Je me suis levé ce matin et j’ai trois ans. Maman me réveille avec un gros câlin. Elle a fait des crêpes. Miam ! que c’est bon ! Il fait beau et nous partons nous promener. Le soleil ... [+]
J’ai senti ta présence. Je l’aurais juré, tu étais avec nous. On s’est garés, on est sortis de la voiture et on a commencé à se promener. Qu’elles sont belles les maisons de Troyes. Certaines sont toutes tordues, on se demande comment elles tiennent encore debout. Elles sont si hautes, si majestueuses, on se croirait dans un conte de fées. Je regardais partout, essayant de retrouver ces rues que jadis, j’avais arpentées avec toi. Je n’ai pas réussi à reconnaître cet endroit où nous avions écouté ces musiciens chanter, pourtant qu’est-ce que j’avais aimé cet après-midi là. Tu m’avais offert un de tes innombrables sacs à mains. Aujourd’hui quand j’achète un sac, je pense à toi, et quand mon mari râle pour cet énième sac, je lui dis que c’est pas bien grave, que je l’ai acheté parce qu’il est différent de ceux que j’ai déjà.
Les enfants allaient et venaient, marchaient et couraient. Parfois ils étaient tous les 2 devant nous, pourtant je me retournais, comme pour t’attendre, car je sentais une personne juste derrière moi et parce que pour moi, il ne pouvait s’agir que de toi. Une 5ème personne invisible, que seule moi pouvait ressentir. Oh oui, je sentais ta présence, et j’étais tellement détendue, incroyablement calme et sereine. Je crois que tu marchais, tout près de nous, tout près de moi. Le soleil me chauffait la nuque, le vent caressait mes cheveux. Je donnais tranquillement la main à mon mari et je regardais les enfants s’amuser joyeusement sur le trottoir. Et je te sentais là, tout à côté, veillant sur nous.
«Ah mes pauvres enfants, je ne sais pas répondre à vos questions, il y a tellement de choses qu’on ne sait pas, mais ce qui est sûr, c’est que je le saurai avant vous»
«Tu viendras nous voir mamie, tu sortiras de ta tombe et tu viendras tout nous raconter»
«Oui, promis, je viendrai»
«On n’aura pas peur, car on saura que c’est toi et tu seras un gentil fantôme»
Et tu riais.
Voici 7 ans que tu as quitté cette terre pour un monde peut être meilleur. Voici 7 ans que j’attends, que tu viennes enfin me conter cette expérience qui te fascinait tant. Toutes ces histoires que tu nous as racontées. Toutes ces personnes dont tu nous as parlées. Ces gens qui avaient l’air si différents que tous ceux que nous pouvions connaître. Certains se faisaient dicter des mots par des personnes décédées, d’autres bougeaient des tables à 3 pieds, enregistraient les voix des morts sur des magnétophones.
«On se demande comment c’est possible hein ? Et le plus incroyable, c’est que si une personne n’y croit pas, ils lui demandent de sortir de la pièce. Ah ça, ils le détectent tout de suite, pis ils n’aiment pas ça, ça les empêche. Et une fois la personne sortie, ils y arrivent, ça marche. C’est rigolo quand même hein ?»
J’ai toujours aimé t’écouter raconter ces histoires. Les autres mamies racontent des histoires de princesses et de chevaliers. Toi tu nous racontais les morts, la communication avec l’au-delà, et puis bien sûr, ta vie de petite fille, d’adolescente et de femme, ainsi que celle de tes enfants. Je n’ai aucun pouvoir magique, aucun pouvoir surnaturel. Pourtant, oh oui, je l’aurais juré, j’ai senti ta présence, tu étais avec nous.
«Et l’écriture est exactement la même que celle de la personne décédée. On dira ce qu’on voudra, mais c’est quand même incroyable ! Et puis, elle ne connaissait pas la personne décédée, et encore moins son écriture ! Alors comment est-ce possible autrement ?»
Tu n’es pas venue me parler, tu n’as fait bouger aucune table, et comme je n’avais pas de stylo dans mon sac, tu n’as pas pu me faire écrire. Je n’avais pas de magnétophone non plus, alors je n’ai pas pu t’enregistrer parler. Pis de toute façon, les magnétophones, ça n’existe plus, à part peut-être dans les brocantes, non ?
«La table toque un certain nombre de fois, pour répondre aux questions. Un coup pour oui, deux coups pour non. C’est vraiment impressionnant.»
N’empêche que j’ai senti ta présence. J’ai coupé la sonnerie de mon téléphone portable. J’ai averti les enfants qu’ils devaient être sages, calmes et silencieux. Et nous sommes tous entrés dans l’église. Trempant mon doigt dans l’eau bénite puis faisant mon signe de croix. Enfin, j’ai fais le tour en regardant les tableaux et les statues, comme je le fais à chaque fois. Quelle paisibilité. Je ne connais pas d’autre endroit où on se sente aussi détendu qu’une église. Il y fait frais, et on s’y sent bien, en sécurité, loin du monde, comme dans une bulle. J’ai choisi un endroit tranquille pour y faire une prière, pour toi. Pour que tu protèges ma famille, pour que tu protèges ce monde terrorisé par tous ces attentats, pour que tu protèges tous ces pauvres enfants abîmés par ces ignobles guerres. Mes enfants m’ont regardée, comme à chaque fois que je prie dans une église. Mon fils, un brin moqueur. Ma fille, très attentive. Et puis nous sommes sortis de cet havre de paix.
Nous avons continué à nous balader dans cette belle ville de Troyes et nous avons déjeuné. Puis nous avons repris la route pour rentrer chez nous. Et je n’ai plus senti ta présence.
Maintenant, j’aimerais que tu viennes me raconter la fin de l’histoire mamie. Je ne connais aucune personne comme celles dont tu parlais dans tes histoires fantastiques. Mes amies et connaissances n’ont pas de pouvoirs magiques. Par contre, j’ai mon cœur, j’ai mon espoir et j’ai ma persévérance. Alors j’attends impatiemment la fin de l’histoire. Si tu pouvais juste éviter de venir me la raconter le soir avant de m’endormir... Ca m’arrangerait, quand même, que tu viennes quand il fait jour. Pis aussi, quand je ne suis pas toute seule à la maison. Bon en fait, oublie ce que je viens de dire, viens quand tu veux... En attendant de recevoir de tes nouvelles, je t’envoie des baisers par centaines, avec toute ma tendresse, toute mon affection et tout mon amour (et si tu as le temps de rester un peu, je te montrerai tous mes sacs à mains).
Les enfants allaient et venaient, marchaient et couraient. Parfois ils étaient tous les 2 devant nous, pourtant je me retournais, comme pour t’attendre, car je sentais une personne juste derrière moi et parce que pour moi, il ne pouvait s’agir que de toi. Une 5ème personne invisible, que seule moi pouvait ressentir. Oh oui, je sentais ta présence, et j’étais tellement détendue, incroyablement calme et sereine. Je crois que tu marchais, tout près de nous, tout près de moi. Le soleil me chauffait la nuque, le vent caressait mes cheveux. Je donnais tranquillement la main à mon mari et je regardais les enfants s’amuser joyeusement sur le trottoir. Et je te sentais là, tout à côté, veillant sur nous.
«Ah mes pauvres enfants, je ne sais pas répondre à vos questions, il y a tellement de choses qu’on ne sait pas, mais ce qui est sûr, c’est que je le saurai avant vous»
«Tu viendras nous voir mamie, tu sortiras de ta tombe et tu viendras tout nous raconter»
«Oui, promis, je viendrai»
«On n’aura pas peur, car on saura que c’est toi et tu seras un gentil fantôme»
Et tu riais.
Voici 7 ans que tu as quitté cette terre pour un monde peut être meilleur. Voici 7 ans que j’attends, que tu viennes enfin me conter cette expérience qui te fascinait tant. Toutes ces histoires que tu nous as racontées. Toutes ces personnes dont tu nous as parlées. Ces gens qui avaient l’air si différents que tous ceux que nous pouvions connaître. Certains se faisaient dicter des mots par des personnes décédées, d’autres bougeaient des tables à 3 pieds, enregistraient les voix des morts sur des magnétophones.
«On se demande comment c’est possible hein ? Et le plus incroyable, c’est que si une personne n’y croit pas, ils lui demandent de sortir de la pièce. Ah ça, ils le détectent tout de suite, pis ils n’aiment pas ça, ça les empêche. Et une fois la personne sortie, ils y arrivent, ça marche. C’est rigolo quand même hein ?»
J’ai toujours aimé t’écouter raconter ces histoires. Les autres mamies racontent des histoires de princesses et de chevaliers. Toi tu nous racontais les morts, la communication avec l’au-delà, et puis bien sûr, ta vie de petite fille, d’adolescente et de femme, ainsi que celle de tes enfants. Je n’ai aucun pouvoir magique, aucun pouvoir surnaturel. Pourtant, oh oui, je l’aurais juré, j’ai senti ta présence, tu étais avec nous.
«Et l’écriture est exactement la même que celle de la personne décédée. On dira ce qu’on voudra, mais c’est quand même incroyable ! Et puis, elle ne connaissait pas la personne décédée, et encore moins son écriture ! Alors comment est-ce possible autrement ?»
Tu n’es pas venue me parler, tu n’as fait bouger aucune table, et comme je n’avais pas de stylo dans mon sac, tu n’as pas pu me faire écrire. Je n’avais pas de magnétophone non plus, alors je n’ai pas pu t’enregistrer parler. Pis de toute façon, les magnétophones, ça n’existe plus, à part peut-être dans les brocantes, non ?
«La table toque un certain nombre de fois, pour répondre aux questions. Un coup pour oui, deux coups pour non. C’est vraiment impressionnant.»
N’empêche que j’ai senti ta présence. J’ai coupé la sonnerie de mon téléphone portable. J’ai averti les enfants qu’ils devaient être sages, calmes et silencieux. Et nous sommes tous entrés dans l’église. Trempant mon doigt dans l’eau bénite puis faisant mon signe de croix. Enfin, j’ai fais le tour en regardant les tableaux et les statues, comme je le fais à chaque fois. Quelle paisibilité. Je ne connais pas d’autre endroit où on se sente aussi détendu qu’une église. Il y fait frais, et on s’y sent bien, en sécurité, loin du monde, comme dans une bulle. J’ai choisi un endroit tranquille pour y faire une prière, pour toi. Pour que tu protèges ma famille, pour que tu protèges ce monde terrorisé par tous ces attentats, pour que tu protèges tous ces pauvres enfants abîmés par ces ignobles guerres. Mes enfants m’ont regardée, comme à chaque fois que je prie dans une église. Mon fils, un brin moqueur. Ma fille, très attentive. Et puis nous sommes sortis de cet havre de paix.
Nous avons continué à nous balader dans cette belle ville de Troyes et nous avons déjeuné. Puis nous avons repris la route pour rentrer chez nous. Et je n’ai plus senti ta présence.
Maintenant, j’aimerais que tu viennes me raconter la fin de l’histoire mamie. Je ne connais aucune personne comme celles dont tu parlais dans tes histoires fantastiques. Mes amies et connaissances n’ont pas de pouvoirs magiques. Par contre, j’ai mon cœur, j’ai mon espoir et j’ai ma persévérance. Alors j’attends impatiemment la fin de l’histoire. Si tu pouvais juste éviter de venir me la raconter le soir avant de m’endormir... Ca m’arrangerait, quand même, que tu viennes quand il fait jour. Pis aussi, quand je ne suis pas toute seule à la maison. Bon en fait, oublie ce que je viens de dire, viens quand tu veux... En attendant de recevoir de tes nouvelles, je t’envoie des baisers par centaines, avec toute ma tendresse, toute mon affection et tout mon amour (et si tu as le temps de rester un peu, je te montrerai tous mes sacs à mains).