UN BEAU JOUR D’AVRIL, RIVE GAUCHE...
Eurydike s’assit lourdement sur le sofa de son salon.
Cela était devenu une part de sa routine quotidienne : se lever, prendre une douche, se sécher les cheveux puis s’asseoir le reste de la journée sur le canapé, attendant un signe de la part de l’homme qu’elle aimait.
Et qu’est-ce qu’elle l’aimait! Ce n’était pas compliqué, elle ne pensait qu’à lui toute la journée depuis trois mois qu’ils s’étaient rencontrés. Et ç’avait été le coup de foudre entre eux.
Un amour ardent, une passion totalement dévorante s’étaient emparés d’eux et ils n’imaginaient plus possible de vivre l’un sans l’autre. Seule la rivière séparant les deux rives de la ville mettait de la distance entre leurs deux âmes.
Malheureusement, en un jour funeste, les circonstances en décidèrent autrement.
Car, depuis plus d’un mois maintenant, un barrage de police trônait au beau milieu du pont qui couronnait leur union. Et ce barrage procédait à des contrôles d’identité stricts et exerçait une répression sévère sur les habitants des deux rives. Tant et si bien qu’elle ne pouvait désormais plus le rejoindre de l’autre côté. Elle ne pouvait simplement plus traverser sans risquer sa peau. Et elle en pleurait pendant des heures tous les jours : cette nouvelle contrainte la tuait à petit feu, elle ne pouvait pas supporter cette séparation. Elle l’aimait tellement...
Mais lui, que faisait-il bon sang? Pourquoi ne réagissait-il pas? Ne s’était-il pas inquiéter de ne pas la voir revenir?
Elle maudissait la passivité à laquelle elle était réduite, parce qu’elle n’était pas le genre de femme à attendre que l’homme prenne les décisions.
S’il avait fallu demander sa main, elle était persuadée qu’elle aurait pris l’initiative bien avant lui. Elle avait toujours été sûre d’elle, s’était toujours faite confiance, était toujours certaine d’avoir la bonne solution. Se retrouver réduite à attendre une réaction de sa part la rendait dingue. Car, si elle pouvait prévoir ses propres mouvements, il n’en était point de même concernant les siens.
Elle attendait donc un signe de sa part, une réaction, et ce depuis trente-deux jours et six heures et quart déjà.
***
AU MÊME MOMENT, RIVE DROITE...
Il l’aimait, c’était incontestable. Il n’imaginait pas finir sa vie avec quelqu’un d’autre qu’elle. C’était vraiment elle, le grand amour, celui qu’il avait cherché et attendu toute sa vie. Il en était certain. Il n’attendait plus de preuves de sa part. Leur relation l’avait convaincu.
La seule chose qu’il avait du mal à déterminer à présent, c’était le jour qui serait le plus approprié pour demander sa main. Il n’osait pas aller la voir depuis presque un mois maintenant : après tout, était-il sûr qu’elle allait lui dire oui ? N’était-ce pas un peu tôt pour quelque chose d’aussi sérieux?
Il savait pertinemment que ce n’était pas une décision à prendre à la légère. Néanmoins, il savait tout aussi bien qu’elle était l’amour de sa vie, le seul et l’unique.
Il prit donc la décision ferme d’aller la voir le lendemain. Il l’aimait et voulait lui montrer.
Et rien n’allait l’en empêcher.
***
DEUX JOURS PLUS TARD, RIVE GAUCHE...
Décidément, ce ne serait encore pas pour aujourd’hui.
Elle avait de nouveau attendu toute la journée sur le canapé. Et rien ne s’était passé, de nouveau. Elle finissait par être résignée : elle avait dû se tromper. Ce qu’elle avait pris pour le grand amour n’était qu’une passion passagère peut-être.
Elle avait pourtant l’impression d’être incapable de se tromper sur ce genre de chose. Et surtout avec lui.
Pourtant, la seule visite qu’elle recevait depuis plus d’un mois qu’elle attendait, c’était celle du facteur, qui passait deux fois dans la journée : une fois le matin, une fois le soir, toujours à la même heure, à croire qu’il avait avalé une pendule, cet homme.
Cela ne l’empêchait cependant pas de tressaillir à chaque fois qu’elle entendait ses pas sur le perron et les enveloppes glisser sous la porte.
Quand le soleil fut couché depuis plus d’une heure, Eurydike se décida enfin à se lever et à aller chercher son courrier, toujours selon sa routine établie depuis un mois.
Il n’y avait qu’une lettre et le journal du soir.
Elle ouvrit fébrilement la lettre.
C’était une lettre de sa mère. Elle lui annonçait qu’elle viendrait bientôt la voir. Quand le barrage serait tombé...
Elle soupira et ouvrit le journal.
Il était en première page.
« Hier après-midi, un jeune homme voulant aller rive gauche a forcé le barrage de police du Pont. C’est la première fois qu’un incident tel se produit depuis l’érection du barrage. »
Elle poursuivit avec attention sa lecture, tremblant violemment.
Les policiers lui avaient tiré dessus. Le coup était parti, accidentellement, disait-il. Il était mort sur le coup, « un malheureux accident en somme ».
Elle laissa tomber le journal, les larmes aux yeux.
Cette fois, il était définitivement passé de l’autre côté.
Eurydike s’assit lourdement sur le sofa de son salon.
Cela était devenu une part de sa routine quotidienne : se lever, prendre une douche, se sécher les cheveux puis s’asseoir le reste de la journée sur le canapé, attendant un signe de la part de l’homme qu’elle aimait.
Et qu’est-ce qu’elle l’aimait! Ce n’était pas compliqué, elle ne pensait qu’à lui toute la journée depuis trois mois qu’ils s’étaient rencontrés. Et ç’avait été le coup de foudre entre eux.
Un amour ardent, une passion totalement dévorante s’étaient emparés d’eux et ils n’imaginaient plus possible de vivre l’un sans l’autre. Seule la rivière séparant les deux rives de la ville mettait de la distance entre leurs deux âmes.
Malheureusement, en un jour funeste, les circonstances en décidèrent autrement.
Car, depuis plus d’un mois maintenant, un barrage de police trônait au beau milieu du pont qui couronnait leur union. Et ce barrage procédait à des contrôles d’identité stricts et exerçait une répression sévère sur les habitants des deux rives. Tant et si bien qu’elle ne pouvait désormais plus le rejoindre de l’autre côté. Elle ne pouvait simplement plus traverser sans risquer sa peau. Et elle en pleurait pendant des heures tous les jours : cette nouvelle contrainte la tuait à petit feu, elle ne pouvait pas supporter cette séparation. Elle l’aimait tellement...
Mais lui, que faisait-il bon sang? Pourquoi ne réagissait-il pas? Ne s’était-il pas inquiéter de ne pas la voir revenir?
Elle maudissait la passivité à laquelle elle était réduite, parce qu’elle n’était pas le genre de femme à attendre que l’homme prenne les décisions.
S’il avait fallu demander sa main, elle était persuadée qu’elle aurait pris l’initiative bien avant lui. Elle avait toujours été sûre d’elle, s’était toujours faite confiance, était toujours certaine d’avoir la bonne solution. Se retrouver réduite à attendre une réaction de sa part la rendait dingue. Car, si elle pouvait prévoir ses propres mouvements, il n’en était point de même concernant les siens.
Elle attendait donc un signe de sa part, une réaction, et ce depuis trente-deux jours et six heures et quart déjà.
***
AU MÊME MOMENT, RIVE DROITE...
Il l’aimait, c’était incontestable. Il n’imaginait pas finir sa vie avec quelqu’un d’autre qu’elle. C’était vraiment elle, le grand amour, celui qu’il avait cherché et attendu toute sa vie. Il en était certain. Il n’attendait plus de preuves de sa part. Leur relation l’avait convaincu.
La seule chose qu’il avait du mal à déterminer à présent, c’était le jour qui serait le plus approprié pour demander sa main. Il n’osait pas aller la voir depuis presque un mois maintenant : après tout, était-il sûr qu’elle allait lui dire oui ? N’était-ce pas un peu tôt pour quelque chose d’aussi sérieux?
Il savait pertinemment que ce n’était pas une décision à prendre à la légère. Néanmoins, il savait tout aussi bien qu’elle était l’amour de sa vie, le seul et l’unique.
Il prit donc la décision ferme d’aller la voir le lendemain. Il l’aimait et voulait lui montrer.
Et rien n’allait l’en empêcher.
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DEUX JOURS PLUS TARD, RIVE GAUCHE...
Décidément, ce ne serait encore pas pour aujourd’hui.
Elle avait de nouveau attendu toute la journée sur le canapé. Et rien ne s’était passé, de nouveau. Elle finissait par être résignée : elle avait dû se tromper. Ce qu’elle avait pris pour le grand amour n’était qu’une passion passagère peut-être.
Elle avait pourtant l’impression d’être incapable de se tromper sur ce genre de chose. Et surtout avec lui.
Pourtant, la seule visite qu’elle recevait depuis plus d’un mois qu’elle attendait, c’était celle du facteur, qui passait deux fois dans la journée : une fois le matin, une fois le soir, toujours à la même heure, à croire qu’il avait avalé une pendule, cet homme.
Cela ne l’empêchait cependant pas de tressaillir à chaque fois qu’elle entendait ses pas sur le perron et les enveloppes glisser sous la porte.
Quand le soleil fut couché depuis plus d’une heure, Eurydike se décida enfin à se lever et à aller chercher son courrier, toujours selon sa routine établie depuis un mois.
Il n’y avait qu’une lettre et le journal du soir.
Elle ouvrit fébrilement la lettre.
C’était une lettre de sa mère. Elle lui annonçait qu’elle viendrait bientôt la voir. Quand le barrage serait tombé...
Elle soupira et ouvrit le journal.
Il était en première page.
« Hier après-midi, un jeune homme voulant aller rive gauche a forcé le barrage de police du Pont. C’est la première fois qu’un incident tel se produit depuis l’érection du barrage. »
Elle poursuivit avec attention sa lecture, tremblant violemment.
Les policiers lui avaient tiré dessus. Le coup était parti, accidentellement, disait-il. Il était mort sur le coup, « un malheureux accident en somme ».
Elle laissa tomber le journal, les larmes aux yeux.
Cette fois, il était définitivement passé de l’autre côté.