Qu’il est compliqué d’avoir une écriture intelligente quand on parle de
Saint-Valentin.
A la fois sèche de toute mièvrerie rose bonbon, et détachée du « réactionnariat »
... [+]
La pause déjeuner est tellement différente.
La majorité des employés travaillent ici depuis 5, 10, 15 parfois 20 ans.
Pour avoir pas mal crapahuté dans les centres d’appels nantais, je peux vous dire que c’est vraiment une exception.
Je suis le seul homme autour de la grande table bleue, dans la salle de pause.
Il y a huit femmes.
Hormis le petit bébé de 23 ans qui a été embauché en même temps que moi et la stagiaire, toutes ont passé la quarantaine.
Certaines culminent certainement à soixante balais.
Quand vient le moment de sortir sa gamelle, ça a vraiment gueule.
On dirait un concours du meilleur tupperware.
L’ une sort sa ratatouille. Elle sent hyper bon. Elle a dû y foutre de l’ambroisie, c’est pas possible autrement. S’en échappe une de ces odeurs gourmandes qui ne naissent que dans les marmites des mamans.
Une autre sort une boîte blindée de « fraises du jardin ».
Elle me propose d’en goûter une.
Avec plaisir.
Elles sont HY-PER sucrées.
_J’en ai soixante-dix pieds. Ils sont tous chargés. Je ne sais pas quoi en foutre.
Dans un élan d’altruisme, je me propose de la débarrasser du superflu.
Tope-la.
J’ai désormais un dealer de gariguettes. Jacqueline.
J’ l’appelle affectueusement Mamie.
Elle est trop intelligente, affable et humble pour se vexer. Mamie, dans ma bouche, c’est un titre de noblesse.
Jacqueline l’a compris. On se capte 5 sur 5 avec mamie.
Je pourrais goûter à tous les plats, mais je sais d’avance que tous sont savoureux.
J’la ramène pas trop avec ma salade à la con. J’rivalise pas. Je me contente de brouter et de les écouter blablater.
J’me sens bien autour de ces femmes.
Ces dames.
Tout a une autre gueule que dans ces open-space bardés de décérébrées, de jeunes mamans qui pètent les couilles avec leurs mioches, de déchues de la capitale qui reviennent en « province » ( dieu, que je hais ce mot ! Province ! Genre il faut un terme pour définir « tout ce qui n’est pas Paris »), de gamines qui ont rien branlé à l’école et qui s’échouent dans un call center...
Ici, tout a un charme. Une histoire. Un âge.
Même quand elles grommelent contre la hiérarchie...
_Tu devrais congeler tes fraises en les roulant dans du sucre avant. Et tu peux les servir décongelées et sucrées ou en faire un coulis ou du sirop.
La doyenne à parlé.
Tu crois qu’une petite pouf de 20 piges aurait pu te donner une astuce pareille ?
Mamie pèse.
Elle est dans le cooking game.
Même leur vannes pourries m’attendrissent :
_Miiince. Je me suis fait une tâche. Pistache
_Mais c’est pas toi qui doit le dire, pistache, voyons, Jacqueline.
_Ha bon, je le dis tout le temps, moi.
Je pouffe comme un con. Comme un gamin.
Il va être 13h30. La pause est fini.
Plus que l’après-midi et enfin, le week-end.
La majorité des employés travaillent ici depuis 5, 10, 15 parfois 20 ans.
Pour avoir pas mal crapahuté dans les centres d’appels nantais, je peux vous dire que c’est vraiment une exception.
Je suis le seul homme autour de la grande table bleue, dans la salle de pause.
Il y a huit femmes.
Hormis le petit bébé de 23 ans qui a été embauché en même temps que moi et la stagiaire, toutes ont passé la quarantaine.
Certaines culminent certainement à soixante balais.
Quand vient le moment de sortir sa gamelle, ça a vraiment gueule.
On dirait un concours du meilleur tupperware.
L’ une sort sa ratatouille. Elle sent hyper bon. Elle a dû y foutre de l’ambroisie, c’est pas possible autrement. S’en échappe une de ces odeurs gourmandes qui ne naissent que dans les marmites des mamans.
Une autre sort une boîte blindée de « fraises du jardin ».
Elle me propose d’en goûter une.
Avec plaisir.
Elles sont HY-PER sucrées.
_J’en ai soixante-dix pieds. Ils sont tous chargés. Je ne sais pas quoi en foutre.
Dans un élan d’altruisme, je me propose de la débarrasser du superflu.
Tope-la.
J’ai désormais un dealer de gariguettes. Jacqueline.
J’ l’appelle affectueusement Mamie.
Elle est trop intelligente, affable et humble pour se vexer. Mamie, dans ma bouche, c’est un titre de noblesse.
Jacqueline l’a compris. On se capte 5 sur 5 avec mamie.
Je pourrais goûter à tous les plats, mais je sais d’avance que tous sont savoureux.
J’la ramène pas trop avec ma salade à la con. J’rivalise pas. Je me contente de brouter et de les écouter blablater.
J’me sens bien autour de ces femmes.
Ces dames.
Tout a une autre gueule que dans ces open-space bardés de décérébrées, de jeunes mamans qui pètent les couilles avec leurs mioches, de déchues de la capitale qui reviennent en « province » ( dieu, que je hais ce mot ! Province ! Genre il faut un terme pour définir « tout ce qui n’est pas Paris »), de gamines qui ont rien branlé à l’école et qui s’échouent dans un call center...
Ici, tout a un charme. Une histoire. Un âge.
Même quand elles grommelent contre la hiérarchie...
_Tu devrais congeler tes fraises en les roulant dans du sucre avant. Et tu peux les servir décongelées et sucrées ou en faire un coulis ou du sirop.
La doyenne à parlé.
Tu crois qu’une petite pouf de 20 piges aurait pu te donner une astuce pareille ?
Mamie pèse.
Elle est dans le cooking game.
Même leur vannes pourries m’attendrissent :
_Miiince. Je me suis fait une tâche. Pistache
_Mais c’est pas toi qui doit le dire, pistache, voyons, Jacqueline.
_Ha bon, je le dis tout le temps, moi.
Je pouffe comme un con. Comme un gamin.
Il va être 13h30. La pause est fini.
Plus que l’après-midi et enfin, le week-end.