Telles des ampoules grillées

Toute histoire commence un jour, quelque part et peut marquer indélébilement tout un être, toute une génération, toute une vie. Pour les uns, au cours de leur existence, de belles histoires s'alternent avec des mauvaises tandis que pour d'autres, il n'y a jamais eu de belles histoires depuis leur naissance. Telles des ampoules grillées, ainsi est leur vie.Michael était de ceux-là. Le bonheur avait toujours une longueur d'avance sur lui. On dirait que les intenses douleurs de la vie lui étaient exclusivement réservées. Destin ou malédiction?Nul ne le sait.
Cependant, il ne se laissait jamais abattre par les événements de la vie. Orphelin de père et de mère puis veuf, Michael sait plus que quiconque que la vie est pleine d'écueils, de méchancetés et de souffrance.
Malgré les circonstances douloureuses qu'il traverse, il était heureux. Sa seule source de bonheur était Sandrine, la fille que Dieu lui donna en échange de Gloria, sa femme. Cette dernière est décédée le même jour qu'elle mettait au monde Sandrine. Une vie en échange d'une autre,disait Michael lors des obsèques de sa charmante épouse.
Depuis ce jour,Michael n'a d'yeux que pour sa fille. À cause d'elle, il peut déplacer,à lui seul,le mont Kilimandjaro ou même traverser,à pieds,la mer Rouge.
Mais il y a des jours où des événements surgissent et font basculer toute une existence,des jours où l'homme,face à une situation,sent son âme se séparer de son corps bien qu'étant encore vivant. Michael se trouve, malheureusement,confronté à cette situation.
Lundi matin, précisément à huit heures,sous un léger vent qui soufflait, Michael n'a pu empêcher des gouttes de larmes tièdes deferlées de sa joue émaciée. Depuis trois jours, il est assis là, sous ce grand arbre feuillus planté au milieu de la cour de l'hôpital,pensif, la tête tantôt prise entre deux mains, tantôt posée sur les avant-bras repliés, entrain de regarder,d'un air pitoyable, l'individu qui sanglotait sur une natte,devant lui. Trois jours, sans fermer les yeux et le jour et la nuit, pour veiller de près sur cet être tant aimé, qui gît devant lui. Que faire lorsque les amis et les frères ne t'assistent pas quand tu as le plus besoin d'eux? Que faire lorsque les médecins, qui sont censés sauver des vies se résignent d'accomplir leur devoir parce qu'il faut d'abord que les malades payent l'intégralité des soins? Michael se creuse le cerveau pour trouver une solution. Rien du tout. Lorsqu'il leva la tête, il aperçut un médecin en pleine discussion avec des infirmiers. Il se leva, précipita ses pas avec la dernière énergie du désespoir et rejoignit le groupe.
- Docteur je vous en prie, sauvez ma fille sinon elle va mourir.lanca-t-il tout en essayant d'essuyer par le revers de sa main les larmes qui coulait à flots de ses yeux comme l'eau qui ruisselait d'une rivière.
-Vous êtes encore ici monsieur? Il n'y a que Dieu qui sauve,moi je soigne et pour ça, vous devez payer.repondit ironiquement le médecin.Je vous en prie, ayez pitié d'elle, repris Michael.
- Priez beaucoup monsieur, lui suggère un infirmier et les autres éclataient de rire.
Une dame qui sortait de la salle d'attente, prit part à toute cette conversation et demanda à Michael de le suivre.
-Bonjour monsieur, j'ai appris que vous êtes ici depuis trois jours avec votre fille malade et vous n'avez bénéficié d'aucun soins faute d'argent. Je m'engage à payer les frais médicaux de votre fille,dit-elle.
- Madame,je ne sais comment vous remercier. Vous venez de me ramener à la vie,reprit Michael en s'agenouillant devant la dame.
-Remercier Dieu monsieur et hâtez vous d'amener votre fille dans la salle de soins.
À peine eut-elle finit de parler que Michael partit en courant vers sa fille. Lui qui tout à l'heure se demandait comment faire pour sauver la vie de son unique enfant, il venait d'avoir, comme une manne venue du ciel, la réponse à sa préoccupation.
Il prit sa fille dans ses bras et répartit en courant à grande vitesse vers les services d'urgences. Arrivé au seuil de la salle, il se rendit compte que ce qu'il portait dans son bras n'est rien d'autre qu'un corps qui ne respire plus, un corps sans vie. Ainsi, la fille tant aimée s'en est allée au delà de l'au-delà.