La bière avait tiédi. Le fond de ma pinte stagnait tout comme mes pensées en cette soirée d’hiver. Autour, des groupes d’étudiants s’agitaient. Plus loin, la tablée qui m’intéressait... [+]
La fenêtre était entrouverte. Un air de reggae montait de la cour intérieure. Je sentais la torpeur m’engourdir, langueur que rien ne venait troubler. Maria était partie au travail depuis quelques heures, le temps pouvait se répandre et s’appesantir, l’urgent n’était plus loi.
Je reconnus l’air, Three little birds de Bob Marley, j’aurais presque pu me trémousser sur ce rythme, si je n’avais pas été aussi fatigué. L’oisiveté a du bon, surtout quand elle s’étire sur le sofa du salon. Que c’est agréable d’être confiné en une si belle journée. Les orchidées sur le rebord de la fenêtre dressaient fièrement leurs pétales vers le soleil de l’après-midi. Orgueil que j’aurais pu avoir sans cette nonchalance infectieuse qui me clouait sur les coussins anthracite de mon canapé trois places.
Maria ne manquera pas de me tancer à son retour, soyez en sûr, je l’entends déjà :
« Tu as passé ta journée à glander alors que moi je me tue à la tâche, et toi, là, vautré sur le canapé, tu as la belle vie, hein ? »
Evidemment je me rappellerai les paroles de feu mon père, ce vieux briscard, qui avait coutume de me raconter, tout en se frisant la moustache : « Fiston, il y a deux types de personnes, ceux qui en ont et les autres. Si tu en as, n’hésite à les montrer ! ». Et croyez-moi j’étais de ceux qui en avaient ! Une démangeaison furtive, consciencieux, j’en profitais pour me les gratter. Je la regarderai droit dans les yeux, et je lui dirai :
« Ecoute-moi bien ma grande ! Tout d’abord, comment peux-tu reprocher à quelqu’un qui ne fait rien, de mal faire ? C’est impossible ! Il faut faire quelque chose pour le faire mal. Moi je suis arrivé à un tel stade de perfection que je n’ai pas besoin de ruiner ma vie au travail afin d’exister. J’existe à chaque instant, dans chaque mouvement de mon corps, dans chaque action aussi imperceptible soit-elle, je suis pleinement moi. Toi tu dois faire de la méditation, suivre les conseils d’un coach de vie, ou je ne sais quel olibrius que tu paies un pognon de dingue, alors que moi, fidèle à mes idéaux, je suis là, entier, libre, autant qu’on puisse l’être dans un appartement, et heureux de vivre. »
Ensuite elle me fera sans doute une scène concernant l’argent, qu’elle gagne à la sueur de son front, qu’elle a mignon par ailleurs, du stress qu’elle subit, de son mal de dos, etc. Alors bien sûr je prendrai garde de ne pas bâiller, pour ne pas l’attrister. Je ne lui dirai pas que chacun a son rôle, le mien n’étant pas d’aller m’agiter dans la foule inconsciente qui se ruait sur des wagons de trains ou de métros pour aller remplir je ne sais quelle tâche ingrate et inconsistante. Non, moi j’étais de la race de ceux qui savent apprécier le moelleux d’un bon coussin. Je le penserai bien fort en penchant ma tête sur elle. Alors, elle finira par se blottir contre moi, et je la rassurerai. Plus tard elle ira se coucher, et même au plus profond de la nuit, son agitation sera manifeste, coups de pieds, retournements intempestifs, elle tirera même sur la couette comme si j’allais la lui voler. Comment voulez-vous qu’une personne aussi instable puisse tendre vers la perfection que je suis à deux doigts d’atteindre ? Comment pourrait-elle réduire ses activités au degré le plus bas possible, économiser jusqu’à ses mouvements pour obtenir cette tranquillité profonde, pleine et entière, qui mène à la sérénité ? Elle ne le pourrait pas, la voilà la vérité !
Je souriais au soleil rasant de l’après-midi. Morphée tardait à venir. Il devait être en train de flâner dans un coin. C’était le genre de type à sortir sans attestation, quand bon lui semblait, me laissant suspendu entre le sommeil et un éveil embrumé. J’entendais les chansons douces de mélodies pures et vraies, ah le reggae, ces bonnes vibrations me berçaient, me lovant dans un nuage de bonne humeur. L’odeur des acacias en fleurs venait flatter mes narines, par volutes, au gré du vent.
Une note un peu plus marquée vient titiller mon ouïe fine. Je doute que les Wailers ait pu commettre une fausse note, quelque chose ou quelqu’un venait de rompre le pacte de bien-être que je venais de passer avec l’univers. Une mouche venait de pénétrer par effraction dans la pièce. Pas de panique, ev’ry little thing, gonna be alright . Elle ne faisait aucun effort pour adapter son vol au rythme chaloupé du reggae. Comme un canadair ivre elle arpentait les couloirs aériens du salon au mépris des normes d’esthétisme en vigueur. Elle venait de frapper le lustre au-dessus de ma tête et commençait à sérieusement gâcher les cœurs qui me susurraient de ne pas m’en faire.
Je me tournais, tentant d’enfouir ma tête sous un coussin. Même si le coussin à motifs indiens ne provenait pas de Madhya Pradesh, dans le centre de l’Inde, mais bien du Maison du monde du centre-ville, je l’aimais, car il portait son odeur, Flowerbomb de Victor&Rolf. La drosophile désaccordée reprenait de plus belle. La première des règles, avant de se précipiter, est de ne rien faire. L’attente est mère de prudence, et le sommeil pouvait encore me délivrer de cette énergumène ailée.
Le diptère continuait son manège, et la playlist de mes aimables voisins venait gratifier mes oreilles sensibles d’un guajira aussi charmant que célèbre, Chan-Chan. Le grésillement s’amplifiait au rythme de la voix de Compay Segundo. Je commençais à ressentir ce sentiment confus qui habitait Chan Chan, alors que Juanita secouait son tamis. Mais ce diable ailé commençait à me bourdonner sur le système.
Mon amour pour la tranquillité venait d’être balayé comme le chemin de paille de la chanson. Et encore ce froufroutement qui me hérissait le poil. Soyons philosophe, mieux vaut une mouche dans le salon, qu’une araignée au plafond. Je décidai de me lever, non sans mal et non sans moult savants étirements dont seul j’ai le secret. La situation m’évoquait cette chanson de Jacques Higelin, Une mouche sur la bouche. Il se laissait séduire par l’insecte intrépide venu lui caresser les lèvres : « Il se la ferait bien, mais il a trop sommeil, c’est l’été, désœuvré... ». Sur la bouche, mais quelle horreur ! Et ce n’était pas encore l’été ! Afin de préserver mon capital bonne humeur, j’allais l’inviter, cordialement mais fermement, à sortir. A nous deux ma p’tite !
Intrépide, je tentai dans un premier temps l’approche frontale en faisant des grands moulinets des membres supérieurs tout en sautillant sur le tapis assimilé persan du salon, pour la repousser vers la fenêtre entrouverte. Mais à chaque fois que je fendais l’air devant elle, elle virait de bord en un ronflement continu, pour retourner au centre du salon.
Je changeai alors de stratégie afin de la surprendre en lui bondissant dessus, pour la désorienter et qu’elle prenne enfin ses ailes à son cou. Je la voyais déjà aller sonner chez un autre voisin pour lui seriner sa mélodie déglinguée. Je lui suggérerais bien mon voisin d’à côté, un fervent adepte de la perceuse. Qu’il pleuve qu’il neige ou qu’il vente, tant que la nuit n’était pas tombée, cet homme-là pouvait vous larder, empaler, perforer, tout ce qui lui tombait sous la mèche. Il avait dû créer un musée de l’étagère et monter l’équivalent de trois magasins de meubles Conforama pour passer autant de temps à trouer, forer, transpercer. Ils feraient une belle paire, elle bombillant à tout va, lui dégainant la scie-cloche comme personne, elle s’agitant derrière les rideaux, lui jouant du foret dans les coins, elle tintinnabulerait à l’unisson de sa mèche rebelle, l’osmose la plus totale.
En attendant je l’avais dans les pattes. Le muscidé borné refusait toute négociation à l’amiable. Il allait falloir sortir les griffes. Moi qui avais comme haut principe de ne jamais sacrifier un être, aussi horripilant soit-il, sur l’autel du courroux. Je me voyais contraint d’envisager cet assassinat, qui je suis sûr pèsera sur ma conscience... mais qu’après une bonne et longue sieste réparatrice, cela va de soi.
De l’appartement de mes voisins mélomanes s’élevait une musique entraînante, mais je n’entendais pas bien, à cause de qui vous savez... Je ne perdais pas une miette de son manège aérien. J’attendis le moment fatidique, immobile, recroquevillé sur moi-même, et avec trois pas d’élan je me détendis comme un diable au crépuscule grandiose sortit des paradis perdus de Christophe. Vous auriez dû voir ça. Tel Roger Federer, en apesanteur au-dessus du cours Suzanne Lenglen, j’apprêtais mon smash, vengeur et implacable. La frappe impitoyable manqua la bête qui l’avait esquivé d’un virage chaotique, je percutai de tout mon poids le buffet et m’écroulai un peu sonné par la violence du choc. Tel un château de cartes, les bibelots posés sur le plateau se répandirent et plongèrent qui sur le carrelage, qui sur le tapis, quand d’autres comme cette horrible cabine téléphonique londonienne ramenée de Marsaskala lors d’un séjour maltais, vint me frapper sur le côté du crâne en faisant un son creux. Quelle humiliation !
Je me relevai, m’époussetai, tentai de reprendre mes esprits en contemplant le sol jonché des vestiges d’un calendrier Maya hérité d’un voyage de beau-papa au Mexique, un escargot rigolo mais hideux, don d’un neveu apprenti sculpteur de 3 ans et, la fausse rose et le vrai vase de la grand-mère répandus façon puzzle. Maria allait adorer. Mais pas de temps à perdre, j’avais un problème bien plus trépidant sur les épaules. Où était-elle passée la responsable de ce désastre ? Où était cette maudite mouche ?
Je tendis l’oreille, puis l’autre, rien. Un silence de compartiment de train après qu’un passager asiatique ait toussé avec insistance, même dans son coude. Avait-elle quitté les lieux ? Allait-elle pousser la trémulation chez un hôte plus enclin à cet art au charme désuet ? Ç’eût été trop beau ! Je n’osai l’envisager. Investiguons !
Elle avait dû quitter la pièce. Je laissai le salon pour la chambre. J’entrai furtivement, comme un ninja dans un film hongkongais et...rien ! Pas même le crissement imperceptible d’une patte de mouche sur une vitre mal lavée. Rien. Je pris le couloir qui mène à la cuisine. Deux portes, comme autant de possibilité de caches. Les toilettes et la salle de bain. Les deux portes fermées, les insectes n’ayant aucune aptitude de serrurier ni le poids suffisant pour peser sur une poignée, je les exclus et poussai mon investigation quelques mètres plus loin.
La cuisine. Pas âme qui vive. Je poursuivis mon enquête dans l’entrée. On avait là aussi atteint le degré zéro du brondissement. Même pas un petit bourdon de campagne. Le calme, simple, total. Pourtant... J’avais pu rêver mais il me semblait avoir vu une ombre hostile passer sur les rayons de la bibliothèque.
C’était bien elle, piétinant sans vergogne les couvertures protégeant Les Amours Jaunes de Tristan Corbière, La Chatte de Colette, Baudelaire et Les Fleurs du mal. Elle s’arrêta net, méditative entre Le théâtre et son double d’Antonin Artaud et Le Fou d’Elsa de Louis Aragon. Ces vers seront ton tombeau lui concédais-je comme épitaphe avant de lancer mon estocade. Ma frappe cueillit les livres et le presse papier, reproduction de la fontaine du petit Bacchus des jardins de Boboli à Florence, de plein fouet. Le Bacchino sur sa tortue après un triple salto avant tenta d’amortir sa chute en une réception sur son ventre de plâtre. Son plat mémorable sur le carrelage lui coûta son intégrité physique, là où la tortue ne perdit qu’une patte et la tête, lui aurait eu bien besoin d’un exosquelette complet.
Je la pourchassai dans la cuisine. Elle se posa dans un plat à gratin laissé au milieu de la table que j’atteignis d’un coup droit magistral. Le plat en tremble encore, sur les carreaux blanc cassé au pied de l’évier, en morceaux dépareillés. Je la surpris se faufilant entre les flacons de condiments sur le rayonnage aux épices. Ni une ni deux, je tatanais à vue. Slam, dans le curry qui créa une mini-tempête de sable odorant, bim dans le piment de Cayenne, plaf, sur le poivre, pam, dans les dents de l’ail moulu, et vlan, sur la muscade. On aurait dit un croisement entre Cauchemar en cuisine et Color day. En y ajoutant une pincée de lacrymo prise sur la place Bellecour un jour de manifestation, on obtenait la recette complète, parce qu’il faut bien le reconnaître, le mélange piquait un peu.
Sans masque à gaz et sans stratocaster, elle sortit son vibrato et perça le nuage exotique pour aller se calfeutrer dans le rideau de la fenêtre, fermée, de la cuisine. Je fonçai, pleurant, éternuant au grand jour, et m’élançai sur la mouche empêtrée dans le voile le long de la vitre, cadavre encore chaud drapé dans son suaire. Je frôlai l’insecte, mais arrachai tringle, rideaux et le peu de dignité qui restait encore accroché à mon orgueil moribond.
L’insecte hurlant avait pris la poudre d’escampette du côté de la chambre. Je fondis sur l’affreuse alors qu’elle faisait halte sur la tête de lit. Je manquai m’assommer contre le mur mais réussis à faire tomber le tableau La nuit étoilée de Van Gogh. Comme la folle volante n’avait rien trouvé de mieux que de trôner sur la lampe de chevet, je réitérais mon smash vengeur. Attention les yeux ! L’ampoule de la lampe explosa en touchant le sol, créant un tapis unique composé d’une myriade de petits bouts de verre craquetant sous mes pas, tel un lino de papier à bulle friable.
Elle n’avait pas filé bien loin, la garce ! Je l’entendais qui s’excitait dans le salon. Me narguant ouvertement en tapant contre la vitre, ouverte, mais s’abstenant bien de sortir. Les voisins du dessous venaient d’effectuer un virage musical certain, en passant des rythmes chauds, latinos, à Higelin. Voilà qui me redonnait un peu de cœur à l’ouvrage. Je me jetais à sa gorge, pour peu que je la trouve. En prenant appui je glissais sur la page horoscope d’un magazine qui gisait là. L’attaque ultime qui devait la clouer au pilori pour toujours se transforma en une pirouette mal gérée, entre l’axel et le boucle piqué, et je finis cul par-dessus tête contre le radiateur, assommé. Combien de temps restais-je ainsi à contempler mes parties, car vu la position, je peux vous assurer que je ne voyais rien d’autre. Certains pourraient m’accuser d’avoir la faiblesse de me regarder le nombril, je vous assure qu’en cet instant j’aurais préféré. « Tombé du lit, fauché en plein ciel », Higelin accompagnait toujours cette délicieuse chute, tout en jeu de mots et rimes cadencées. La pièce était calme. Aucun insecte ne semblait vouloir performer dans le coin. Avais-je réussi ?
Et là, à quelques centimètres de moi, frottant ses petites pattes de devant comme si de rien n’était, la fourbe se trémoussait, libre de recommencer son insultant manège. Sans prendre la peine de me lever, par flemme et pour ne pas attirer son attention, je me tapis sur la carpette, relâchant mes muscles afin de les bander au moment fatidique. Je bondis tel un tigre affamé sur un kebab sauce samouraï. Vlam ! Je l’avais eu. Je pesais de tout mon poids sur son corps rebondi, elle se débattit, donnant du vibrato à gogo, agitant en tous sens ses ailes devenues inutiles. Tu n’as que ce que tu mérites, irritant insecte, tes petites pattes n’iront plus triturer dans la pelote de mes nerfs à vif ! Lui assénai-je avec emphase. Elle me répondit en s’essayant à la stridulation, mais elle n’était pas équipée pour et l’envol lyrique retomba à plat. « C’est fou c’qu’on peut voir tomber quand on traîne sur le pavé les yeux en l’air ».
Plus que quelques secondes et je mettrai un terme définitif à sa carrière de trouble-sieste. Elle ne se débattait déjà plus. Un bruit raisonna, venant de l’entrée. Tout en prenant garde de ne pas relâcher mon étreinte mortelle, je me contorsionnai pour essayer de voir par-dessus mon épaule.
Ce furent d’abord une rumeur, des sons étouffés, des portes qui claquent, puis des cris plus intelligibles qui gonflèrent pour exploser à mes oreilles.
« Mais bordel qu’est-ce qui est arrivé ici ! Où est allé se fourrer ce putain de chat. Mais regarde ce souk qu’il a mis partout ! Merde, même la chambre y est passée. »
Impériale, moulée dans son pantalon similicuir, campée sur ses talons aiguilles elle se planta devant moi. J’hésitai entre relâcher ma prise ou rejoindre ma maîtresse. Mais la tentation fût trop impérieuse. L’insecte resta à faire le mort comme je venais me frotter aux jambes de Maria.
« Te voilà petit con ! Mais t’es pas possible, tu as vu le merdier que tu as semé ? »
Elle n’avait pas besoin d’en dire plus. J’avais vu ses yeux en pleurs et le timbre de sa voix paniqué. Elle avait réalisé à quel point la bataille avait été rude. La rage avec laquelle j’avais lutté pour préserver notre territoire. Je lui prouvais une fois encore, qu’elle n’avait pas à s’en faire, les lieux étaient bien gardés.
Elle s’effondra sur le canapé, je la rejoins.
Elle devait avoir en tête ce poème de notre bon Charles, dont les vers parlent si bien de nous, et quand je dis nous, je veux dire moi, bien sûr :
Non, il n’est pas d’archet qui morde
Sur mon cœur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu’harmonieux !
Auquel répondit Jacques : « Tombé sur toi, tombé en pâmoison [...] L’amour, L’amour encore et toujours ». Je la gratifiais d’un ronronnement maison, de celui qui la berce quand elle est angoissée. Elle semblait encore secouée par ce qu’elle venait de voir. J’avais envie de lui miauler de ne pas s’en faire, qu’un petit coup de balayette et tout serait d’aplomb. Je ne lui proposais pas mon aide, après tout de nous deux, qui était celui qui en avait ?
L’odeur des acacias se mêlait à celles des plats que préparaient nos chers voisins. Maria était silencieuse, elle devait profiter de cet instant de quiétude, de complicité. La mouche n’avait toujours pas bougé, étendue sur le tapis, soit elle feignait très bien la mort soit la mort feignait très mal de l’avoir épargné. Maria posa sa main sur moi, ses yeux étaient secs maintenant. La peur était passée, elle n’avait plus à s’en faire. Pourtant je sentais que la tension était encore palpable. Que voulez-vous, les femelles ne sont pas comme nous, un rien ne les ébranle. Elle me gratifia d’une petite tape, comme pour m’approuver puis, solennelle, annonça :
« Ma mère avait raison, demain je vais prendre rendez-vous chez le vétérinaire. J’aurai dû te faire castrer tout de suite. »
La playlist de mes aimables voisins mélomanes :
Three little birds, Bob Marley & The Wailers, sur l’album Exodus.
Chan Chan, Compay Segundo, sur l’album Yo Vengo aquí.
Tombé du ciel, Jacques Higelin, sur l’album éponyme.
Le chat, un rien mégalo, cite le poème de Charles Baudelaire dans Les fleurs du mal, section Spleen et idéal, intitulé, roulement de tambour : Le chat.
Je reconnus l’air, Three little birds de Bob Marley, j’aurais presque pu me trémousser sur ce rythme, si je n’avais pas été aussi fatigué. L’oisiveté a du bon, surtout quand elle s’étire sur le sofa du salon. Que c’est agréable d’être confiné en une si belle journée. Les orchidées sur le rebord de la fenêtre dressaient fièrement leurs pétales vers le soleil de l’après-midi. Orgueil que j’aurais pu avoir sans cette nonchalance infectieuse qui me clouait sur les coussins anthracite de mon canapé trois places.
Maria ne manquera pas de me tancer à son retour, soyez en sûr, je l’entends déjà :
« Tu as passé ta journée à glander alors que moi je me tue à la tâche, et toi, là, vautré sur le canapé, tu as la belle vie, hein ? »
Evidemment je me rappellerai les paroles de feu mon père, ce vieux briscard, qui avait coutume de me raconter, tout en se frisant la moustache : « Fiston, il y a deux types de personnes, ceux qui en ont et les autres. Si tu en as, n’hésite à les montrer ! ». Et croyez-moi j’étais de ceux qui en avaient ! Une démangeaison furtive, consciencieux, j’en profitais pour me les gratter. Je la regarderai droit dans les yeux, et je lui dirai :
« Ecoute-moi bien ma grande ! Tout d’abord, comment peux-tu reprocher à quelqu’un qui ne fait rien, de mal faire ? C’est impossible ! Il faut faire quelque chose pour le faire mal. Moi je suis arrivé à un tel stade de perfection que je n’ai pas besoin de ruiner ma vie au travail afin d’exister. J’existe à chaque instant, dans chaque mouvement de mon corps, dans chaque action aussi imperceptible soit-elle, je suis pleinement moi. Toi tu dois faire de la méditation, suivre les conseils d’un coach de vie, ou je ne sais quel olibrius que tu paies un pognon de dingue, alors que moi, fidèle à mes idéaux, je suis là, entier, libre, autant qu’on puisse l’être dans un appartement, et heureux de vivre. »
Ensuite elle me fera sans doute une scène concernant l’argent, qu’elle gagne à la sueur de son front, qu’elle a mignon par ailleurs, du stress qu’elle subit, de son mal de dos, etc. Alors bien sûr je prendrai garde de ne pas bâiller, pour ne pas l’attrister. Je ne lui dirai pas que chacun a son rôle, le mien n’étant pas d’aller m’agiter dans la foule inconsciente qui se ruait sur des wagons de trains ou de métros pour aller remplir je ne sais quelle tâche ingrate et inconsistante. Non, moi j’étais de la race de ceux qui savent apprécier le moelleux d’un bon coussin. Je le penserai bien fort en penchant ma tête sur elle. Alors, elle finira par se blottir contre moi, et je la rassurerai. Plus tard elle ira se coucher, et même au plus profond de la nuit, son agitation sera manifeste, coups de pieds, retournements intempestifs, elle tirera même sur la couette comme si j’allais la lui voler. Comment voulez-vous qu’une personne aussi instable puisse tendre vers la perfection que je suis à deux doigts d’atteindre ? Comment pourrait-elle réduire ses activités au degré le plus bas possible, économiser jusqu’à ses mouvements pour obtenir cette tranquillité profonde, pleine et entière, qui mène à la sérénité ? Elle ne le pourrait pas, la voilà la vérité !
Je souriais au soleil rasant de l’après-midi. Morphée tardait à venir. Il devait être en train de flâner dans un coin. C’était le genre de type à sortir sans attestation, quand bon lui semblait, me laissant suspendu entre le sommeil et un éveil embrumé. J’entendais les chansons douces de mélodies pures et vraies, ah le reggae, ces bonnes vibrations me berçaient, me lovant dans un nuage de bonne humeur. L’odeur des acacias en fleurs venait flatter mes narines, par volutes, au gré du vent.
Une note un peu plus marquée vient titiller mon ouïe fine. Je doute que les Wailers ait pu commettre une fausse note, quelque chose ou quelqu’un venait de rompre le pacte de bien-être que je venais de passer avec l’univers. Une mouche venait de pénétrer par effraction dans la pièce. Pas de panique, ev’ry little thing, gonna be alright . Elle ne faisait aucun effort pour adapter son vol au rythme chaloupé du reggae. Comme un canadair ivre elle arpentait les couloirs aériens du salon au mépris des normes d’esthétisme en vigueur. Elle venait de frapper le lustre au-dessus de ma tête et commençait à sérieusement gâcher les cœurs qui me susurraient de ne pas m’en faire.
Je me tournais, tentant d’enfouir ma tête sous un coussin. Même si le coussin à motifs indiens ne provenait pas de Madhya Pradesh, dans le centre de l’Inde, mais bien du Maison du monde du centre-ville, je l’aimais, car il portait son odeur, Flowerbomb de Victor&Rolf. La drosophile désaccordée reprenait de plus belle. La première des règles, avant de se précipiter, est de ne rien faire. L’attente est mère de prudence, et le sommeil pouvait encore me délivrer de cette énergumène ailée.
Le diptère continuait son manège, et la playlist de mes aimables voisins venait gratifier mes oreilles sensibles d’un guajira aussi charmant que célèbre, Chan-Chan. Le grésillement s’amplifiait au rythme de la voix de Compay Segundo. Je commençais à ressentir ce sentiment confus qui habitait Chan Chan, alors que Juanita secouait son tamis. Mais ce diable ailé commençait à me bourdonner sur le système.
Mon amour pour la tranquillité venait d’être balayé comme le chemin de paille de la chanson. Et encore ce froufroutement qui me hérissait le poil. Soyons philosophe, mieux vaut une mouche dans le salon, qu’une araignée au plafond. Je décidai de me lever, non sans mal et non sans moult savants étirements dont seul j’ai le secret. La situation m’évoquait cette chanson de Jacques Higelin, Une mouche sur la bouche. Il se laissait séduire par l’insecte intrépide venu lui caresser les lèvres : « Il se la ferait bien, mais il a trop sommeil, c’est l’été, désœuvré... ». Sur la bouche, mais quelle horreur ! Et ce n’était pas encore l’été ! Afin de préserver mon capital bonne humeur, j’allais l’inviter, cordialement mais fermement, à sortir. A nous deux ma p’tite !
Intrépide, je tentai dans un premier temps l’approche frontale en faisant des grands moulinets des membres supérieurs tout en sautillant sur le tapis assimilé persan du salon, pour la repousser vers la fenêtre entrouverte. Mais à chaque fois que je fendais l’air devant elle, elle virait de bord en un ronflement continu, pour retourner au centre du salon.
Je changeai alors de stratégie afin de la surprendre en lui bondissant dessus, pour la désorienter et qu’elle prenne enfin ses ailes à son cou. Je la voyais déjà aller sonner chez un autre voisin pour lui seriner sa mélodie déglinguée. Je lui suggérerais bien mon voisin d’à côté, un fervent adepte de la perceuse. Qu’il pleuve qu’il neige ou qu’il vente, tant que la nuit n’était pas tombée, cet homme-là pouvait vous larder, empaler, perforer, tout ce qui lui tombait sous la mèche. Il avait dû créer un musée de l’étagère et monter l’équivalent de trois magasins de meubles Conforama pour passer autant de temps à trouer, forer, transpercer. Ils feraient une belle paire, elle bombillant à tout va, lui dégainant la scie-cloche comme personne, elle s’agitant derrière les rideaux, lui jouant du foret dans les coins, elle tintinnabulerait à l’unisson de sa mèche rebelle, l’osmose la plus totale.
En attendant je l’avais dans les pattes. Le muscidé borné refusait toute négociation à l’amiable. Il allait falloir sortir les griffes. Moi qui avais comme haut principe de ne jamais sacrifier un être, aussi horripilant soit-il, sur l’autel du courroux. Je me voyais contraint d’envisager cet assassinat, qui je suis sûr pèsera sur ma conscience... mais qu’après une bonne et longue sieste réparatrice, cela va de soi.
De l’appartement de mes voisins mélomanes s’élevait une musique entraînante, mais je n’entendais pas bien, à cause de qui vous savez... Je ne perdais pas une miette de son manège aérien. J’attendis le moment fatidique, immobile, recroquevillé sur moi-même, et avec trois pas d’élan je me détendis comme un diable au crépuscule grandiose sortit des paradis perdus de Christophe. Vous auriez dû voir ça. Tel Roger Federer, en apesanteur au-dessus du cours Suzanne Lenglen, j’apprêtais mon smash, vengeur et implacable. La frappe impitoyable manqua la bête qui l’avait esquivé d’un virage chaotique, je percutai de tout mon poids le buffet et m’écroulai un peu sonné par la violence du choc. Tel un château de cartes, les bibelots posés sur le plateau se répandirent et plongèrent qui sur le carrelage, qui sur le tapis, quand d’autres comme cette horrible cabine téléphonique londonienne ramenée de Marsaskala lors d’un séjour maltais, vint me frapper sur le côté du crâne en faisant un son creux. Quelle humiliation !
Je me relevai, m’époussetai, tentai de reprendre mes esprits en contemplant le sol jonché des vestiges d’un calendrier Maya hérité d’un voyage de beau-papa au Mexique, un escargot rigolo mais hideux, don d’un neveu apprenti sculpteur de 3 ans et, la fausse rose et le vrai vase de la grand-mère répandus façon puzzle. Maria allait adorer. Mais pas de temps à perdre, j’avais un problème bien plus trépidant sur les épaules. Où était-elle passée la responsable de ce désastre ? Où était cette maudite mouche ?
Je tendis l’oreille, puis l’autre, rien. Un silence de compartiment de train après qu’un passager asiatique ait toussé avec insistance, même dans son coude. Avait-elle quitté les lieux ? Allait-elle pousser la trémulation chez un hôte plus enclin à cet art au charme désuet ? Ç’eût été trop beau ! Je n’osai l’envisager. Investiguons !
Elle avait dû quitter la pièce. Je laissai le salon pour la chambre. J’entrai furtivement, comme un ninja dans un film hongkongais et...rien ! Pas même le crissement imperceptible d’une patte de mouche sur une vitre mal lavée. Rien. Je pris le couloir qui mène à la cuisine. Deux portes, comme autant de possibilité de caches. Les toilettes et la salle de bain. Les deux portes fermées, les insectes n’ayant aucune aptitude de serrurier ni le poids suffisant pour peser sur une poignée, je les exclus et poussai mon investigation quelques mètres plus loin.
La cuisine. Pas âme qui vive. Je poursuivis mon enquête dans l’entrée. On avait là aussi atteint le degré zéro du brondissement. Même pas un petit bourdon de campagne. Le calme, simple, total. Pourtant... J’avais pu rêver mais il me semblait avoir vu une ombre hostile passer sur les rayons de la bibliothèque.
C’était bien elle, piétinant sans vergogne les couvertures protégeant Les Amours Jaunes de Tristan Corbière, La Chatte de Colette, Baudelaire et Les Fleurs du mal. Elle s’arrêta net, méditative entre Le théâtre et son double d’Antonin Artaud et Le Fou d’Elsa de Louis Aragon. Ces vers seront ton tombeau lui concédais-je comme épitaphe avant de lancer mon estocade. Ma frappe cueillit les livres et le presse papier, reproduction de la fontaine du petit Bacchus des jardins de Boboli à Florence, de plein fouet. Le Bacchino sur sa tortue après un triple salto avant tenta d’amortir sa chute en une réception sur son ventre de plâtre. Son plat mémorable sur le carrelage lui coûta son intégrité physique, là où la tortue ne perdit qu’une patte et la tête, lui aurait eu bien besoin d’un exosquelette complet.
Je la pourchassai dans la cuisine. Elle se posa dans un plat à gratin laissé au milieu de la table que j’atteignis d’un coup droit magistral. Le plat en tremble encore, sur les carreaux blanc cassé au pied de l’évier, en morceaux dépareillés. Je la surpris se faufilant entre les flacons de condiments sur le rayonnage aux épices. Ni une ni deux, je tatanais à vue. Slam, dans le curry qui créa une mini-tempête de sable odorant, bim dans le piment de Cayenne, plaf, sur le poivre, pam, dans les dents de l’ail moulu, et vlan, sur la muscade. On aurait dit un croisement entre Cauchemar en cuisine et Color day. En y ajoutant une pincée de lacrymo prise sur la place Bellecour un jour de manifestation, on obtenait la recette complète, parce qu’il faut bien le reconnaître, le mélange piquait un peu.
Sans masque à gaz et sans stratocaster, elle sortit son vibrato et perça le nuage exotique pour aller se calfeutrer dans le rideau de la fenêtre, fermée, de la cuisine. Je fonçai, pleurant, éternuant au grand jour, et m’élançai sur la mouche empêtrée dans le voile le long de la vitre, cadavre encore chaud drapé dans son suaire. Je frôlai l’insecte, mais arrachai tringle, rideaux et le peu de dignité qui restait encore accroché à mon orgueil moribond.
L’insecte hurlant avait pris la poudre d’escampette du côté de la chambre. Je fondis sur l’affreuse alors qu’elle faisait halte sur la tête de lit. Je manquai m’assommer contre le mur mais réussis à faire tomber le tableau La nuit étoilée de Van Gogh. Comme la folle volante n’avait rien trouvé de mieux que de trôner sur la lampe de chevet, je réitérais mon smash vengeur. Attention les yeux ! L’ampoule de la lampe explosa en touchant le sol, créant un tapis unique composé d’une myriade de petits bouts de verre craquetant sous mes pas, tel un lino de papier à bulle friable.
Elle n’avait pas filé bien loin, la garce ! Je l’entendais qui s’excitait dans le salon. Me narguant ouvertement en tapant contre la vitre, ouverte, mais s’abstenant bien de sortir. Les voisins du dessous venaient d’effectuer un virage musical certain, en passant des rythmes chauds, latinos, à Higelin. Voilà qui me redonnait un peu de cœur à l’ouvrage. Je me jetais à sa gorge, pour peu que je la trouve. En prenant appui je glissais sur la page horoscope d’un magazine qui gisait là. L’attaque ultime qui devait la clouer au pilori pour toujours se transforma en une pirouette mal gérée, entre l’axel et le boucle piqué, et je finis cul par-dessus tête contre le radiateur, assommé. Combien de temps restais-je ainsi à contempler mes parties, car vu la position, je peux vous assurer que je ne voyais rien d’autre. Certains pourraient m’accuser d’avoir la faiblesse de me regarder le nombril, je vous assure qu’en cet instant j’aurais préféré. « Tombé du lit, fauché en plein ciel », Higelin accompagnait toujours cette délicieuse chute, tout en jeu de mots et rimes cadencées. La pièce était calme. Aucun insecte ne semblait vouloir performer dans le coin. Avais-je réussi ?
Et là, à quelques centimètres de moi, frottant ses petites pattes de devant comme si de rien n’était, la fourbe se trémoussait, libre de recommencer son insultant manège. Sans prendre la peine de me lever, par flemme et pour ne pas attirer son attention, je me tapis sur la carpette, relâchant mes muscles afin de les bander au moment fatidique. Je bondis tel un tigre affamé sur un kebab sauce samouraï. Vlam ! Je l’avais eu. Je pesais de tout mon poids sur son corps rebondi, elle se débattit, donnant du vibrato à gogo, agitant en tous sens ses ailes devenues inutiles. Tu n’as que ce que tu mérites, irritant insecte, tes petites pattes n’iront plus triturer dans la pelote de mes nerfs à vif ! Lui assénai-je avec emphase. Elle me répondit en s’essayant à la stridulation, mais elle n’était pas équipée pour et l’envol lyrique retomba à plat. « C’est fou c’qu’on peut voir tomber quand on traîne sur le pavé les yeux en l’air ».
Plus que quelques secondes et je mettrai un terme définitif à sa carrière de trouble-sieste. Elle ne se débattait déjà plus. Un bruit raisonna, venant de l’entrée. Tout en prenant garde de ne pas relâcher mon étreinte mortelle, je me contorsionnai pour essayer de voir par-dessus mon épaule.
Ce furent d’abord une rumeur, des sons étouffés, des portes qui claquent, puis des cris plus intelligibles qui gonflèrent pour exploser à mes oreilles.
« Mais bordel qu’est-ce qui est arrivé ici ! Où est allé se fourrer ce putain de chat. Mais regarde ce souk qu’il a mis partout ! Merde, même la chambre y est passée. »
Impériale, moulée dans son pantalon similicuir, campée sur ses talons aiguilles elle se planta devant moi. J’hésitai entre relâcher ma prise ou rejoindre ma maîtresse. Mais la tentation fût trop impérieuse. L’insecte resta à faire le mort comme je venais me frotter aux jambes de Maria.
« Te voilà petit con ! Mais t’es pas possible, tu as vu le merdier que tu as semé ? »
Elle n’avait pas besoin d’en dire plus. J’avais vu ses yeux en pleurs et le timbre de sa voix paniqué. Elle avait réalisé à quel point la bataille avait été rude. La rage avec laquelle j’avais lutté pour préserver notre territoire. Je lui prouvais une fois encore, qu’elle n’avait pas à s’en faire, les lieux étaient bien gardés.
Elle s’effondra sur le canapé, je la rejoins.
Elle devait avoir en tête ce poème de notre bon Charles, dont les vers parlent si bien de nous, et quand je dis nous, je veux dire moi, bien sûr :
Non, il n’est pas d’archet qui morde
Sur mon cœur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu’harmonieux !
Auquel répondit Jacques : « Tombé sur toi, tombé en pâmoison [...] L’amour, L’amour encore et toujours ». Je la gratifiais d’un ronronnement maison, de celui qui la berce quand elle est angoissée. Elle semblait encore secouée par ce qu’elle venait de voir. J’avais envie de lui miauler de ne pas s’en faire, qu’un petit coup de balayette et tout serait d’aplomb. Je ne lui proposais pas mon aide, après tout de nous deux, qui était celui qui en avait ?
L’odeur des acacias se mêlait à celles des plats que préparaient nos chers voisins. Maria était silencieuse, elle devait profiter de cet instant de quiétude, de complicité. La mouche n’avait toujours pas bougé, étendue sur le tapis, soit elle feignait très bien la mort soit la mort feignait très mal de l’avoir épargné. Maria posa sa main sur moi, ses yeux étaient secs maintenant. La peur était passée, elle n’avait plus à s’en faire. Pourtant je sentais que la tension était encore palpable. Que voulez-vous, les femelles ne sont pas comme nous, un rien ne les ébranle. Elle me gratifia d’une petite tape, comme pour m’approuver puis, solennelle, annonça :
« Ma mère avait raison, demain je vais prendre rendez-vous chez le vétérinaire. J’aurai dû te faire castrer tout de suite. »
La playlist de mes aimables voisins mélomanes :
Three little birds, Bob Marley & The Wailers, sur l’album Exodus.
Chan Chan, Compay Segundo, sur l’album Yo Vengo aquí.
Tombé du ciel, Jacques Higelin, sur l’album éponyme.
Le chat, un rien mégalo, cite le poème de Charles Baudelaire dans Les fleurs du mal, section Spleen et idéal, intitulé, roulement de tambour : Le chat.
Je vous invite à découvrir mon Dessin. Merci beaucoup
https://short-edition.com/fr/oeuvre/strips/au-bord-de-la-plage-1
vous aviez voté pour mes écrits lors de la demie finale. voilà que la finale se termine autoru de 16h3à ce jour. si vous pourviez prendre 1 instant pour renouveler vos voix. les titres il y a 2 écrits en finale. 'sur le chemin qui mène au puits" et "jusqu'à la pointe" bine besoin, ce serait super.