Habitudes Malsaines

Toute histoire commence un jour, quelque part, dans les bidonvilles et rues immondes de Pétion-ville ou dans ces beaux quartiers chics ; la mienne a pris fin aussitôt qu’elle a débutée. Deux ans déjà que je me sens piégé dans cette boucle temporelle à me poser les mêmes questions, à rêver d’un demain que je n’aurai surement pas. Entre ces quatre murs, cette espace hideuse et même avec toute la force vitale qu’il me reste, je ne me sens pas mieux qu’un moribond. Quand je ne me faisais pas tabasser par mes colocataires, c’est la culpabilité et le remords qui me rongeaient ; la tranquillité m’est devenue un luxe qui m’est hors d’atteinte.
Les plus belles choses de cette vie, je les regardais défiler sous mes yeux, je n’étais qu’un envieux spectateur, étant enfant de rue je ne pouvais en jouir. La rue c’est ma maison, mon foyer, la seule chose que je connais depuis la mort de ma mère dont je n’ai aucun souvenir.je mendiais et faisais souvent des choses illicites pour survivre. Á 16 ans, j’étais déjà une référence dans le vol de batterie, aucun capot ne me résistait d’où je tiens mon surnom Flipflap. La nuit tombée quand je n’errais pas dans les rues, j’étais chez ces catins à bon marché ou me soûlait avec les autres oubliés de la rue. Ma vie ne se résumait qu’à ça, j’arrivais à peine à gribouiller mon nom et lire correctement.
Je faisais ma sieste quand soudain, une dame toute élégante pas comme ces putes que je croisais chez Stella, je l’ai aussitôt comparée à cette chanteuse de la ‘’Dernière danse ‘’ de la télé. Elle descendit de sa voiture, avança vers moi et me proposa de l’accompagner qu’elle m’offrirait un toit et de la bouffe à volonté, à condition de l’aider dans ses corvées. Enfin ce bon vieux Saint Pierre a répondu à mes prières, l’une de ses anges venait de m’annoncer ma délivrance et ce fut le début d’une belle histoire qui malheureusement n’a duré qu’un an.
Le changement étant un processus à long terme, mes vielles habitudes ont fini par me rattraper. Un après midi, je me suis rendu à ce festival sur la place et avec mes anciens amis, on s’est défoncé en buvant et en expérimentant toute sorte de drogue qu’on pouvait se procurer. Alors que le soleil n’était plus au rendez-vous, tout trébuchant j’ai pu atteindre la maison ; la dame absente il n’y avait que sa fille de 14 ans qui venait de prendre son bain.
Mon voyage dans ce monde atemporel presque parfait, mon sommeil paisible a vite été interrompu par un affolement de cris, de pleures et d’injures . J’étais encore dans les vapes, mais je pouvais remarquer la petite fille ensanglantée et apeurée au fond du couloir alors que ces messieurs me traînaient jusqu’à a la sortie tout en me rouant de coups un peu partout.
A ce jour je suis enfermé dans cette cellule lugubre où les jours ne sont que martyrs, en attendant d’être jugé pour viol et coups et blessures. De tout mon piètre existence j’ai ouï de mon entourage que la vie était souvent injuste, pourtant elle m’avait bien sourit de tout son charme et c’est moi qui ai été injuste envers elle.