Antonio contemplait la bouche pulpeuse de son amante. Dès la première fois, il avait été subjugué par ses lèvres grenat, bombées et fruitées. Certains fantasment sur les pieds ou les yeux... [+]
Il la tenait enfin cette victoire ; victoire sur la vie ; victoire sur les autres ; victoire sur Odette. Ses grands yeux noirs ne pouvaient plus désormais l'atteindre, le blesser, l'humilier. Il était né en cette matinée de printemps,à l'heure où la campagne s'éveille à la vie. Sa voix, pourtant si douce et qu'il aimait, ne vomirait plus ces mots terribles emplis de moquerie, et ses mains, si belles, ne brûleraient plus jamais sa peau et son âme. Non, à tout cela, il tournait le dos sans regret, sans amertume, mais avec détermination.
La lumière qu'il avait cru magnifique auprès de cette silhouette souple, gracile et follement envoûtante, n'était devenue au fil des années, qu'un rayon blafard et ennuyeux.
Les mains tremblantes et le cœur échauffé, il relut le papier qui faisait de lui un homme libre, fier et plein d'assurance.
Le plateau, balayé par un vent frais, venait à sa façon, saluer cette naissance et, les bras ouverts, il offrit son avenir au ciel chargé de pluie et d'espoir. Il fit plusieurs tours sur lui-même répétant à l'infini, le nom de sa future grande école.
Soudainement, Brussière s'effaça et fit place à la grande ville, à ses trottoirs pavés, à ses maisons bourgeoises aux façades travaillées, à ses rues foisonnantes de monde et d'inconnu.
Tout entier à la vie nouvelle qui l'attendait, il baisa la lettre, l'étreignit comme si ce fut une maîtresse, la replia, et religieusement la glissa dans sa poche.
La chemise gonflée d'air pur et de promesses, il respira fortement, laissant entrer dans sa poitrine jusque là oppressée, un souffle libérateur.
Rassasié, repu de joie et de contentement, il embrassa la campagne alentour, coupa une herbe folle,la porta à ses lèvres puis regagna Brussière.
Le pas ferme, l'esprit dorénavant bien rangé, il traversa le village, passa la grille de la ferme avec une allégresse qui l'étonna fortement, tant il y était si peu habitué. Sa mère, femme rompue aux travaux agricoles, l'attendait sur le seuil, le visage fendu d'un sourire au creux duquel, il lui sembla déceler comme un peu de malice. S'arrêtant devant elle, il lui baisa le front et la serra férocement contre lui, afin de lui témoigner toute sa gratitude. Quand il sera ingénieur, elle n'aura plus à s'épuiser de la sorte, la ferme ne sera plus qu'un lointain souvenir pour eux deux. Voilà ce qu'il voulait pour ce corps fatigué, pour cette épaule qui jamais ne l'avait trahi.
La vieille femme, silencieuse, partagea sa félicité, point besoin de mots sous ces toits de lauzes, pour témoigner de son amour et de sa fierté. Elle glissa sa main rugueuse dans la sienne et l'entraîna dans la cuisine sur la table de laquelle, se trouvait un colis ficelé grossièrement. Un simple regard lui fit comprendre qu'il était pour lui et qu'il lui fallait l'ouvrir. Lâchant promptement la main de la doyenne, il défit le colis et découvrit avec surprise, un belle chemise blanche accompagnée d'un pantalon taillé dans un velours fin tirant sur le grenat. Elle avait mis dans ce cadeau de fortune, toutes ses économies, « mais il fallait bien ça pour son petit, lui, le futur ingénieur », lui expliqua-t-elle sans détour. Pudiquement, il lui baisa à nouveau le front et sortit deux verres, qu'il remplit de liqueur de myrtilles. La vieille femme, se remémorant d'anciens jours heureux, laissa sa langue glisser sur son palais sans âge sous l’œil reconnaissant de son fils.
Tandis qu'ils se régalaient de cette sucrerie toute naïve, quelqu'un frappa à l'une des fenêtres. Odette était là, sur le pas de la porte, coiffée d'un chapeau de paille duquel s'échappaient ses jolis cheveux châtains et ondulés, et vêtue d'une robe blanche à dentelle qui mettait en valeur ses galants poignets . Elle lui sourit et entra sans attendre qu'on l'y invitât, fixa vivement la chemise et le pantalon et, ôtant son chapeau, s'assit. « C'est donc bien vrai, tu as été reçu » fit-elle désenchantée. « Je m'en vais demain par le train de sept heures. Je prendrai un travail en plus de mes études, et je reviendrai chercher ma mère, et c'en sera fini de la ferme et de Brussière » répliqua-t-il bien décidé. « Je vois » déclara-t-elle s'approchant de lui. « Laisse-moi alors te féliciter et te souhaiter bonne chance » ajouta-t-elle lui mordillant la joue. « Oh! ma tendre Odette, voilà qu'il va falloir te trouver un autre jouet » lui renvoya-t-il insensible à cette fausse camaraderie.
La lumière qu'il avait cru magnifique auprès de cette silhouette souple, gracile et follement envoûtante, n'était devenue au fil des années, qu'un rayon blafard et ennuyeux.
Les mains tremblantes et le cœur échauffé, il relut le papier qui faisait de lui un homme libre, fier et plein d'assurance.
Le plateau, balayé par un vent frais, venait à sa façon, saluer cette naissance et, les bras ouverts, il offrit son avenir au ciel chargé de pluie et d'espoir. Il fit plusieurs tours sur lui-même répétant à l'infini, le nom de sa future grande école.
Soudainement, Brussière s'effaça et fit place à la grande ville, à ses trottoirs pavés, à ses maisons bourgeoises aux façades travaillées, à ses rues foisonnantes de monde et d'inconnu.
Tout entier à la vie nouvelle qui l'attendait, il baisa la lettre, l'étreignit comme si ce fut une maîtresse, la replia, et religieusement la glissa dans sa poche.
La chemise gonflée d'air pur et de promesses, il respira fortement, laissant entrer dans sa poitrine jusque là oppressée, un souffle libérateur.
Rassasié, repu de joie et de contentement, il embrassa la campagne alentour, coupa une herbe folle,la porta à ses lèvres puis regagna Brussière.
Le pas ferme, l'esprit dorénavant bien rangé, il traversa le village, passa la grille de la ferme avec une allégresse qui l'étonna fortement, tant il y était si peu habitué. Sa mère, femme rompue aux travaux agricoles, l'attendait sur le seuil, le visage fendu d'un sourire au creux duquel, il lui sembla déceler comme un peu de malice. S'arrêtant devant elle, il lui baisa le front et la serra férocement contre lui, afin de lui témoigner toute sa gratitude. Quand il sera ingénieur, elle n'aura plus à s'épuiser de la sorte, la ferme ne sera plus qu'un lointain souvenir pour eux deux. Voilà ce qu'il voulait pour ce corps fatigué, pour cette épaule qui jamais ne l'avait trahi.
La vieille femme, silencieuse, partagea sa félicité, point besoin de mots sous ces toits de lauzes, pour témoigner de son amour et de sa fierté. Elle glissa sa main rugueuse dans la sienne et l'entraîna dans la cuisine sur la table de laquelle, se trouvait un colis ficelé grossièrement. Un simple regard lui fit comprendre qu'il était pour lui et qu'il lui fallait l'ouvrir. Lâchant promptement la main de la doyenne, il défit le colis et découvrit avec surprise, un belle chemise blanche accompagnée d'un pantalon taillé dans un velours fin tirant sur le grenat. Elle avait mis dans ce cadeau de fortune, toutes ses économies, « mais il fallait bien ça pour son petit, lui, le futur ingénieur », lui expliqua-t-elle sans détour. Pudiquement, il lui baisa à nouveau le front et sortit deux verres, qu'il remplit de liqueur de myrtilles. La vieille femme, se remémorant d'anciens jours heureux, laissa sa langue glisser sur son palais sans âge sous l’œil reconnaissant de son fils.
Tandis qu'ils se régalaient de cette sucrerie toute naïve, quelqu'un frappa à l'une des fenêtres. Odette était là, sur le pas de la porte, coiffée d'un chapeau de paille duquel s'échappaient ses jolis cheveux châtains et ondulés, et vêtue d'une robe blanche à dentelle qui mettait en valeur ses galants poignets . Elle lui sourit et entra sans attendre qu'on l'y invitât, fixa vivement la chemise et le pantalon et, ôtant son chapeau, s'assit. « C'est donc bien vrai, tu as été reçu » fit-elle désenchantée. « Je m'en vais demain par le train de sept heures. Je prendrai un travail en plus de mes études, et je reviendrai chercher ma mère, et c'en sera fini de la ferme et de Brussière » répliqua-t-il bien décidé. « Je vois » déclara-t-elle s'approchant de lui. « Laisse-moi alors te féliciter et te souhaiter bonne chance » ajouta-t-elle lui mordillant la joue. « Oh! ma tendre Odette, voilà qu'il va falloir te trouver un autre jouet » lui renvoya-t-il insensible à cette fausse camaraderie.
Rastignac in Paris ... !