Le terrorisme, une guerre sans visage

Toute histoire commence un jour, quelque part. Suivant les pas de la marche du monde, notre immonde époque marque et terrifie. Notre humanité est déshumanisée. Pendant que l’enfant perd son innocence, la femme pleure et l’homme a peur. Notre monde est bouleversé : nous sommes en guerre ! Nos ennemis sont invisibles. Ce sont de grands artistes de la mort. Ils ne vivent plus, ils meurent en donnant la mort. Leur monde est autre, ce ne sont plus des humains : ils ont aussi fait de nous des êtres troublés.
Depuis quelques jours notre ville, Freeland est sous tension. Partout c’est la crispation. Les populations s’inquiètent. Et, les informations du journal télévisé ne rassurent guère. En ce mois d’Août, la sensation des vacances a laissé place à une atmosphère d’insécurité totale. Face à la gravité de la situation, les autorités de la ville n’ont pas hésité à décréter l’état d’urgence. Ainsi pouvait-on trouver dans presque toutes les rues de la ville des soldats prêts à réagir à toute éventualité. Tous les dispositifs sécuritaires ont été pris pour assurer la protection des freelandais. Afin de prévenir tout éventuel attaque, un couvre-feu fut même décrété dans toute la ville.
Cet après-midi, à la rue 5, un petit garçon d’environ sept ans se rapprochait dangereusement de l’un des barrages de l’armée. L’enfant avait les mains dans les poches du pull-over qui couvrait son corps. En dessous de ce grand vêtement marron, fermé à moitié, on pouvait apercevoir un tee-shirt bleu. Un peu plus bas, le môme portait un pantalon chasseur de la même couleur que celui du pull au dessus d’une paire de tennis. Il avait un sac accroché à son dos. Immédiatement, les soldats se mirent en position de tir. Le chef de commandement ordonna :
- ARRÊTEZ-VOUS, MONSIEUR !
- ...
L’enfant ne comprenant rien à la situation, continuait d’avancer.
- ARRÊTEZ-VOUS ET METTEZ VOS MAINS EN ÉVIDENCE !
- ...
En ce moment, l’enfant prit la peine de regarder autour de lui : il constata soudainement que la rue de son quartier n’avait pas la même ambiance et le même charme qu’autrefois. Il vit qu’il était le seul enfant et même le seul civil dans la rue : tous les autres étaient des soldats avec des armes à la main. Il comprit que la situation était étrange. La crainte s’empara de l’enfant, il voulut rebrousser chemin. Mais, le chef de commandement ordonna :
- STOP ! COUCHEZ-VOUS OU ON TIRE !
Au même moment, une femme d’une trentaine d’année accompagnée d’un homme d’environ quarante ans apparaissent.
- MAINS EN L’AIR ! PLUS UN GESTE ! ordonna le chef de commandement à la vue des deux adultes.
Les soldats prêts à tirer, attendaient l’ordre de leur supérieur. L’homme et la femme mirent leurs mains en évidence. Aussitôt, l’enfant se retourna, se mit à courir et se jeta dans les bras des deux adultes. L’homme prit immédiatement la parole :
- Nous sommes les parents de cet enfant. S’il vous plait, ne tirez pas ! Nous sommes des honnêtes citoyens de ce pays. L’enfant est sorti par inattention, il ne comprend pas vraiment ce qui se passe. Croyez-nous, nous ne sommes pas des terroristes.
Après les propos du père de famille trois soldats, bien armés et prêts à faire feu, se détachaient de la zone barricadée pour s’approcher des trois civils. Arrivés à leur niveau, deux d’entre les soldats se mirent à une distance respectable et le troisième commença à palper et à fouiller les civils. Au bout d’un moment le soldat, en charge de la fouille, lança : « R.A.S !». Ils décidaient alors de raccompagner la famille chez elle. Ainsi, vivait-on désormais à Freeland.
Le communiqué de M. le maire

Si aujourd’hui Freeland donne l’apparence d’une ville instable c’est bien parce que trois mois plus tôt les services secrets du pays ont intercepté un appel faisant écho d’une attaque contre la ville. N’ayant aucune information précise ni du lieu exacte ni du moment de l’attaque, l’armée fut déployée dans les zones stratégiques et surtout dans presque tous les espaces publiques de la ville. Sans que la population ne soit informée de quoique ce soit, la police entama une minutieuse enquête afin d’empêcher l’attaque.
Les autorités de la ville s’attendaient à quelque chose venant de l’extérieur. Dans cette logique ils mirent l’accent sur la protection de l’aéroport et sur l’unique pont terrestre qui relie la ville au reste du pays. Cependant, le temps passa et après deux mois d’enquête aucune attaque n’eut lieu. L’enquête non plus n’évolua. Finalement, les autorités politiques et policières baissaient leur garde : l’effectif des forces de l’ordre présent dans la ville pour intervenir en cas d’attaque fut réduit. Encore deux semaines passaient et rien ! On commença à considérer la menace comme une fausse alerte et tous les soldats furent rappelés à la base, c’était un vendredi.
La vie se poursuivit à Freeland. Les populations vaguaient à leurs activités quotidiennes et rentraient chez elles le soir venu. Le lendemain, Samedi, à la fin de la matinée, un soudain communiqué des autorités de la ville interrompit le cours normal des émissions télévisées du week-end. Le maire de la ville informa les populations d’une imminente attaque terroriste. Ainsi demandait-il aux freelandais et freelandaises de rester chez eux afin de réduire la portée de l’attaque. Il rassura la population que tout était à l’œuvre pour la maîtrise de la situation.
À partir de cet instant, les habitants de la ville qui étaient hors de leurs maisons s’empressaient de rentrer chez eux. Une heure après, Freeland donnait l’air d’une ville fantôme. Magasins et boutiques avaient fermés. Seules les patrouilles de l’armée y circulaient.
Enfermée à leur domicile, le couple Fiahot et leurs deux garçons de seize et dix-huit ans s’occupaient tant bien que mal pour ne pas trop sentir la lourdeur de la quarantaine. Pendant que le père bricolait dans son garage, la mère s’affairait dans la cuisine et les deux fils restaient dans leurs chambres, les portes condamnées et les ordinateurs connectés à internet. Les garçons semblaient bien plus préoccupés par la situation que ne l’étaient leurs parents.
La journée s’écoulait lentement et rien ne présageait confirmer une quelconque attaque terroriste. À dix-neuf heures, la mère invita toute la famille à table. Les fils emportaient leurs repas dans leurs chambres pour s’enfermer de nouveau. Les deux parents restaient dîner sans se préoccuper du comportement de leurs fils.
« Il n’y a pas d’innocent ! »
Vers neuf heures du soir, pendant que la maisonnette se préparait à se mettre au lit, une énorme explosion secoua la ville et fît tremblée tout le monde. Instinctivement Madame Fiahot courut vers les chambres de ses fils pour s’assurer qu’ils vont bien tandis que son époux s’orienta vers la télévision afin de comprendre ce qui se passe. Malheureusement, la mère de famille échoua devant les portes fermées des chambres de ses fils. Elle lança :
- Bryan, Tony, mes fils ! Vous allez bien ?
- Ça va, maman ! répondit Tony
- Et, toi Bryan ?
- Tout va bien, maman !
- Je suis inquiète. Je pense qu’on doit-être ensemble. Sortez de vos chambres s’il vous plaît !
- Un instant, maman ! Répondirent-ils d’une même voix.
La mère de famille alla rejoindre son époux, figé devant l’écran de la télé.
- Chéri ! Chéri ! Que disent les infos ? Questionna-t-elle.
- ...
- Chéri, que se passe-t-il ? Reprit-elle.
- Nous sommes coupés du reste du pays. Répondit l’époux.
- Coupé du reste du pays ?
- Oui, l’unique pont qui nous reliait au reste du pays a sauté.
- Comment ?
- Les informations qui nous parviennent font état d’un acte terroriste. Nous sommes désormais isolés. Personne ne pourra ni entrer ni sortir de la ville par la voie terrestre.
- Pourquoi détruire le pont ?
- Chérie, nous devront craindre le pire. Je crois que nos ennemis sont déjà dans la ville. Ils nous isolent pour mieux nous détruire.
- Mais qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Que veulent-ils ?
Pendant que, face à la télévision, madame Fiahot interrogeait son mari, leurs deux fils sortirent de leurs chambres. Ils se rapprochaient de leurs parents. À la vue des garçons, les parents s’étonnaient :
- Que faites-vous dans ces tenues militaires ? Pourquoi portez-vous des cagoules ? Questionna la mère.
- D’où sortez-vous tout cela ? Reprit le père.
- Nous combattons pour la vérité céleste. Nous combattons pour mériter le ciel. La noblesse de notre combat nécessité des sacrifices. En vérité, il n’y a pas d’innocent ! Répondit Tony.
- De quoi parles-tu, fils ? rétorqua sa mère.
- Tu ne comprendre donc pas ? Ce sont eux qui ont fait exploser le pont. Hurla monsieur Fiahot.
- Non ! Non ! Murmurait la mère de famille déjà en sanglot.
Les garçons, habillés en treillis militaires et lourdement armés avec dans les mains de chacun une kalachnikov AK45, braquaient leurs armes sur leurs parents. La mère voulut étreindre ses fils mais ceux-ci la mirent au respect. Elle s’effondra et se mit à pleurer à chaude larme. Brusquement, le père se dirigea vers son téléphone et prononça :
- J’appelle l’armée !
Il n’eut pas le temps de prendre son téléphone que Bryan braqua son arme sur lui, deux coups de feu sortirent de la AK 45. L’homme s’écroula dans son canapé avec deux balles à la poitrine. Prise de panique, la mère se jeta sur le corps agonisant de son mari. Mais les terroristes la saisirent et la ligotaient pour ensuite l’abandonner. Ils s’orientaient vers la sortie de la maison.
Le bruit des coups de feu alertaient les voisins. Ainsi, ils informaient l’armée. Pendant ce temps les deux terroristes prirent pour cible le quartier. Ils voulurent pénétrer chez les voisins mais ils échouaient. Ils se mirent à mitrailler les habitats environnant.
À ce moment, l’armée arriva : les terroristes se mirent à mitrailler les véhicules des forces de l’ordre. Ceux-ci ripostaient. Bryan reçu deux balles : une dans chacune de ses jambes. Il s’écroula en se tordant de douleur. Quant-à Tony, il fut touché au cou : il ne pu survivre. En moins de cinq minutes, l’armée avait réussi à neutraliser les terroristes. Elle fit venir deux ambulances pour les évacuer. Mais en ce moment, Bryan professa :
- Le fils s’élèvera contre son père et notre vérité triomphera. Ce n’est que le commencement ! les autres continueront le combat à notre place. Vous serez frappé au moment où vous y attendez le moins par un adversaire invisible et insoupçonné. Croyez-moi, internet nous rapproche de notre guide et de notre mission.
Aussitôt dit, il tira de sa poche une grenade et se fît exploser.
En plus de cet aveu, une autre information parvint à l’armée faisant cas d’une attaque ciblée des zones stratégiques de la ville de Freeland. À partir de cet instant la ville perdît sa quiétude. Cette fois-ci, l’armée n’excluait aucune hypothèse : le danger pouvait venir de partout, même d’un enfant de sept ans!