Canicule

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Le reflet du soleil sur le pavé blanc lui fit plisser les yeux.

Aveuglée, elle s'avança presque à tâtons vers la bouche de métro et poussa un soupir de soulagement quand la pénombre souterraine remplaça la luminosité douloureuse.
L'air était lourd, pesant, omniprésent. Elle le sentait passer dans ses narines puis dans ses poumons, brulant et presque liquide.
Elle valida son titre de transport sans même y faire attention et n'accorda au « beep » strident qu'un vague coup d'œil. Dans la vitre en face d'elle, elle se croisa.
On lisait sur son visage la pénibilité des nuits sans fraicheur, du bruit de la ville, des draps poisseux. Les mèches de son front collaient à la sueur qui perlait sur sa peau.

Déjà, pensa-t-elle.

Cela ne faisait que quelques minutes qu'elle était dehors et déjà elle se sentait poisseuse.
Elle dévala les marches qui menaient au quai et capta brièvement le courant d'air généré par le mouvement des rames.
Il portait avec lui l'odeur de la ville, d'une certaine saleté et la marque des machines et de l'acier. Ce mois d'octobre n'en finissait pas. La porte s'ouvrit devant et elle avança lourdement dans l'atmosphère jaune du métro.
S'adosser contre le velours synthétique des sièges la fit grimacer. Sa peau agrippait tout, comme si elle laissait des fragments d'elle dans tout ce qu'elle touchait. La pensée que les sièges puissent être imprégnés de morceaux d'autres personnes la fit se résigner à se tenir debout, en équilibre sur ses jambes.

Il régnait un climat étrange durant ces mois de canicule urbaine. Les gens circulaient, accablés par la chaleur, mous et luisants. Les bâtiments, les rues, le sol et les objets émettaient leur propre aura de chaud et le tout formait un dôme irrespirable et transperçant.

Elle descendit à sa station et se hâta de remonter à la surface. Le choc avec l'air extérieur l'impacta comme si on l'avait bousculée, mais elle continua à marcher d'un pas rapide vers sa destination. Les autres haletaient, la bouche ballante comme pour capter un oxygène visiblement plus rare. C'étaient des bancs entiers de baleines avançant la gueule grande ouverte, avec des mouvements lourds et patauds et la conscience qu'il ne fallait rien presser pour ne pas s'enfoncer dans le bitume en train de fondre.

Le soleil s'immisçait partout, ses rayons réussissant à se glisser dans les moindres petits interstices, dans les moindres failles laissées par un habitant ou un commerçant négligent, et cuisant à petit feu les vies statiques.

Elle pensa à la prochaine nuit. Elle connaissait bien la pesanteur des fins d'après-midi, finalement plus redoutables que les milieux de journée. La chape de plomb s'étirait jusqu'à la tombée du jour et portait avec elle une fausse promesse de soulagement, car quand le soleil n'arrosait plus la ville, elle se mettait à cracher, comme on tousserait après une tentative d'étouffement. L'haleine brulante des bâtiments accompagnait les habitants jusqu'à tard dans la nuit et ne leur laissait que quelques heures de fraicheur moite.

Dans les alcôves des magasins, les gens s'agglutinaient dans les espaces climatisés et en ressortaient finalement en poussant des cris indignés. On ne pouvait pas gagner ce combat-là, on ne pouvait que trouver de petits temps de répits avant d'être de nouveau dévoré par la poix qui recouvrait tout.

Elle se demanda quand le soleil finirait par sécher toute chose. À quoi ressemblerait le choc ? Est-ce qu'ils se flétriraient comme des raisins secs ? Est-ce qu'ils prendraient feu ? Elle déglutit et farfouilla dans son sac pour y trouver une bouteille pleine d'eau tiède.
Une fois désaltérée, elle continua son chemin, ses lunettes de soleil solidement posées sur ses yeux et espéra silencieusement que novembre serait plus clément.

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