Une erreur de domotique !

Parce qu'il y a certaines choses qui peuvent clairement se dire que par l'écriture. Parce qu'il y a certaines réalités qui ne peuvent mieux se comprendre que quand on les a lues.

Toute histoire commence un jour, quelque part. Celle-ci débute quand j'arrive chez cette dame. Elle m'a vu venir dans sa maison, vide et sans forme. Elle m'a donné mes premiers habits, m'a recommandé auprès de ses serviteurs pour qu'ils prennent soins de moi comme il convient. C'est elle qui m'a montré où je devais déposer ma tête, m'a enseigné les prestances du palais... Je lui dois toutes mes bonnes manières.

Quelques jours plus tard, j'ai commencé à prendre un peu de forme. Mon sourire avait de plus en plus d'éclats. Ma diction s'était améliorée. Mes biceps et pectoraux pouvaient apparaitre. Les gens avaient désormais la chance de bien me voir, bien percevoir un bon homme qui avait dès lors une belle stature. Je pouvais désormais me sentir convenablement à l'aise dans mes accoutrements. Disons que j'étais devenu beau et attirant. Tous ces soins à mon égard, je les dois à cette femme et à son mari!

Seulement, il va se faire que, dans la suite, je ne vais plus rien comprendre... Cette femme a commencé à avoir un béguin pour moi. Moi son ramassé, ce petit sale du hier, celui qu'elle a elle-même donné forme.
Son mari qui est mon chef et qui joue le rôle de mon père, avait su laisser tout sous ma responsabilité d'autant qu'il a fini par me faire confiance en me voyant bien grandir dans sa maison. Il m'avait ainsi donné l'aval sur tout, sauf pour ce qui est de toucher à sa femme. Cette dernière semble avoir perdu la tête. Réalise-t-elle vraiment sa folie? Il faut que je l'accuse; que je rapporte à son mari qu'elle me fait des avances... Mais une seconde, son mari me croirait-il sur parole?

J'étais en train d'y réfléchir quand son mari va rentrer dans la parcelle. Il revenait fatigué de son boulot. Moi j'étais déjà de l'autre côté de la rue parce que je devais fouir les avances lassantes de sa femme.

Elle essayait de me convaincre que j'avais déjà de l'âge et qu'on pouvait aller ensemble. Ce qui était tout le contraire de mes convictions. Car d'où je viens, c'est un principe incontournable que d'honorer la femme. Je peux encore me commémorer le souvenir de mes frères biologiques qui détruisirent jadis toute une tribu parce qu'un fils de là avait abusé de notre sœur cadette; la seule que mon père avait.

Ce que ma patronne ne comprenait pas, c'est que je devais coute que coute la respecter.

J'avais donc du respect pour mes convictions, pour mon chef, pour sa femme et de ce fait, je ne devais pas me compromettre.

Elle, elle a fini par se rendre compte de ma détermination à tenir ferme, à ne pas se laisser aller par un plaisir instantané... puis s'est imaginée tout de suite que je devenais une menace pour son couple, que j'allais l'accuser chez son mari, que celui-ci pourrait la répudier pour ses intentions sombres. C'est ainsi qu'elle me devança. Elle partit voir son pauvre mari , pour lui dire que c'est bien moi qui voulais abuser d'elle.

A cet instant précis, elle a oublié ma misère, comment j'ai souffert pour arriver dans sa maison... Elle n'a pas considéré que j'avais dès le départ un cœur blessé des déceptions passées; elle n'a pas vu que ses mensonges à mon égards pouvaient m'anéantir deux fois plus.

Quel sort m'attend sur cette terre étrangère? Ai-je pêché d'avoir refusé son indigne proposition? La franchise et l'honneur ne payent-ils plus chez les humains?

Monsieur a cru sa femme, son amour, sa fleur! Il n'avait pas d'autres choix que de la croire. Il a cru que je manquais de reconnaissance, que j'étais comme bon nombre des personnes qui oublient le bienfait à leur égard... Il a décidé le pauvre, de m'envoyer en prison.

J'aurais pour ma part souhaité que les cameras de surveillance qu'il y a dans sa maison soient en bon état pour qu'il voie lui-même la vraie version des faits! Pour qu'il se rende compte des mensonges de sa femme de manière à m'innocenter. Hélas, c'est depuis deux semaines que toute la domotique d'ici ne fonctionne pas convenablement.

En effet, il y a de ces temps dans la vie où on peut être seul contre tous à porter la vérité des faits dans son cœur. Pour l'instant, je ne sais pas exactement pourquoi le ciel me veut subir ce sort. Mais quelque part, je reste serein. Je me sens digne.

Toutefois, j'ai une chose qui me fait le plus mal au cœur; c'est quand j'entends de la prison où je suis, que cette femme se la raconte ici et là, essayant de prouver à tous combien je suis un type non avisé, lâche et peureux, ne comprenant rien de la vraie vie, du fait que je ne sais pas, selon elle, sauter sur les opportunités.

Elle raconte sans scrupule qu'elle m'avait offert l'amour, mais que j'étais lent à le saisir.

Eh bien, si pour elle, aimer rime avec le fait de prendre soin de quelqu'un avec des intentions secondaires dissimulées derrière la tête;
si pour elle aimer consiste à pousser l'autre à la compromission, au reniement de ses convictions profondes;
si pour elle aimer c'est tromper son mari pour quelque seconde avec un autre;
si pour elle aimer c'est développer une relation sombre qu'il est impossible de rendre officielle quelque soit le nombre de temps que l'on puisse disposer...
Si pour elle, la notion d'amour se résumerait à ce genre d'idées, je la comprendrais et prierais le ciel pour elle. Mais en même temps je souhaiterais ne rien savoir sur cet amour là.