La paroi rocheuse se dressait devant moi. Lisse comme une page blanche, elle me donna soudain envie d’y inscrire et d’écrire des rêves de conquête et d’évasion... Il m'apparut que tout ... [+]
Avec l'impression d'être passée sous un rouleau compresseur, Eve rentre chez elle. Ouvrière spécialisée dans l'industrie automobile, elle a de plus en plus de mal à supporter ce travail harassant qui lui ôte toute énergie. Affalée sur son canapé, elle s'apprête à allumer la télévision, son seul loisir au quotidien. Elle fournit un effort quasiment surhumain pour se relever et aller ouvrir la fenêtre. Au moment de retourner à son confortable sofa rouge, le seul meuble un tant soit peu luxueux de son logement exigu, son regard est attiré par une petite fille au teint diaphane et à l'ample robe de soie beige. Quel est donc cet accoutrement pour le moins détonnant dans ce carré de verdure entouré d'immeubles modestes ? Et que regarde l'enfant aussi intensément sur le gazon au niveau de ses pieds ?
Eve s'accoude à sa fenêtre, intriguée par ce spectacle inédit et se met elle aussi à scruter la pelouse. Soudain, une nuée de papillons multicolores s'échappe du bout des souliers vernis de la fillette et se met à voleter autour de celle-ci.
- Mais bon sang, c'est quoi, ce bazar ? Je deviens folle, marmonne Eve qui est d'un naturel cartésien.
Elle ferme un bref instant les yeux, respire profondément, persuadée que le carré de verdure sera désert quand elle le regardera à nouveau. La fillette a bel et bien disparu, plus aucune trace d'elle. Par contre, les papillons aux couleurs chatoyantes volent dans les airs en se dirigeant vers la fenêtre d'Eve. Le souffle coupé et les yeux écarquillés, elle les voit s'approcher à la fois fascinée et apeurée. Ils arrivent à sa hauteur et se rassemblent pour former une magnifique danse, digne des plus gracieux ballets du répertoire classique. Elle est tout simplement subjuguée, son cœur se remplit d'allégresse. Elle qui, il y a quelques instants était fourbue, se sent à présent légère, légère et tellement libre. Elle respire l'air à pleins poumons, rit, tend les bras, a envie de voler elle aussi ! Elle se met à danser devant sa fenêtre sans se soucier du regard des voisins qui pourraient l'observer. Elle virevolte, tourne sur elle-même et oublie tous ses soucis ainsi que la fatigue qui ankylosait son corps. A bout de souffle, elle ralentit puis s'arrête, le sourire aux lèvres. Les papillons se font moins nombreux, ils disparaissent de façon magique sans qu'on puisse suivre leur trajectoire. Un seul, absolument somptueux dans sa parure bleu nuit, or et grenat, reste encore de longues minutes et poursuit son ballet aérien face à Eve. Puis, il finit par s'effacer imperceptiblement du paysage. Le silence est total, ce qui est inhabituel dans la cité, l'air semble pur, le soleil joue avec les feuilles des arbres. Reprenant ses esprits, Eve revient à elle en arborant un visage apaisé. Elle se dit alors qu'elle a rêvé, peut-être même qu'elle est aliénée mais qu'importe, elle ne s'est plus sentie aussi bien depuis... depuis quand ? Depuis si longtemps, depuis toujours peut-être.
Elle pose les yeux sur le rebord de sa fenêtre, une mésange y sautille et, à côté d'elle, une jolie fleur assortie à l'oiseau avec ses tons bleus et jaunes. Eve sourit d'aise.
- C'est donc la preuve que je n'ai pas inventé tout cela, se rassure-t-elle. La fleur n'est pas arrivée là toute seule. Les papillons m'ont laissé un cadeau en partant afin que je ne les oublie pas.
Mais comment pourrait-elle effacer de sa mémoire ce moment magique qui l'a projetée dans un monde si délicieux ? Se remémorant le plaisir intense éprouvé lors de sa danse improvisée, elle réalise qu'elle doit insuffler une bouffée d'air dans sa vie et s'accorder très régulièrement un moment d'évasion pour son corps et pour sa tête. Non pas tout quitter ou tout remettre en cause, du moins pas pour l'instant, elle n'en a pas les moyens. Elle doit ajouter une petite étincelle dans le déroulement morne de son schéma boulot-télé-dodo.
Elle doit danser, oui, c'est cela, danser. C'est tellement évident tout à coup. Quelle danse : classique, moderne, jazz ou autres ? Elle n'en a pas encore la moindre idée mais qu'importe ! Elle enfile à toute vitesse son pardessus gris, saisit son sac à main défraîchi, sort de chez elle et se met à dévaler quatre à quatre les escaliers direction... une école de danse !
Eve s'accoude à sa fenêtre, intriguée par ce spectacle inédit et se met elle aussi à scruter la pelouse. Soudain, une nuée de papillons multicolores s'échappe du bout des souliers vernis de la fillette et se met à voleter autour de celle-ci.
- Mais bon sang, c'est quoi, ce bazar ? Je deviens folle, marmonne Eve qui est d'un naturel cartésien.
Elle ferme un bref instant les yeux, respire profondément, persuadée que le carré de verdure sera désert quand elle le regardera à nouveau. La fillette a bel et bien disparu, plus aucune trace d'elle. Par contre, les papillons aux couleurs chatoyantes volent dans les airs en se dirigeant vers la fenêtre d'Eve. Le souffle coupé et les yeux écarquillés, elle les voit s'approcher à la fois fascinée et apeurée. Ils arrivent à sa hauteur et se rassemblent pour former une magnifique danse, digne des plus gracieux ballets du répertoire classique. Elle est tout simplement subjuguée, son cœur se remplit d'allégresse. Elle qui, il y a quelques instants était fourbue, se sent à présent légère, légère et tellement libre. Elle respire l'air à pleins poumons, rit, tend les bras, a envie de voler elle aussi ! Elle se met à danser devant sa fenêtre sans se soucier du regard des voisins qui pourraient l'observer. Elle virevolte, tourne sur elle-même et oublie tous ses soucis ainsi que la fatigue qui ankylosait son corps. A bout de souffle, elle ralentit puis s'arrête, le sourire aux lèvres. Les papillons se font moins nombreux, ils disparaissent de façon magique sans qu'on puisse suivre leur trajectoire. Un seul, absolument somptueux dans sa parure bleu nuit, or et grenat, reste encore de longues minutes et poursuit son ballet aérien face à Eve. Puis, il finit par s'effacer imperceptiblement du paysage. Le silence est total, ce qui est inhabituel dans la cité, l'air semble pur, le soleil joue avec les feuilles des arbres. Reprenant ses esprits, Eve revient à elle en arborant un visage apaisé. Elle se dit alors qu'elle a rêvé, peut-être même qu'elle est aliénée mais qu'importe, elle ne s'est plus sentie aussi bien depuis... depuis quand ? Depuis si longtemps, depuis toujours peut-être.
Elle pose les yeux sur le rebord de sa fenêtre, une mésange y sautille et, à côté d'elle, une jolie fleur assortie à l'oiseau avec ses tons bleus et jaunes. Eve sourit d'aise.
- C'est donc la preuve que je n'ai pas inventé tout cela, se rassure-t-elle. La fleur n'est pas arrivée là toute seule. Les papillons m'ont laissé un cadeau en partant afin que je ne les oublie pas.
Mais comment pourrait-elle effacer de sa mémoire ce moment magique qui l'a projetée dans un monde si délicieux ? Se remémorant le plaisir intense éprouvé lors de sa danse improvisée, elle réalise qu'elle doit insuffler une bouffée d'air dans sa vie et s'accorder très régulièrement un moment d'évasion pour son corps et pour sa tête. Non pas tout quitter ou tout remettre en cause, du moins pas pour l'instant, elle n'en a pas les moyens. Elle doit ajouter une petite étincelle dans le déroulement morne de son schéma boulot-télé-dodo.
Elle doit danser, oui, c'est cela, danser. C'est tellement évident tout à coup. Quelle danse : classique, moderne, jazz ou autres ? Elle n'en a pas encore la moindre idée mais qu'importe ! Elle enfile à toute vitesse son pardessus gris, saisit son sac à main défraîchi, sort de chez elle et se met à dévaler quatre à quatre les escaliers direction... une école de danse !