la construire.
Les années s’écoulent alors qu’il s’acharne pour comprendre et surmonter chacune des étapes décrites sur la liste qui semble ne pas finir. Absorbé qu’il est par sa tâche, il en oublie le temps qui passe.
Il est persuadé qu’une fois la machine assemblée, tout le travail et le temps qu’il y a investi seront rétrospectivement justifiés et que la machine donnera un sens à sa vie, comblant le vide qu’il ressent.
Parfois, pour récompenser une intense journée de travail, il laisse son imagination vagabonder librement et, dans son esprit, des scénarios fantastiques prennent corps : la machine se révèle être un véhicule capable de se déplacer plus vite que la lumière, de visiter le monde des morts, de donner l’accès à des univers parallèles, de modifier le passé, de garantir l’immortalité ; ou être une lampe abritant un génie prêt à exaucer le moindre de ses souhaits. À moins qu’il ne s’agisse d’une machine donnant accès à des mondes au-delà de la physique et de la logique, où le noir serait blanc, l’unité nulle, les mensonges des vérités et où la vie serait la mort.
Il arrive que sa volonté vacille, temporairement, et qu’il se trouve en proie à des doutes quant aux raisons de son entreprise. Était-il destiné, lui, à découvrir ses instructions ou n’était-ce que le fruit du hasard qui les avait mis sur sa route ? Est-ce une bénédiction ou une malédiction ? Y a-il d’autres personnes occupées comme lui à construire leurs propres machines ou bien est-il le seul ? Ne cherche-t-il pas, afin de ne pas se confronter au manque de sens, au vide, de sa propre vie, à s’adonner à une tâche absurde qui n’aboutirait à rien – sinon éventuellement à une construction banale et insignifiante ?
À d’autres moments, il se demande si cette machine n’est pas qu’une entité métaphorique et lui un simple personnage dans une parabole allégorique qui tente de mettre en lumière, à travers chacune de ses actions, une vérité existentielle et profonde qui, hélas, il lui est impossible de saisir et qu’il ne peut comprendre.
Les années passent, ses mains perdent en dextérité, ses yeux en précision, son dos en souplesse, son esprit en vivacité. Les tâches qui ne lui demandaient jadis quasiment aucun effort physique ni mental requièrent désormais toute son attention, toute sa force, le laissant exténué.
Finalement, cette longue et pénible période de construction arrive à son terme : la dernière pièce est prête à être insérée. Il ne reste plus qu’à la fixer à l’aide du dernier écrou et du dernier boulon pour la compléter. L’homme est subjugué par l’allure imposante qui semble rayonner de la structure enfin assemblée. Il se promet de ne jamais la quitter pour pouvoir observer indéfiniment cette stupéfiante beauté.
Il réalise alors qu’il vit les derniers moments de sa mortelle existence. Au fur et à mesure que sa vision faiblit, il comprend qu’il ne lui reste qu’à passer le seuil de la machine, dont la forme lui semble être celle de la demeure idéale pour passer le reste de l’éternité.
Les années s’écoulent alors qu’il s’acharne pour comprendre et surmonter chacune des étapes décrites sur la liste qui semble ne pas finir. Absorbé qu’il est par sa tâche, il en oublie le temps qui passe.
Il est persuadé qu’une fois la machine assemblée, tout le travail et le temps qu’il y a investi seront rétrospectivement justifiés et que la machine donnera un sens à sa vie, comblant le vide qu’il ressent.
Parfois, pour récompenser une intense journée de travail, il laisse son imagination vagabonder librement et, dans son esprit, des scénarios fantastiques prennent corps : la machine se révèle être un véhicule capable de se déplacer plus vite que la lumière, de visiter le monde des morts, de donner l’accès à des univers parallèles, de modifier le passé, de garantir l’immortalité ; ou être une lampe abritant un génie prêt à exaucer le moindre de ses souhaits. À moins qu’il ne s’agisse d’une machine donnant accès à des mondes au-delà de la physique et de la logique, où le noir serait blanc, l’unité nulle, les mensonges des vérités et où la vie serait la mort.
Il arrive que sa volonté vacille, temporairement, et qu’il se trouve en proie à des doutes quant aux raisons de son entreprise. Était-il destiné, lui, à découvrir ses instructions ou n’était-ce que le fruit du hasard qui les avait mis sur sa route ? Est-ce une bénédiction ou une malédiction ? Y a-il d’autres personnes occupées comme lui à construire leurs propres machines ou bien est-il le seul ? Ne cherche-t-il pas, afin de ne pas se confronter au manque de sens, au vide, de sa propre vie, à s’adonner à une tâche absurde qui n’aboutirait à rien – sinon éventuellement à une construction banale et insignifiante ?
À d’autres moments, il se demande si cette machine n’est pas qu’une entité métaphorique et lui un simple personnage dans une parabole allégorique qui tente de mettre en lumière, à travers chacune de ses actions, une vérité existentielle et profonde qui, hélas, il lui est impossible de saisir et qu’il ne peut comprendre.
Les années passent, ses mains perdent en dextérité, ses yeux en précision, son dos en souplesse, son esprit en vivacité. Les tâches qui ne lui demandaient jadis quasiment aucun effort physique ni mental requièrent désormais toute son attention, toute sa force, le laissant exténué.
Finalement, cette longue et pénible période de construction arrive à son terme : la dernière pièce est prête à être insérée. Il ne reste plus qu’à la fixer à l’aide du dernier écrou et du dernier boulon pour la compléter. L’homme est subjugué par l’allure imposante qui semble rayonner de la structure enfin assemblée. Il se promet de ne jamais la quitter pour pouvoir observer indéfiniment cette stupéfiante beauté.
Il réalise alors qu’il vit les derniers moments de sa mortelle existence. Au fur et à mesure que sa vision faiblit, il comprend qu’il ne lui reste qu’à passer le seuil de la machine, dont la forme lui semble être celle de la demeure idéale pour passer le reste de l’éternité.
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