Je choisis le bus 4.
4 parce que ça ressemble à un A, à peu de choses près, et parce que le A, je le connais bien puisqu’il est mon initiale. Je choisis aussi... [+]
La route s’étirait devant elle, ruban d’asphalte interminable qu’elle suivait depuis plus d’une heure déjà sous un soleil de plomb accablant. Il avait disparu alors qu’elle attendait son tour à la boulangerie. Volatilisé au volant de la Renault break, ne laissant sur le trottoir que son sac de voyage qui lui cassait désormais le dos.
Ils étaient partis un samedi matin très tôt pour éviter les embouteillages du 15 août. Partis sur un coup de tête.
Vers midi, ils avaient déjà rejoint Valence et une aire d’autoroute assaillie par les familles. Il y faisait une chaleur étouffante, ils avaient acheté un sandwich Daunat qu’ils avaient mangé à l’ombre d’un arbre puis étaient repartis, toutes vitres ouvertes. Elle luttait contre le vent qui s’engouffrait en bourrasques dans l’habitacle et emmêlait ses cheveux qui tournoyaient autour de son visage, elle ne voulait pas être trop décoiffée. Lui, tendait son bras gauche à l’extérieur de temps en temps pour se rafraîchir puis reprenait prudemment le volant. Parfois, en changeant de vitesse, il caressait le genou voisin de la main droite. Il parlait aussi sans discontinuer. Elle aurait été bien en peine de se souvenir de quoi. Mais avec le recul, et abstraction faite d’un léger malaise peut-être, elle pensait alors qu’ils étaient plutôt bien ensemble. Ils furent absorbés par les embouteillages en milieu d’après-midi mais l’air avait changé, subtilement. Un parfum d’iode leur faisait tourner la tête, émoustillait leurs sens. La côte était désormais toute proche.
Ils sortirent de l’autoroute A9 peu après Nîmes. Au moins pouvait-on à nouveau rouler un peu, les usagers étaient moins nombreux sur la route nationale. Elle guettait la mer à chaque virage, l’imaginant alors toute proche. Mais elle s’inquiétait aussi de l’indolence tranquille de son conducteur, de l’heure qui tournait : où allait-on passer la nuit ? Dans la voiture, répondait il, ou sur la plage pourquoi pas ? Son insouciance était excitante, communicative. Ils atteignirent la Grande Motte. Des bandes de jeunes gens arpentaient le port, semblant les attendre, les saluant d’exclamations accueillantes au pied des tours de bêton. La mer lui tendait enfin les bras. Renaud la saisit par la main et l’entraîna sur la plage. Ils posèrent leurs chaussures et goûtèrent l’eau tiède du bout de leurs orteils. Elle n’avait pas revu la Méditerranée depuis son enfance alors elle s’y enfonça jusqu’aux cuisses, relevant sa jupe. Elle calcula : oui, cela faisait dix ans. Les vagues l’éclaboussaient, il la rejoint dans l’eau, mouillant son short, il déposa un baiser furtif dans son cou. Son parfum léger couvrait l’odeur de la transpiration qui émanait de leurs corps. Elle le remercia plusieurs fois, émue. Il sourit et éclata de rire, ne sachant trop si elle parlait du voyage ou du baiser. Il lui dit qu’elle était très belle avec ses cheveux emmêlés qui sentiraient le sel ce soir. Elle rougit sans doute un peu.
Comme il était tard et qu’il ne voulait pas l’inquiéter, il reprit le volant sans se faire prier et ils finirent par trouver une petite chambre dans une auberge de Lunel. Il lut le soulagement sur son visage quand elle posa son sac sur le lit auquel elle ne prêta finalement que peu d’attention, si ostensiblement rassurée de ne pas passer la nuit à la belle étoile. La petite ville ne manquait pas de charme, ils purent y dîner simplement. Il continuait de parler beaucoup, elle était fatiguée et peinait à le suivre, encore davantage à lui répondre. De retour dans la chambre, elle demanda à utiliser la salle de bain la première et en ressortit rapidement, rafraîchie et simplement vêtue d’une chemise de nuit rouge à fines bretelles. C’était une jolie fille, au visage délicat et au corps harmonieux. Il avait envie d’elle depuis des mois déjà, il supposait qu’elle s’en doutait. Elle se glissa sous les drap. Lui, tel un félin, prenait son temps. Ca ne te dérange pas j’espère, je dors toujours nu ? Il la vit distinctement déglutir en haussant une épaule au-dessus des draps. Il portait encore un boxer bleu, était de belle constitution et paradait entre la salle de bain et son sac de voyage où il trouva sa serviette enfin. Elle patienta un peu jusqu’à entendre l’eau couler pour s’extirper du lit et tirer les rideaux. Il était près de vingt-trois heures, elle avait terriblement besoin de dormir. Les yeux mi-clos, elle le vit comme à travers des persiennes, juste sorti de la salle de bain quelques minutes plus tard et effectivement complètement nu. Le torse ferme, les épaules rassurantes et l’entrejambe en suspens, indécise, il se posta au bord du lit, beau mais perplexe, séparé d’elle par un territoire de non-dits. Elle fit mine de s’assoupir, il soupira, surpris. Il se glissa sous les draps, caressa son dos, la courbe de ses hanches et ses fesses à travers le tissus de sa chemise de nuit, elle ne bougea pas. Il lui dit qu’il avait envie d’elle mais elle dormait déjà.
Il se réveilla de bonne heure le premier. Il n’osa pas la déranger. Il s’habilla et sortit.
Lorsqu'elle ouvrit les yeux, il y avait une montagne de viennoiseries sur la table de chevet. Renaud la regardait avec un sourire. Tiens ma puce, dit-il en l’embrassant sur l’épaule. Elle pensa qu’il était étrange d’avoir pu dormir aussi paisiblement auprès d’un homme nu qui la désirait sans l’ombre d’un doute. Puis l’idée passa et elle dévora deux croissants en souriant. Il aimait la voir manger avec appétit et décida que cette journée serait la plus belle de leur séjour. De son côté, elle décida de profiter, tout simplement.
Ils quittèrent leur chambre assez tôt et arpentèrent la côte, déambulèrent main dans la main le long des ports, observant les bateaux de plaisance aller et venir. Il voulut la photographier, encore et encore, le visage balayé par les vents, le corps ruisselant des embruns déchiquetés par les brise lames de la digue. Elle était si jolie, fraîche et rayonnante. Il posait à son tour pour la photo sur les rochers, torse bombé, campé sur ses belles jambes musclées qu’il aurait rêvé d’entrelacer aux siennes. Elle le regardait comme une œuvre d’art et se demandait avec étonnement pourquoi ses sentiments pour lui étaient si légers et inconséquents, manquant si cruellement de substance. Pendant ce temps, il parlait encore et elle ne l’entendait toujours pas. Le vent soufflait ses mots au loin, ne lui laissant à elle que la perception sensuelle de ses bras autour de son corps, de sa cuisse contre la sienne.
Ils s’essayèrent aux fruits de mer. Elle gouta quelques bulots qu’il lui tendait sur sa fourchette. Du bout des lèvres, avec concentration et en mâchant consciencieusement. Il ne parvenait à détacher ses yeux de cette bouche rose qui s’étirait parfois en sourire. Ses joues rosissaient aussi de temps en temps, il trouvait cela charmant. Ses silences cependant l’intimidaient alors il discourait sans cesse pour atténuer son inconfort. Pourtant il aurait préféré se taire.
Je vais t’embrasser, susurra-t-il à son oreille en sortant du restaurant, rendu téméraire par un verre de vin et mû par le besoin d’en découdre enfin. Alors, à sa surprise, elle se retourna franchement vers lui, lasse des malaises et soucieuse d’en finir également, et elle plaqua ses lèvres contre les siennes avec douceur et conviction. Il en fut chaviré, le corps en émoi, le souffle court et les jambes flageolantes. Que l’attente puisse prendre fin si simplement balayait toutes ses certitudes. Mais Florence s’évapora entre ses bras lorsqu’il voulut l’attirer contre lui.
Ils rentrèrent le soir même, comme prévu. Elle le remercia sans cesse pendant qu’il conduisait, il trouvait cela touchant mais un peu excessif. Le trajet était long alors souvent, il touchait son genou de sa main droite, caressait sa joue, intégrait son prénom dans ses soliloques. Il s’inventait un souvenir de ce voyage, un souvenir différent et torride en riant aux éclats dans l’habitacle. Il évoquait aussi les nuits à venir à ses côté, des nuits qui mettraient le sommeil en défaut. Tu dormiras nue aussi, bien sûr, disait-il. Sur l’aire d’autoroute, il la regarda fixement et lui déclara que ses yeux étaient les plus beaux au monde. Bleu, gris parfois, ourlés de tons cuivrés. Il lui jeta au visage, telle une gifle, tout son amour : tu es la femme de ma vie, nous serons si heureux ensemble.
Elle se taisait et lui parlait toujours.
Juste avant d’arriver, au sortir de l’autoroute, elle jugea bon de lui faire savoir qu’elle ne l’aimait pas.
Il lui demanda alors d’acheter du pain pour le petit déjeuner et la laissa sur le parking.
Ils étaient partis un samedi matin très tôt pour éviter les embouteillages du 15 août. Partis sur un coup de tête.
Vers midi, ils avaient déjà rejoint Valence et une aire d’autoroute assaillie par les familles. Il y faisait une chaleur étouffante, ils avaient acheté un sandwich Daunat qu’ils avaient mangé à l’ombre d’un arbre puis étaient repartis, toutes vitres ouvertes. Elle luttait contre le vent qui s’engouffrait en bourrasques dans l’habitacle et emmêlait ses cheveux qui tournoyaient autour de son visage, elle ne voulait pas être trop décoiffée. Lui, tendait son bras gauche à l’extérieur de temps en temps pour se rafraîchir puis reprenait prudemment le volant. Parfois, en changeant de vitesse, il caressait le genou voisin de la main droite. Il parlait aussi sans discontinuer. Elle aurait été bien en peine de se souvenir de quoi. Mais avec le recul, et abstraction faite d’un léger malaise peut-être, elle pensait alors qu’ils étaient plutôt bien ensemble. Ils furent absorbés par les embouteillages en milieu d’après-midi mais l’air avait changé, subtilement. Un parfum d’iode leur faisait tourner la tête, émoustillait leurs sens. La côte était désormais toute proche.
Ils sortirent de l’autoroute A9 peu après Nîmes. Au moins pouvait-on à nouveau rouler un peu, les usagers étaient moins nombreux sur la route nationale. Elle guettait la mer à chaque virage, l’imaginant alors toute proche. Mais elle s’inquiétait aussi de l’indolence tranquille de son conducteur, de l’heure qui tournait : où allait-on passer la nuit ? Dans la voiture, répondait il, ou sur la plage pourquoi pas ? Son insouciance était excitante, communicative. Ils atteignirent la Grande Motte. Des bandes de jeunes gens arpentaient le port, semblant les attendre, les saluant d’exclamations accueillantes au pied des tours de bêton. La mer lui tendait enfin les bras. Renaud la saisit par la main et l’entraîna sur la plage. Ils posèrent leurs chaussures et goûtèrent l’eau tiède du bout de leurs orteils. Elle n’avait pas revu la Méditerranée depuis son enfance alors elle s’y enfonça jusqu’aux cuisses, relevant sa jupe. Elle calcula : oui, cela faisait dix ans. Les vagues l’éclaboussaient, il la rejoint dans l’eau, mouillant son short, il déposa un baiser furtif dans son cou. Son parfum léger couvrait l’odeur de la transpiration qui émanait de leurs corps. Elle le remercia plusieurs fois, émue. Il sourit et éclata de rire, ne sachant trop si elle parlait du voyage ou du baiser. Il lui dit qu’elle était très belle avec ses cheveux emmêlés qui sentiraient le sel ce soir. Elle rougit sans doute un peu.
Comme il était tard et qu’il ne voulait pas l’inquiéter, il reprit le volant sans se faire prier et ils finirent par trouver une petite chambre dans une auberge de Lunel. Il lut le soulagement sur son visage quand elle posa son sac sur le lit auquel elle ne prêta finalement que peu d’attention, si ostensiblement rassurée de ne pas passer la nuit à la belle étoile. La petite ville ne manquait pas de charme, ils purent y dîner simplement. Il continuait de parler beaucoup, elle était fatiguée et peinait à le suivre, encore davantage à lui répondre. De retour dans la chambre, elle demanda à utiliser la salle de bain la première et en ressortit rapidement, rafraîchie et simplement vêtue d’une chemise de nuit rouge à fines bretelles. C’était une jolie fille, au visage délicat et au corps harmonieux. Il avait envie d’elle depuis des mois déjà, il supposait qu’elle s’en doutait. Elle se glissa sous les drap. Lui, tel un félin, prenait son temps. Ca ne te dérange pas j’espère, je dors toujours nu ? Il la vit distinctement déglutir en haussant une épaule au-dessus des draps. Il portait encore un boxer bleu, était de belle constitution et paradait entre la salle de bain et son sac de voyage où il trouva sa serviette enfin. Elle patienta un peu jusqu’à entendre l’eau couler pour s’extirper du lit et tirer les rideaux. Il était près de vingt-trois heures, elle avait terriblement besoin de dormir. Les yeux mi-clos, elle le vit comme à travers des persiennes, juste sorti de la salle de bain quelques minutes plus tard et effectivement complètement nu. Le torse ferme, les épaules rassurantes et l’entrejambe en suspens, indécise, il se posta au bord du lit, beau mais perplexe, séparé d’elle par un territoire de non-dits. Elle fit mine de s’assoupir, il soupira, surpris. Il se glissa sous les draps, caressa son dos, la courbe de ses hanches et ses fesses à travers le tissus de sa chemise de nuit, elle ne bougea pas. Il lui dit qu’il avait envie d’elle mais elle dormait déjà.
Il se réveilla de bonne heure le premier. Il n’osa pas la déranger. Il s’habilla et sortit.
Lorsqu'elle ouvrit les yeux, il y avait une montagne de viennoiseries sur la table de chevet. Renaud la regardait avec un sourire. Tiens ma puce, dit-il en l’embrassant sur l’épaule. Elle pensa qu’il était étrange d’avoir pu dormir aussi paisiblement auprès d’un homme nu qui la désirait sans l’ombre d’un doute. Puis l’idée passa et elle dévora deux croissants en souriant. Il aimait la voir manger avec appétit et décida que cette journée serait la plus belle de leur séjour. De son côté, elle décida de profiter, tout simplement.
Ils quittèrent leur chambre assez tôt et arpentèrent la côte, déambulèrent main dans la main le long des ports, observant les bateaux de plaisance aller et venir. Il voulut la photographier, encore et encore, le visage balayé par les vents, le corps ruisselant des embruns déchiquetés par les brise lames de la digue. Elle était si jolie, fraîche et rayonnante. Il posait à son tour pour la photo sur les rochers, torse bombé, campé sur ses belles jambes musclées qu’il aurait rêvé d’entrelacer aux siennes. Elle le regardait comme une œuvre d’art et se demandait avec étonnement pourquoi ses sentiments pour lui étaient si légers et inconséquents, manquant si cruellement de substance. Pendant ce temps, il parlait encore et elle ne l’entendait toujours pas. Le vent soufflait ses mots au loin, ne lui laissant à elle que la perception sensuelle de ses bras autour de son corps, de sa cuisse contre la sienne.
Ils s’essayèrent aux fruits de mer. Elle gouta quelques bulots qu’il lui tendait sur sa fourchette. Du bout des lèvres, avec concentration et en mâchant consciencieusement. Il ne parvenait à détacher ses yeux de cette bouche rose qui s’étirait parfois en sourire. Ses joues rosissaient aussi de temps en temps, il trouvait cela charmant. Ses silences cependant l’intimidaient alors il discourait sans cesse pour atténuer son inconfort. Pourtant il aurait préféré se taire.
Je vais t’embrasser, susurra-t-il à son oreille en sortant du restaurant, rendu téméraire par un verre de vin et mû par le besoin d’en découdre enfin. Alors, à sa surprise, elle se retourna franchement vers lui, lasse des malaises et soucieuse d’en finir également, et elle plaqua ses lèvres contre les siennes avec douceur et conviction. Il en fut chaviré, le corps en émoi, le souffle court et les jambes flageolantes. Que l’attente puisse prendre fin si simplement balayait toutes ses certitudes. Mais Florence s’évapora entre ses bras lorsqu’il voulut l’attirer contre lui.
Ils rentrèrent le soir même, comme prévu. Elle le remercia sans cesse pendant qu’il conduisait, il trouvait cela touchant mais un peu excessif. Le trajet était long alors souvent, il touchait son genou de sa main droite, caressait sa joue, intégrait son prénom dans ses soliloques. Il s’inventait un souvenir de ce voyage, un souvenir différent et torride en riant aux éclats dans l’habitacle. Il évoquait aussi les nuits à venir à ses côté, des nuits qui mettraient le sommeil en défaut. Tu dormiras nue aussi, bien sûr, disait-il. Sur l’aire d’autoroute, il la regarda fixement et lui déclara que ses yeux étaient les plus beaux au monde. Bleu, gris parfois, ourlés de tons cuivrés. Il lui jeta au visage, telle une gifle, tout son amour : tu es la femme de ma vie, nous serons si heureux ensemble.
Elle se taisait et lui parlait toujours.
Juste avant d’arriver, au sortir de l’autoroute, elle jugea bon de lui faire savoir qu’elle ne l’aimait pas.
Il lui demanda alors d’acheter du pain pour le petit déjeuner et la laissa sur le parking.