Un jour terne et pluvieux, assis sur mon Voltaire,
Ouvrant une revue d'essais de poésie,
Je tombai par hasard sur quatre... [+]

Il était différent et son âme insondable,
Pour qui surfe sans voir les vagues des saisons,
Avait l'inconsistance du château de sable,
Érodé par le froid d’une austère prison.
Quand on venait te voir dans ton appartement,
Il se tenait discret, assis dans la cuisine,
Le regard enferré dans un monde troublant,
Sans échos partageurs, comme mis en sourdine.
Le corps en balancier, rythmant une prière
En l'honneur de l'ersatz d'un dieu confidentiel,
Les deux mains emmêlées d'une étrange manière,
Proférant des bruits sourds, comme plaintes au ciel.
Et son monde interdit ignorait nos invites
Aux échanges parlés que nous lui proposions,
Occultant ses pensées, terré dans ses limites,
Flanqué dans un mutisme aux drôles de visions.
Après le déjeuner, c’était un jour d’été,
Alors que nous prenions le café en terrasse,
J’ai rapproché mon banc de sa chaise écartée,
Cette proximité ne brisa pas la glace.
Retournant un pot vide oublié dans un coin,
J’entrepris d’y frotter dans un rythme acharné
Un noyau d’abricot qui restait du festin
Jusqu’à faire un méplat et jusqu’à le trouer.
Sans savoir les effets sur mon discret voisin,
Je me mis à vider le noyau de son fruit
Pour en faire un appeau. Mon dieu qu'il sonnait bien
Ce sifflet impromptu ! Il en faisait du bruit !
Cet objet délaissé sur le bord de la table,
Fut aussitôt saisi par ses mains paresseuses,
Il souffla dans le trou et un son formidable
Remplit soudain Benoit d’une joie contagieuse.
Le succès imprévu de cette action cocasse
Egaya notre humeur avant notre départ.
J'avais par mon forfait brisé la carapace
De l'être silencieux muré dans ses remparts.
Un mois était passé, nous sommes revenus,
Et à peine arrivés Benoit dans la cuisine
S'était manifesté par des cris saugrenus
Pour qu'on vienne le voir dans la pièce voisine.
Sur la table une lauze en guise d'émeri
Un précieux bocal contenant des noyaux
Une aiguille à couture entourée de débris
Et plein de beaux sifflets gardés comme joyaux.
Depuis ce jour heureux, le rempart fait de roche,
Se fendit d'une brèche assaillie de soleil,
Qui éclairait l'espoir d'une nouvelle approche,
Formidable déclic d'un délicieux réveil.
Un noyau d'abricot a été la matière
D'un pont fédérateur bâti en trait d'union,
Trouverons-nous encor, Benoit, d'autres mystères
Qui joindront nos deux mains pour d'autres communions ?
Pour qui surfe sans voir les vagues des saisons,
Avait l'inconsistance du château de sable,
Érodé par le froid d’une austère prison.
Quand on venait te voir dans ton appartement,
Il se tenait discret, assis dans la cuisine,
Le regard enferré dans un monde troublant,
Sans échos partageurs, comme mis en sourdine.
Le corps en balancier, rythmant une prière
En l'honneur de l'ersatz d'un dieu confidentiel,
Les deux mains emmêlées d'une étrange manière,
Proférant des bruits sourds, comme plaintes au ciel.
Et son monde interdit ignorait nos invites
Aux échanges parlés que nous lui proposions,
Occultant ses pensées, terré dans ses limites,
Flanqué dans un mutisme aux drôles de visions.
Après le déjeuner, c’était un jour d’été,
Alors que nous prenions le café en terrasse,
J’ai rapproché mon banc de sa chaise écartée,
Cette proximité ne brisa pas la glace.
Retournant un pot vide oublié dans un coin,
J’entrepris d’y frotter dans un rythme acharné
Un noyau d’abricot qui restait du festin
Jusqu’à faire un méplat et jusqu’à le trouer.
Sans savoir les effets sur mon discret voisin,
Je me mis à vider le noyau de son fruit
Pour en faire un appeau. Mon dieu qu'il sonnait bien
Ce sifflet impromptu ! Il en faisait du bruit !
Cet objet délaissé sur le bord de la table,
Fut aussitôt saisi par ses mains paresseuses,
Il souffla dans le trou et un son formidable
Remplit soudain Benoit d’une joie contagieuse.
Le succès imprévu de cette action cocasse
Egaya notre humeur avant notre départ.
J'avais par mon forfait brisé la carapace
De l'être silencieux muré dans ses remparts.
Un mois était passé, nous sommes revenus,
Et à peine arrivés Benoit dans la cuisine
S'était manifesté par des cris saugrenus
Pour qu'on vienne le voir dans la pièce voisine.
Sur la table une lauze en guise d'émeri
Un précieux bocal contenant des noyaux
Une aiguille à couture entourée de débris
Et plein de beaux sifflets gardés comme joyaux.
Depuis ce jour heureux, le rempart fait de roche,
Se fendit d'une brèche assaillie de soleil,
Qui éclairait l'espoir d'une nouvelle approche,
Formidable déclic d'un délicieux réveil.
Un noyau d'abricot a été la matière
D'un pont fédérateur bâti en trait d'union,
Trouverons-nous encor, Benoit, d'autres mystères
Qui joindront nos deux mains pour d'autres communions ?
Beau récit poétique où se mêlent douceur et tendresse.