Suis-je descendue du ciel ou remontée des enfers ?

« Moi je suis différente. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais une extra-terrestre.» Une aliénée... Comprise entre la sotte et l'incapable. Elle me répétera toute ma vie : « pourquoi n'es-tu pas comme les autres enfants ?! Qu'ai-je fait au bon dieu pour te mériter ! ». Alors qu'est-ce que je suis ? À mes yeux je n'ai rien d'anormal, quand je dialogue je suis polie, quand je rouspète je n'hausse pas le ton et quand je suis triste je me tais. Vous penseriez que je ressemble surement à un monstre mais rien de la sorte, je n'ai ni queue ni corne, ni ailes ni crocs... Un corps banal, pour un être banal. Une « n'importe qui », discrète et sans âme... Drôle d'expression pour ceux qui telle ma personne ne savent d'où ils viennent. Vous songeriez plutôt à l'idée de l'enfant rebelle, désobéissante et solitaire... toujours dans son coin ne disant un mot, ne parlant à qui que ce soit sauf que là aussi que nenni. Alors qu'est-ce que je suis ?
Bercée dans les bras de sa mère, une bambine somnole, sa minuscule main levée vers sa génitrice, elle semble communiquer. Accaparée par tant de tendresse, elle resta de marbre, aucun sourire de la mère aucune réaction, plus que pensive elle avait l'air hésitante. Qu'avait-elle ?... un blues ?... Un instant plus tard, la nourrissonne inconsciente et mise au berceau, cette marâtre se raidit accoudée au bord, elle pâlit son regard vide prit un tournent de regret. Elle s'éloigna lentement comme exténuée disparaissant dans l'obscurité de la pièce.
Cette enfant une fois en âge de parler, jouait seule dans le jardin. Tout d'un coup, on entendit des cris plus loin provenant de la maison, s'en suivirent des sons de projectiles qui finirent par un BAM assourdissant... notre petit-être intrigué s'approcha de la porte-fenêtre où il entrevit sa mère gisant par terre inanimée, une silhouette la surmontant à quatre pattes, l'enfant ne pouvait voir qu'était-ce si ce n'est de petits yeux glaçants sans une lueur d'humanité ni de sentiments. ‘Ma maman est attaquée par un monstre !' pensa l'enfant apeurée. Ne savant quoi faire celle-ci était figée, mains et jambes tremblotantes...ce moment ne dura qu'une fraction de seconde avant que l'homme ne déguerpit l'air de rien.
Souvenirs traumatisants se multiplièrent, ni une ni deux, cet homme revenait sans cesse, pourtant maman ne voulait expliquer. ‘C'est surement un vampire ou un fantôme, il l'a hypnotisé !', devint le schéma de pensée du bout-de-chou, Il fallait qu'elle agisse ! Qu'elle la protège ! Pourtant elle n'arrivait même pas à sortir le confronter tellement celle-ci en avait les chocottes... Un jour elle se prépara casque et bâton elle protégera sa mère coûte que coûte ! Elle attendit toute la journée, sauf qu'hélas plus d'apparition depuis, plus de bruit, cette personne s'est évaporée. Youpi ! Maman est sauve.
La fillette grandit aux côtés d'une mère absente, souvent le regard vide. Dans son journal intime elle nota « depuis que le monstre est parti maman n'est plus la même, elle ne m'aime plus. Il lui a surement volé son esprit et son cœur». Cette obsession à la protéger alors que petite était-elle, se transforma en rancune d'abandon. Leur relation mère-fille se dégradera d'année en année. Quelle ironie.
Elle deviendra jeune-fille, timide, peu confiante voire malaimée. Renfermée, elle ne conteste plus car elle a compris. Elle apprit le secret sordide et sur cela elle s'assagit. Pauvre femme dont la maternité fut souillée.
Mère, Je suis pour toi le démon de tes cauchemars, le visage de ton tortionnaire. Le seul lien qui te rattache à l'enfer de ton passé. Pardonne-moi seulement d'exister et de te rappeler à ce jour que tes chaînes n'ont pas été brisées. Malgré tout crois moi je veillerai sur toi et te défendrai jusqu'à ton dernier souffle. Je te le promets. Puisses-tu un jour me considérer comme ton ange gardien et me sacrer de ton amour.
Je ne ressemble pas à un monstre de film d'horreur mais à plus terrifiant! Mon père.