Un voyage à quatre

Toute histoire commence un jour, quelque part, tout près d’un filet d’eau du fleuve sacré du village. Il était presque 10 heures du soir, sous la beauté d’une nuit scintillante de belles étoiles, j’étais couchée sur ma vieille natte de paille à l’entrée de ma case. Tout était si calme, j’entendais les chiens qui aboient au loin. Allongée sur le dos, j’ai gardé mes yeux rivés au ciel admirant ces merveilles de la nature. C’était ma fois de les voir de ci près, loin de la civilisation des grandes villes. Elles étaient belles et brillantes que je ne fis pas sortir ma lampe tempête. Soudain, je vis une lumière traversé les étoiles à une vitesse exponentielle, j’ai voulu la suivre des yeux mais elle était trop rapide. C’était une étoile filante, je n’en avais pas vu de si grosse, loin du fictif, elle était bien réelle. Je me suis laissée séduite par cette beauté naturelle et hypnotique, mes paupières se rabattirent puis je me suis faite bercée par le chant des grillons, le marchand de sable me rendis une visite inopinée à l’instant.
J’ouvris lentement les yeux au premier chant du coq, le ciel étais encore sombre. Je me suis levée de mon confortable couchage que j’enroule immédiatement. Alors que je trainais les pas pour rentrer dans ma case, j’entendis ma mère qui sortait de la douche me crier dessus :
- Mauviette ! hâte-toi, vous avez un long voyage à faire avec tes frères.
Je pris rapidement une douche froide avec un sceau d’eau puisé du puits à ciel ouvert du village puis j’enfile un jean qui me flottait presque, un pagne au design des crevettes et des tongs pendant que mon petit frère fit sortir mon sac en osier dans lequel j’avais rangé mes habits. La charrette n’attendait que moi pour le voyage alors que je ne retrouvais pas mon bracelet shamballa (bracelet en perle). Mon petit frère m’appelait énergiquement de dehors pour me dire qu’ils n’attentaient que moi pour quitter, d’une voix forte je criais :
- J’arrive !!!
Je l’ai enfin retrouvé, il était coincé dans une des poches de mon sac à dos. Je saisis d’une main le petit sac de manioc que j’avais ramené du champ hier et de l’autre, une gourde de calebasse remplie d’eau. Je sors de la case en courant derrière la charrette attelée de deux bœufs, elle était moins rapide alors je la rattrapais aussitôt.
- La reine mère est enfin sortie de son château, me disais mon petit frère d’un ton moqueur.
On était quatre dans notre carrosserie en bois à ciel ouvert, mes deux grand frère Asnodji et Nodjitelré successivement, mon petit frère Djasra et moi.
Après quelques minutes, nous voici à la sortie du village, les secousses de la route nous faisaient bouger en cadence dans notre bagnole trainée par des bœufs. Le soleil se pointe à l’horizon, on pouvait contempler avec enthousiasme le crépuscule si envoutant qu’on peut s’y laisser emporter dans une lueur de bonheur.
- Vous estimez qu’on sera à destination à quel moment de la journée? leur ai-je posé la question.
- Demain à la levée du jour sans doute ! répondit Asnodji d’un air narquois qui me laissait penser qu’il ne voulait pas de ce voyage.
- Oui demain c’est certain qu’on y sera, soutint Djasra très excité par ce voyage.
Nodjitelré nous fit un rire sous cape puis repris :
- Vous êtes tous stupides de penser qu’on va y arriver demain à cette vitesse, vous vous croyez dans une TGV. Je vous rassure qu’on a deux jours de route.
- Deux jours ??? mais on va manger quoi en chemin ? resurgissait Djasra d’un air inquiet.
Je lui montrais mon sac de manioc, et il se tut. Le grincement de notre vieille carrosserie qui avançait en cadence avec l’état de la route me berçait et alourdissait peu à peu mes paupières. Je somnolais encore quand on est entré dans une buche qui a secoué la charrette et sommeil qui me frôlait s’en alla. On doit faire une pause pour se mettre quelque chose sous la dent avant de poursuivre notre route, on a quelques heures plus tard, fait un arrêt au milieu de nul part entre les arbres. Nodjitelré nous dit de faire un feu avec les bois mort autour de l’arbre, il prit sa sagaie et s’en va chasser un gibier. En attendant qu’il revienne, mes deux frères m’aident à rassembler les bois morts et les herbes secs qui étaient sous les arbres. Je fis un petit nid d’herbes sèches que nous avions ramassées et avec des bois, j’ai fait un feu par friction. Peu de temps après, Nodjitelré se pointa à l’horizon avec une gazelle, une lueur de joie se lisait dans nos yeux. Très vite, on se fait un barbecue que nous avons mangé avec fierté.
Tout au loin, aussi loin qu’on ne pouvait voir, entre les arbres j’aperçu un mouvement des herbes, je doute de ce que cela pouvait bien être. Inquiète et prise de peur, je tire sur le t-shirt de Nodjitelré et lui montrais du doigt le mouvement qui s’approchait.
- Chut !!! dit-il, c’est un animal.
Il ordonna à Djasra de monter sur l’arbre sous lequel on était assis et m’ordonna par la suite de monter dans la charrette, chose que fis sans hésiter. L’animal s’approcha de plus en plus, Nodjitelré et Asnodji à proximité de la charrette tenant en main chacun une sagaie et un bouclier. Curieuse, je regardais entre les planches de charrette étant couchée et couvert d’un drap. Ils étaient aux aguets, mon cœur battait de plus en plus fort, la peur se rependit tout le long de mon corps et me gardais figée sur mon refuge les yeux grands écarquillés. Je n’arrivais pas à identifier l’animal, les deux guerriers n’avaient pas bougés d’un pas attendant que l’animal surgisse. Djasra faisait tomber une de ses sandales par maladresse, le bruit que fit la chaussure en contact avec le sol a accéléré le processus bondissement de l’animal qui s’est senti menacé à l’instant. Il sorti de la brousse en fonçant sur les deux soldats qui l’attendaient à point ferme, ils attendaient le bon moment pour le tuer. C’était une hyène, elle s’arrête brusquement puis se dirigeait vers notre feu de bois, marchait doucement et saisi avec sa gueule le reste de carcasse qu’on avait abandonné au sol en prenant la fuite et disparu dans la touffe d’herbe.
- Vous pouvez descendre, il y a plus de danger dit Asnodji.
Djasra ne voulut pas descendre de l’arbre, il était plus effrayé que moi je suis descendu de la charrette mais la peur ne me quitta pas. Mon petit frère se décide par la suite de descendre, il prit sa seconde paire de chaussure qu’il avait perdue et se précipita vers la charrette.
- Nous devons partir, cet endroit est dangereux, nous dit Nodjitelré.
Jamais je ne m’étais senti aussi désarmées, mes mains étaient toute moites et tremblaient de peur. J’avais comme envie malgré tout d’essayer de comprendre le comportement de la bête qui nous a tous laissé ébahi. Cette hyène pouvait nous faire du mal mais elle décida tout simplement de se servir à notre table et libérer le plancher. Nous avons à l’instant embarqué et le voyage se poursuit, je suis restée couchée dans la charrette et un silence de mort se fit sentir parmi nous, chacun était en train de revivre cet incroyable histoire de la gentille bêbête. La lumière du soleil diminuait de plus en plus pendant qu’on avançait, on croisait les hommes qui rentaient du champ en file indienne. Asnodji brisa le silence en ces termes :
- Nous pouvons camper ici, on n’est pas très loin d’un village alors on risque moins d’avoir de la visite des prédateurs.
- Il le fallait bien, je suis toute cassée, lui ai-je répondu.
On est alors descendu de notre moyen de transport, chacun se fit une place autour d’un tamarinier. Nodjitelré et Djasra s’en vont chercher du bois pour se réchauffer. Le temps passait, il n’y avait plus personne sur la route et ils ne sont toujours pas de retour. « Ne penses-tu pas qu’on devrait aller les chercher ? »Suggérais-je à Asnodji, on s’est décidé à aller à leur recherche après son accord.
- Nodjitelré !!!!!!, Djasra !!!!!!, on criait en cœur entre les arbres.
Tout parait calme, on sentait l’herbe frais à nos pieds, il faisait si froid et si sombre pendant qu’on avançait à petit pas. Je trébuchais sur une buche, je me suis très vite agrippé à mon frère pour ne pas tomber. Asnodji perd l’équilibre et on s’est fait pris par la glissade des moisissures qui tapissaient le sol sur une pente. On a criait tous deux à la descente tel une luge....
- Drrrriiiiinngggg !!!!! Drrrriiiiinngggg !!!!! Drrrriiiiinngggg !!!!!
Il est 6h00, mon réveil sonne et je sursaute de mon lit, je dois me préparer pour l’université.
C’était un sacré rêve !