Moi, mes convictions et ses contradictions

Anthropologue. Sociologue. Poète par accident. Amoureux de la satire. Mon slogan: <<#JeCogneParLesMots.>>

Toute histoire commence un jour, quelque part dit-on ! Mais la mienne se répète tous les jours, dans ma tête. Ce jour-là, ces mots ne cessaient de danser encore sur un rythme hardcore, encore et encore. Silencieuse était leur danse, les maux dans ma tête faisaient une fête. Au fond de moi, je me disais qu’avec ce pays, nos difficultés n’ont jamais eu une conclusion. Les discours sont souvent centrés autour de l’exclusion. L’autre, pour nous est celui qui sème confusion, avec lui, aucune possibilité de réunion. On chante unité publiquement mais en privé, nous sommes des adeptes de la division. C’est pourquoi quand on dit « nation », elle se moque de nous cette notion. Comme le dit la citation: « il n’y a pas plus aveugle que celui qui refuse de voir », reste à savoir si vraiment il refuse de voir ou bien s’il refuse d’accepter ce qu’il a pu voir. Bon, moi, j’ai ma philosophie et c’est celle-ci: « il n'y a pas plus hypocrite et minable que celui qui se rebelle contre ses propres frères en disant obéir à des valeurs qui favorisent les autres au détriment des siens. Il agit comme un fou contre ses propres frères et satisfait l'autre, il pense être objectif, non! L'objectivité, ce n'est pas oser dire la vérité avec les siens, oser les corriger tout en se taisant sur les bavures des autres. C'est être au juste milieu en militant pour l'absolue vérité qui n'a pas d'appartenance ethnique moins politique. Aujourd'hui, plus que jamais on a besoin des jugements débarrassés de la sélectivité aveugle soient-ils venant de la société tout comme ceux venant de l'institution chargée d'assurer la justice pour tous. Ce n'est pas tout de même impartial le fait de s'attaquer aux autres seulement dans le sens de faire plaisir aux siens. C'est aveugle cette attitude! Et si on élevait au-dessus de tous, un nouveau « nous ». Un « nous » élargi qui fait appel à chacun. Seul avec cette option, on pourra vaincre, mais quand de l'intérieur on se combat, on se hait et que tous nos discours se limitent seulement aux attaques et contre-attaques non constructifs, nous allons continuer à traîner toujours en arrière tout en observant les autres avancer.
Il n'y a pas plus haineux que celui qui abâtardit le sien à cause de son choix ou orientation politique. Il est important de noter que nous [Guinéens] ne sommes pas suffisamment prêts pour faire la vraie politique. Nous sommes fragiles, sensibles et très faciles pour être manipulés, car même des apprentis politiques savent comment exploiter nos points faibles pour nous berner. Nous voyons la vérité et nous connaissons bien la vérité, mais on a peur de la dire. Nous avons peur des stigmatisations que l’on n’évite tout de même pas. La vérité est qu'il faut qu'on soit unit pour faire un bloc contre les vendeurs d'illusions et les politiques malveillants. Il faut que le changement que nous réclamions vienne de nous!
Il est à retenir qu'aujourd'hui, il y a des ethnocentristes qui sont contre leur propre ethnie et des ethnocentristes qui sont contre les autres ethnies, toutes ces deux formes doivent être combattues pour instaurer une nouvelle donne qui prendra en compte chacun selon ses capacités intrinsèques et non selon son physique ou son appartenance ethnique.»
Dis-moi, maintenant, quand je te parle, vas-tu écouter ce que je te dis ou bien vas-tu regarder ma tronche avant de me répondre ?
Et moi qui pensais que tous ceux qui supposaient être mes amis savaient que je marche sur la base de cette philosophie, j’ai été surpris de recevoir l’appel d’un prétendu ami. C’était un Samedi, vers la soirée, mon téléphone sonne, je reçois l’appel d’un ami qui m’avait déjà rendu visite, avec qui j’avais fait la même fac. Il me dit:
-Mon frère comment vas-tu ?
Moi: perplexe, je n’avais pas reconnu le numéro. Je lui ai laissé parler pour éviter de paraitre impoli.
Lui: je voudrai t’inviter au lancement d’une ONG qui œuvre pour le développement mais surtout pour l’entreprenariat jeune.
J’étais content, pensant que voici un jeune dynamique, engagé, avec qui je pourrai partager des idées pour faire bouger les lignes. On a fixé un programme, une rencontre le week-end qui suivait. Le Samedi, matin de bonne heure, mon téléphone sonne encore, le même numéro.
Lui: c’est moi frère, c’est pour te rappeler qu’on a une rencontre demain, et même le gouvernement va nous soutenir, nous allons nous faire du blé. Je compte sur ta présence. Ça se passe à Matoto .
Moi: comme je t’ai promis, j’y serai. C’est où même la rencontre. Parce que tu ne m’as parlé que de Matoto.
Lui: c’est au siège du R.P.G de Matoto.
Ce jour, je n’avais qu’une modique somme qui ne pouvait me faire que 5 litres. J’ai ainsi carburé, j’ai pris des personnes en partant jusqu’au carrefour (camp carrefour). J’ai cherché à me garer à côté de la clôture de l’aéroport. Ensuite, je l’ai appelé.
Moi: comment vas-tu frère, je suis juste au carrefour.
Lui: remonte et demande où se trouve le siège du R.P.G.
J’ai demandé, j’ai trouvé le lieu non loin du carrefour. Moi qui m’attendait au lancement d’une ONG, j’ai été surpris d’entendre mon ôte me dire que dès que tu es là « tu es désormais du R.P.G », j’étais perturbé et complètement désorienté. Bien que, dès qu’il m’a dit au siège du R.P.G qui est le parti au pouvoir en Guinée, j’étais déboussolé. Je me disais comment peut-on faire le lancement d’une O.N.G au siège d’un parti politique, cela me paraissait un peu maladroit. Arrivée, j’ai quand même essayé de me maintenir bien qu’étant inconfortable, énervé, je n’ai pas laissé cette colère paraitre, je l’ai laissé parler après que nous nous somme salués...il racontait tout et n’importe quoi et moi d’une colère intérieure, ses paroles me choquaient, à chaque fois qu’il ouvrait sa bouche, c’est comme s’il marchait sciemment sur une de mes plaies qu’il a lui-même causé. Je me sentais trahi, manipulé, je me disais mais pourquoi ce mec m’a téléporté ici pour une affaire d’O.N.G dans l’enceinte du siège d’un parti. Peu à peu, mes doutes commençaient à se confirmer. Peu de temps après, nous sommes rentrés dans la salle de conférence et on a commencé un bavardage basé totalement sur du fric et sur des raccourcis qui pouvaient nous mener à celui-ci.
Notre ôte à nous tous, le célèbre bavard qui veut briller par une éloquence bancale prend la parole. Ce têtu qui se prenait pour un lucide se présente et commence un long, ennuyeux et redondant discours. Ce qui est ridicule, il ne cessait de repéter qu’il est « différent des autres » et que le mouvement qu’il veut lancer fera profiter chacun de nous flanqué dans cette salle dans son projet personnel. Je le voyais en vendeur de rêves, il avait pourtant confiance en moi mais il savait aussi que j’avais des convictions. « Je ne marche pas sur les combines des politiques ». Je suis plus que pessimiste dans le sens de croire que parmi les politiques, il y a un qui veuille nous aider. Il disait ceci « on ne peut pas rouler avec l’opposition, c’est le pouvoir qui a l’argent, il faut travailler avec eux, si toute fois l’opposition aussi prend le pouvoir, on continue avec eux aussi.» Des gens dans la salle étaient partagés entre rassurés et pessimistes, mais les pessimistes, je crois bien se résumaient à un seul individu, Moi. J’étais cet obstiné qui était assis juste à côté de lui qui n’était pas du tout rassuré. Quand je le regarde parler, je me demandais mais « est-ce que ce mec se voit ? Est-ce qu’il s’entend ? » Etait-il en train de dire que parmi les prostitués, il y a des saints ? Il disait que si nous réussissons avec le R.P.G, on pouvait seulement prendre l’argent et après voter pour qui on veut parce que selon lui personne n’allait nous suivre dans l’isoloir. C’est comme si notre conscience n’allait pas nous suivre vraiment. Mais comme sûrement, il avait réussi de corrompre sa conscience par des billets de banque qu’il n’a pas encore touché. Il voulait que nous fassions pareil. Il disait ceci:
-Ayez confiance en moi, je suis en contact avec un monsieur qui travaille à la présidence, il doit même nous rejoindre à la seconde réunion. Donc, n’ayez crainte, nous sommes sur une affaire sérieuse qui va nous rapporter gros. Vous savez tous comment ce pays fonctionne. Il faut juste être malin et l’argent et la gloire ne seraient pas loin de vous. Ce que je vous demande, c’est faire semblant de supporter ce pouvoir, après chacun de nous à côté ici a un but précis qu’il va chercher à atteindre. Nous tous, ce que nous voulons, c’est sortir de cette galère. Si je voulais par exemple seulement avoir de l’argent, il était facile pour moi d’attendre l’approche des élections de 2020, faire le tour des partis, soutenir chacun comme je l’ai fait en 2010. En 2010, j’ai pris de l’argent avec tous les partis politiques les promettant que j’allais voter pour eux, enfin, j’ai voté pour qui je voulais. Je vais vous dire une chose, je suis rpgiste moi, depuis un bout de temps. Je ne vous demande pas pour autant d’être des rpgistes, mais pour l’instant, je voudrai que vous vous considériez comme tels. Si vous avez écouté avec attention tout ce que j’ai dit, dans ce cas, chacun de vous peut à présent parler.
Je pensais que le leurre qui m’a attiré dans cette merde était le même qu’il a raconté aux autres qui étaient dans la salle. A mon fort étonnement, le premier intervenant pris la parole et commença un discours démagogique et élogieux:
-Je suis très content d’être là parmi vous, ce jeune, je le connais bien. Je suis venu ici à cause de lui. Sinon, je suis responsable de la jeunesse au sein de ce parti pour la commune de Matoto mais j’avais décidé de me retirer de la scène politique. C’est quand ce jeune m’a rencontré dans un café de la place, on a causé, il m’a convaincu et je me suis dit, cette fois c’était la bonne et qu’il était peut-être temps de revenir en politique. Ce qu’il nous a expliqué ici, c’est vrai, on peut bien se faire du blé avec un mouvement de soutien, je suis avec vous, je vous soutiens.
Mais moi, j’attendais encore quelqu’un qui avait une pensée comme moi, un pessimiste, mais malheureusement, je n’en ai pas trouvé. Les gens ont parlé à tour de rôle, les discours revenaient toujours à la même chose. Comme j’étais le seul qui pensait différemment. Pour ne pas paraitre fou dans cette salle de cons réunis, j’ai décidé de garder pour moi seule ma réaction qui serait vu comme conne par ces éclairés qui avaient besoin de lumières. Car, pour moi, ils parlaient développement mais en faisant passer en avant des combines malhonnêtes. En disant, ce pays a besoin de nous jeunes -comme si la jeunesse était un talent-...et après, dire que chacun de nous devrait soutenir le pouvoir juste pour se mettre plein les poches. Je trouvais dans ça une incohérence laide. Je ne me sentais pas bien avec cette assemblée réunie au tour d’un idéal pondu par précipitation par un gosse dont la galère n’a que trop rongé. Un bonhomme qui voulait d’un succès abrégé, qui confondait réussite et chute assurée. Celui qui résumait tout à avoir de l’argent et ce, même s’il fallait être un lèche-cul. Ce qu’il nous proposait était grossier. Il nous demandait d’être des lèche-bottes mais nous faisait la promesse en même temps que nous serons des lèche-bottes de luxe qui auront pour récompense une langue en or pour encore et encore mieux lécher. C’est cette idée justement qui me décourageait, me voir continuer à user de ma langue avec agilité pour faire bander de joie celui qui aime qu’on le félicite même quand il n’a rien fait me mettait mal à l’aise. Poliment, je demandais à mon ami au-revoir sous prétexte que j’avais une cérémonie à laquelle je devais assister. Je suis sorti de la salle, il m’a raccompagné et m’a dit:
-La semaine prochaine aussi y a réunion. Il y aura le chef de cabinet de la présidence parmi nous, je te contacterai. Je compte sur toi.
Moi, je ne voulais plus revenir sur cette rencontre qui était mon pire cauchemar, tout ce que je voulais, c’est de me séparer avec cet ami sans le vexer. Le mieux pour moi était donc de l’éviter. Pis, il ne comprenait pas mon langage du corps, il ne voyait pas que je n’avais pas envie de l’entendre, que je détestais ses idées. Je rentrai à la maison avec un cœur serré, ce qui m’a surtout énervé, c’est le mensonge qui m’a envoyé jusque là-bas. Je réfléchissais à présent sur le temps et l’argent perdu entre chez moi et ce lieu où on a tenu cette réunion haïssable. Je me disais qu’on a fait qu’écrire sur le sable de plage la plus belle des fables.