Un jour, je les ai rencontrés. Dans un club de cinéphiles. Je les ai vus là sur l’écran, eux que j’aimais depuis si longtemps . Lennie d’abord, mon innocent préféré, mon antihéros, un... [+]
Le bébé aux yeux jaunes
L'impact des gouttes sur le métal du toit en taules de la cahute où elle faisait semblant de vivre provoqua immédiatement chez Marie une frayeur certaine . La pluie tombait plus violemment que d'habitude et pourtant rien ne l'avait laissé supposer dans la journée. Elle était seule avec son petit et la vieille femme dans la masure insalubre.
Faire tenir debout cette bicoque délabrée et s'occuper de sa mère handicapée à l'esprit envolé, c'est tout ce que lui demandait Germain, un agriculteur sexagénaire, pour lui permettre de vivre sous un toit avec son petit garçon aux yeux jaunes. Deux fois par mois, il venait lui apporter le nécessaire à leur survie. Ils échangeaient peu de mots car ils étaient des taiseux tous les deux.
Personne au village ne soupçonnait seulement l'existence de la jeune femme et de son enfant.
Le vieux garçon l'avait trouvée un jour inanimée dans un de ses champs , le ventre tout rond. Il l'avait traînée jusqu'à sa ferme mais elle était apparemment amnésique. Il n'eut aucune envie de prévenir la gendarmerie parce qu'il aurait fallu parler et ça il n'aimait pas.
C'est alors que lui vint l'idée d'installer la femme rousse avec sa mère à lui dans l'ancienne baraque de ses parents.
Du ventre rond sortit, Dieu sait dans quelles conditions un petit garçon, tout bien fait comme les autres mais avec des yeux jaunes très lumineux. Elle adora immédiatement ce bébé, son bébé à elle. Elle le nourrit avec immensément d'amour, elle le couvrit de baisers, elle lui offrit tant et plus de tendresse. Il se développait bien. Comme tous les bébés du monde, il esquissa pour sa maman son premier sourire, puis un nombre considérable d'autres sourires. Elle lui caressait les pieds, lui mordillait les mains, soufflait sur son ventre pour le faire rire ! Elle était éperdue d'amour maternel. Elle jugeait ses yeux d'or magnifiques et pourtant, parfois durant un court instant, mal à l'aise, elle quittait son regard.
C'est vrai qu'elle ne se souvenait pas de grand chose mais elle savait que son petit était le fruit d'un viol . Où cela s'était-il passé ? De qui avait-elle été la victime? Seuls les yeux jaunes la renvoyaient à un souvenir diffus.
Bientôt, il ne s'agit plus de gouttes mais de flots de pluie ! Marie se précipita dans ce qu'elle appelait « la chambre- palais » de son enfant- roi, son Robin merveilleux. Elle s'était acharnée à nettoyer, récurer, embellir, l’appentis qui autrefois avait servi de toute évidence à ranger des outils.
Dans son lit, le petit qui avait eu deux ans la veille, hurlait. En tendant les mains vers elle, il criait : « Papa ! Papa ! » .Depuis qu'il prononçait quelques mots, il en avait toujours été ainsi, même au chat, il disait « papa ».
En écoutant une émission sur une vieille radio, oubliée là par Germain et qu'elle branchait de temps à autre pour revenir à la vraie vie, elle avait entendu un pédiatre expliquer que cette attitude était fréquente. Il s'agissait du mot le plus facile à dire pour un bébé mais quand il le prononçait il pouvait représenter bien d'autres choses. Marie en était perturbée cependant parce que dans ce lieu, c'était un mot que son enfant n'avait jamais entendu. Elle s'imaginait parfois qu'il recevait des messages.
Elle le prit dans ses bras, pleine du désir de fuir avec lui n'importe où. Son enfant chéri, ce qu'elle voulait, c'était le sauver. Tout avait été tellement compliqué pour eux dès le départ. Son petit garçon était le fruit d'un viol. Elle ne savait rien du père.
Il ne s'agissait plus de flots de pluie, les taules étaient trouées, dévastées par des sortes de boules glaçantes. Il fallait s'éloigner très vite , sortir ! Vers la porte d'entrée qui s'était brisée sous les dégradations des projectiles devenus obus s'avançait un homme immense, aux yeux jaunes. Il lui enleva l'enfant des bras et soudain Marie se souvint de la vieille dame. Humainement, elle ne pouvait la laisser là.
Elle la retrouva dans le coin de la maison où elle était le plus souvent allongée sur un matelas immonde et avec toute la force qui la poussait à rejoindre son bébé d'amour, la chair de sa chair et de l'agression de l'autre, elle la mena, dans son espèce de chaise roulante (un ancien diable qui permettait de transporter le bois l'extérieur) juste au moment où un engin venu d'ailleurs montait à grande vitesse vers le ciel, laissant s'échapper des boules de feu d'un jaune lumineux.
La chevelure rousse de la tendre maman s'enflamma et son corps fut carbonisé. De sa mère non plus, Germain ne retrouva plus rien.
Un petit moment, il se rendit compte qu'il était attaché à cette femme et à son bébé. Est-ce que cela voulait dire que lui aussi, l'homme sauvage aurait pu aimer une femme et un enfant, avoir une sorte de famille ?
Il n'alerta pas la gendarmerie, à quoi bon ?
Deux fois par mois, il venait nettoyer les lieux.Une fois il entendit une voix qui appelait : « Papa ! Papa ! »
Mais ça veut dire quoi « papa » quand les mots vous sont encore étrangers ?
L'impact des gouttes sur le métal du toit en taules de la cahute où elle faisait semblant de vivre provoqua immédiatement chez Marie une frayeur certaine . La pluie tombait plus violemment que d'habitude et pourtant rien ne l'avait laissé supposer dans la journée. Elle était seule avec son petit et la vieille femme dans la masure insalubre.
Faire tenir debout cette bicoque délabrée et s'occuper de sa mère handicapée à l'esprit envolé, c'est tout ce que lui demandait Germain, un agriculteur sexagénaire, pour lui permettre de vivre sous un toit avec son petit garçon aux yeux jaunes. Deux fois par mois, il venait lui apporter le nécessaire à leur survie. Ils échangeaient peu de mots car ils étaient des taiseux tous les deux.
Personne au village ne soupçonnait seulement l'existence de la jeune femme et de son enfant.
Le vieux garçon l'avait trouvée un jour inanimée dans un de ses champs , le ventre tout rond. Il l'avait traînée jusqu'à sa ferme mais elle était apparemment amnésique. Il n'eut aucune envie de prévenir la gendarmerie parce qu'il aurait fallu parler et ça il n'aimait pas.
C'est alors que lui vint l'idée d'installer la femme rousse avec sa mère à lui dans l'ancienne baraque de ses parents.
Du ventre rond sortit, Dieu sait dans quelles conditions un petit garçon, tout bien fait comme les autres mais avec des yeux jaunes très lumineux. Elle adora immédiatement ce bébé, son bébé à elle. Elle le nourrit avec immensément d'amour, elle le couvrit de baisers, elle lui offrit tant et plus de tendresse. Il se développait bien. Comme tous les bébés du monde, il esquissa pour sa maman son premier sourire, puis un nombre considérable d'autres sourires. Elle lui caressait les pieds, lui mordillait les mains, soufflait sur son ventre pour le faire rire ! Elle était éperdue d'amour maternel. Elle jugeait ses yeux d'or magnifiques et pourtant, parfois durant un court instant, mal à l'aise, elle quittait son regard.
C'est vrai qu'elle ne se souvenait pas de grand chose mais elle savait que son petit était le fruit d'un viol . Où cela s'était-il passé ? De qui avait-elle été la victime? Seuls les yeux jaunes la renvoyaient à un souvenir diffus.
Bientôt, il ne s'agit plus de gouttes mais de flots de pluie ! Marie se précipita dans ce qu'elle appelait « la chambre- palais » de son enfant- roi, son Robin merveilleux. Elle s'était acharnée à nettoyer, récurer, embellir, l’appentis qui autrefois avait servi de toute évidence à ranger des outils.
Dans son lit, le petit qui avait eu deux ans la veille, hurlait. En tendant les mains vers elle, il criait : « Papa ! Papa ! » .Depuis qu'il prononçait quelques mots, il en avait toujours été ainsi, même au chat, il disait « papa ».
En écoutant une émission sur une vieille radio, oubliée là par Germain et qu'elle branchait de temps à autre pour revenir à la vraie vie, elle avait entendu un pédiatre expliquer que cette attitude était fréquente. Il s'agissait du mot le plus facile à dire pour un bébé mais quand il le prononçait il pouvait représenter bien d'autres choses. Marie en était perturbée cependant parce que dans ce lieu, c'était un mot que son enfant n'avait jamais entendu. Elle s'imaginait parfois qu'il recevait des messages.
Elle le prit dans ses bras, pleine du désir de fuir avec lui n'importe où. Son enfant chéri, ce qu'elle voulait, c'était le sauver. Tout avait été tellement compliqué pour eux dès le départ. Son petit garçon était le fruit d'un viol. Elle ne savait rien du père.
Il ne s'agissait plus de flots de pluie, les taules étaient trouées, dévastées par des sortes de boules glaçantes. Il fallait s'éloigner très vite , sortir ! Vers la porte d'entrée qui s'était brisée sous les dégradations des projectiles devenus obus s'avançait un homme immense, aux yeux jaunes. Il lui enleva l'enfant des bras et soudain Marie se souvint de la vieille dame. Humainement, elle ne pouvait la laisser là.
Elle la retrouva dans le coin de la maison où elle était le plus souvent allongée sur un matelas immonde et avec toute la force qui la poussait à rejoindre son bébé d'amour, la chair de sa chair et de l'agression de l'autre, elle la mena, dans son espèce de chaise roulante (un ancien diable qui permettait de transporter le bois l'extérieur) juste au moment où un engin venu d'ailleurs montait à grande vitesse vers le ciel, laissant s'échapper des boules de feu d'un jaune lumineux.
La chevelure rousse de la tendre maman s'enflamma et son corps fut carbonisé. De sa mère non plus, Germain ne retrouva plus rien.
Un petit moment, il se rendit compte qu'il était attaché à cette femme et à son bébé. Est-ce que cela voulait dire que lui aussi, l'homme sauvage aurait pu aimer une femme et un enfant, avoir une sorte de famille ?
Il n'alerta pas la gendarmerie, à quoi bon ?
Deux fois par mois, il venait nettoyer les lieux.Une fois il entendit une voix qui appelait : « Papa ! Papa ! »
Mais ça veut dire quoi « papa » quand les mots vous sont encore étrangers ?
De mon côté, je vous propose des " Vacances en short" . . . vous laisserez-vous tenter ?
Je conserve le fantôme de tes cinq votes ainsi que ceux qu'Eponine m'aurait attribués, dans ma boîte à trésors!
Au plaisir de te relire bientôt!
C'est sans doute parce que je ne participe pas au concours mais hors compétition!
J'ai du mal avec l'idée de compétition dans le domaine des textes!
Bisous , ma belle! Merci de ton passage!
Te voir ici me fait tellement plaisir!