Ginva

Toute histoire commence un jour, quelque part. Celle de Ginva avait commencé ce jour-là ou elle dérogea à l’un de ses principes fondamentaux, l’assurance vie.
Du haut de ses 25 ans, Ginva avait l’air d’une vraie dame. Après avoir essuyé beaucoup d’échec et de perte dans sa jeune vie, elle fit le sacrifice nécessaire pour finalement monter sa propre entreprise. Elle avait établi son quartier général au coin de cette rue sombre, calme, propice aux affaires comme la tienne et fréquentée uniquement par ses clients. Une affaire florissante dont elle était la PDG. Pour la première fois de sa vie, elle était aux commandes, elle était au sommet, prenait les décisions, négociait directement les contrats avec les clients, refusait certains, acceptait les plus juteux. Les affaires fonctionnaient à la perfection ; un client ne partait qu’un autre était déjà devant son bureau, elle surenchérissait, faisait parfois du marché noir. Tout lui était permis vu qu’elle était seule maitresse des lieux. Tout ce qu’elle avait à faire pour pérenniser son entreprise c’était de prendre soin de son produit et pour cela il lui fallait à chaque fois prendre une assurance vie afin de garantir la sécurité du produit. Elle rapportait de grosse somme chez elle, son compte en banque prenait du volume, le produit était périssable certes mais avec un bon entretien il allait pouvoir être utilisable pendant encore longtemps.
Ce soir-là, elle était à son bureau, lorsqu’un client se présenta pour un contrat. C’était un jour calme où les affaires fonctionnaient au ralenti, les quelques gouttes de pluie de cet après-midi en était pour quelque chose. Donc elle était partante pour faire quelques concessions sur le contrat. Le client lui avait l’air sur de lui ; d’une démarche autoritaire il s’avança et l’espace d’un cillement le contrat était signé. Il était comme tous ses autres clients, impatient, maladroit, sans souplesse aucune avec les mêmes exigences. Sa seule exigence particulière c’était l’assurance vie. Il ne voulait pas de contrat avec assurance vie ; pour lui c’était une précaution inutile qui décuplait ses bénéfices à lui dans le contrat. La demande était fortement rémunérée, Ginva ne fit donc aucunement objection. Le contrat fut vite exécuté et les deux parties furent satisfaites puis Ginva prit congé.
L’entreprise de Ginva continua de fonctionner encore quelque temps sans qu’elle se rende compte de l’irréparable. Un bug, une brèche dans le système de sécurité était en train de s’installer. Bientôt le produit commença à témoigner de cette faille. Des défaillances incessantes et multiples, des dysfonctionnements sans raison apparente menaçaient la survie du produit. L’entreprise dut fermer ses portes pendant quelque temps, rouvrit en boitant puis dut fermer définitivement faute de clients ; ceux-ci se faisaient rares, le produit avait perdu de sa valeur marchande. Ginva assistait donc avec tristesse et impuissance au déclin de son entreprise, une seule petite dérogation avait suffi à tout faire basculer. Elle essaya de se révéler, de masquer les différentes marques qu’avait laissé la brèche, mais rien n’à faire le produit était défaillant, le système s’était effondré. Elle consulta un expert qui lui expliqua la situation ; un virus était entré dans le système, celui-ci ne causait aucun dommage en soit mais il laissait la porte ouverte à d’autres virus qui eux allaient être néfastes. Rien à faire, avait conclu le spécialiste, la brèche a été découverte trop tard, le système était voué à la défaillance complète.
Mise sur la touche par un simple virus, Ginva sombra dans la solitude, puis dans la tombe, emportant avec elle son entreprise, son virus. Mais après elle, d’autres s’inspireront de son modèle, essayant de gagner plus dans cette entreprise à la fois florissante et létale tentant de ne pas faire la même erreur ; certaines auront de la chance, d’autres feront faillite et succomberont comme elle. Elle aurait voulu leur dire de fuir, d’abandonner parce que ce produit qu’elles vendent fait partie de leur essence et de leur identité en tant qu’individu et qu’elles doivent le préserver en dépit de toute situation. Mais hélas ! aujourd’hui encore et même demain peut-être d’autres corps et d’autres âmes seront vendus au sein de cette entreprise malsaine qu’est la prostitution et le VIH continuera encore a tué cette création divine qu’est la femme.