Au-delà de la réalité

Juste une vielle dame de 67 ans ayant parasité le corps d’une jeune ado. Et oui j’oubliais, une vielle dame mordue de littérature...

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés? Peut-être les deux. Il était midi mais le ciel était sombre. Il faisait tout à coup froid, je tremblais. Il n’y avait pas de courant d’air mais il faisait froid. Dans cette obscurité aucun son n’était imperceptible, le moindre son était accessible à mes oreilles.
J’entendais une voix au loin comme un chant. C’était une voix d’enfant mais je ne savais pas d’où venait cette voix.

- Grand frère , où es-tu ?

Ça n’avait pas de sens, je n’ai pas de frère. Était-ce un rêve ?
Un enfant se tenait devant moi. Il n’avait aucun vêtement, aucun visage mais il me semblait que c’était un enfant. Un homme en noire lui retenait les deux bras de sa main droite et de l’autre il tenait ce qui m’a semblé être une dague, il avait posé sur le cou de l’enfant. Il tentait vainement de se sortir de l’étreindre de cet homme, mais sans succès. C’était donc sa voix que j’entendais. Il m’appelait mais je ne pouvais pas bouger. Rien ne me retenais, aucune chaîne, aucun lien mais j’étais incapable de faire le moindre mouvement. Était-ce de la peur ? Non, ça ne pouvait pas être ça.Pourtant c’est ce qui aurait justifié mon impuissance, être tétanisé.

Il n’avait rien d’effrayant pourtant cet homme. C’est vrai il n’avait pas de visage également et n’avait aucun membre qui pouvait me permettre de le distinguer clairement. Il était juste obscur, comme la nuit elle-même et il retenait ce garçon, mais je n’avais pas peur.
Je n’avais plus de voix, je ne pouvais pas crier et autour de nous semblait régnait un silence inquiétant. Il n’y avait personne, à croire que le monde se résumait à trois personnes. Moi, ce garçon inconnu et cet homme ou plutôt cette masse obscur qui le retenait. Je n’avais toujours pas peur. Et je ne pouvais toujours pas bouger. J’avais les mains liés sans être enchaînés.
À quoi rimait tout ceci ? Quelle était la logique de cette situation ?
Comment tout ceci était possible ? Ou étions nous simplement.
Sa voix résonnait toujours dans ma tête. Comme un disque raillé il répétait les mêmes mots. Grand frère, grand frère , regarde moi.
Je ne voyais rien, mais comment est-ce que je pouvais savoir qu’on était trois ? Et qu’il y avait ce garçon et cet inconnu ? Ne voyais je vraiment rien ou me refusais je simplement de voir ce spectacle incohérent dont j’étais le spectateur inutile.

Les battements de mon cœur résonnaient dans chacune de mes cellules, je ressentais chacune d’entre elles. Comme si quelque chose en moi s’éveillait ou plutôt quelqu’un, qui n’étais pas moi. Je me sentais faible , quelqu’un de plus fort devait être là à ma place, pas moi. Moi je ne pouvais rien faire, je ne devrais même pas être là, être ici. Mais encore fallait-il y croire, croire en cette absurdité. Cela reviendrait à accepter tout ceci comme étant vrai. Cela reviendrait à croire à ce qui ne l’était pas. Croire à l’impossible, croire au surnaturel.

Ça me revenait, j’étais monté me coucher. Ma tête me tournait, j’ai pris un calmant et je me suis endormie. Ce froid c’était sûrement le courant d’air, j’aurai du fermer la fenêtre de ma chambre. Serait-ce par là qu’ils étaient entrés ? Il n’y avait aucune fenêtre ici. Je ne reconnaissais pas cet endroit. Et ça n’expliquait toujours pas pourquoi je ne pouvais pas bouger.

Mon nom.
Oui comment est-ce que je m’appelle déjà ?
Ma mère m’a appelé avant que je ne monte me coucher. J’ai bien une mère et un père aussi. Mais je ne me rappelle pas d’eux. À quoi ressemblent ils ?


- Où suis-je ? Qui suis-je ?

Aucun son ne sortait de ma bouche. J’étais sûr d’avoir parlé pourtant rien ne s’était passé. Aucune réaction. Je sentais de moins en moins mon corps, je tremblais de plus en plus mais il n’y avait pas le moindre vent ici. Ici c’est où déjà ? Quelque part, où il n’y a pas d’air, pas de lumière, mais il y’a moi et eux.

- Aide moi grand frère.

Qui était ce garçon qui n’arrêtait pas de m’appeler grand frère. Je n’ai pas de frère voyons et encore moins un petit frère, du moins je le crois. Cet homme derrière lui semblait rire. Mais il n’a pas de visage, comment puis-je savoir qu’il rit ? Je le sens c’est tout. Je sens qu’il rit de moi. Comment faisait -il pour me voir, il n’a pas d’yeux. Il semblait pourtant convaincu que je ne ferai rien. Il riait de mon impuissance.
Je m’enfoncais de plus en plus. Je tombais profondément vers un fond qui n’existe pas. Il me semblait être déjà parterre, comment pourrais-je tomber plus bas que terre. Dans cette univers tout est possible surtout le plus improbable et le plus incohérent. Ma voix ne sortait toujours pas. Je n’avais toujours pas peur puisque je ne ressentais rien.

- Réveil toi !

Il avait changé son discourt. Il me demandait de me réveiller, mais pourquoi ? Je ne dormais pas, si je pouvais le voir c’est que je dormais pas. Pourquoi faisait-il si noir. Le soleil est au zénith à cette heure là de la journée normalement. Mais quelle heure était-il déjà ? Il n’y avait rien de logique, essayez de comprendre conduirais à la démence. Encore fallait-il qu’il me reste du bon sens.

- Réveil toi !

Mais je ne dors pas. Je ne dors pas. M’entendait-il seulement ? Pour quelqu’un qu’on retenait il n’avait pas l’air d’avoir peur, il répétait juste les mêmes mots comme si on le lui demandait.

- Réveil toi je t’en prie !

La tonalité de la voix avait légèrement changé, on pouvait ressentir une émotion. Cette personne semblait perturbé ou effrayé. Sentiment normal dans cette situation. Un sentiment dont j’étais manifestement privé.Pourquoi devrais-je vivre tout ceci.

- Aide- moi grand frère ! Aide moi.
- Réveil toi !

Les voix se faisaient de plus en plus proche et cette ombre m’avait semblé avoir bougé légèrement. L’instant d’une seconde j’ai cru qu’elle avait lâché ce garçon et qu’elle était derrière moi. Pourquoi n’avais- je toujours pas peur ? Etais- je si disposé à mourir au point de l’accueillir si sereinement ?

- Réveil toi, je t’en prie, ne me fais pas ça.

Le petit garçon n’était plus là. Était-il mort ? Je ne l’entendais plus supplier. Je ne le voyais plus, pourtant je n’avais pas clignait des yeux. L’ombre venait vers moi, il venait pour moi. Il en avait finit avec l’autre, je n’avais rien su faire et il venait pour moi à présent.
Je ne sentais rien, toujours aucune peur, je ne fuyais pas, je ne respirais même plus. Comment pouvais je vivre sans respirer, ça voudrait dire que j’étais mort. Oui c’était logique je n’avais pas peur puisque j’étais mort. Je n’avais rien à craindre de lui, il ne pouvait pas me tuer une seconde fois. C’était ça la mort ? Le vide, une ombre et un frère qui crie à l’aide ?

- SALIM !! Regarde moi !!

une main m’avait agrippé le poignet. Je la sentais fermement. Je sentais mon corps à nouveau. Je tremblais toujours et mon corps tout entier était trempé. J’ouvrais délicatement mes yeux et j’allaitais bruyamment, je pouvais sentir l’air sur mon corps. J’avais l’impression d’être revenu à la vie. Une femme se tenait devant moi et m’agrippait les poignets. Ses yeux étaient embuées, elle semblait avoir pleuré.

- Tu m’as fais si peur Salim, tu ne te réveillais pas.

Tout me revenait à nouveau. Ma mère, mon nom, ma vie. Ça n’était qu’un rêve, un mauvais rêve, rien de plus. Et cette fois c’était ma mère qui m’appelait, elle s’inquiétait puisque je ne me réveillais pas. Tout avait un sens à présent.

- Tu es fébrile, je vais appeler un médecin, je reviens.

Ma mère s’était détaché de moi et se dirigeait vers la porte de ma chambre lorsqu’un détail retient mon attention. Elle avait ôté ses mains de sur mes poignets et des traces noires s’étaient dessinées où elle avait posé ses mains. Il n’y avait pas à s’affoler certainement que ses mains étaient sales.

- puis-je voir tes mains maman ?

Elle était surprise de cette demande mais se retourna malgré tout vers moi et me laissa contempler ses mains. Elles étaient aussi propres et nettes que le voile d’une jeune mariée. Je regardais à nouveau mes poignets et cette fois-ci la peur s’empara de moi. Et si ça n’était pas un rêve ?