Exil

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Elle pendait là, accrochée à un clou sur le mur par un petit cordon de chanvre cuivré. Elle luisait doucement d'un reflet d'argent cristallin, presque translucide. Parfois, lorsque par la fenêtre ouverte de la cuisine un courant d'air s'engouffrait dans le logis, elle se balançait, émettant un petit bruit mélodieux de clochette. Grand-Père disait alors que c'était l'écho des chaînes légères dont on affublait les chèvres, là-bas... Son regard se voilait et se perdait dans le vague. Tout le monde prenait un air grave et se taisait. Grand-Mère fermait les yeux et, sur le plissement de ses lèvres, on pouvait peut-être lire une prière intérieure. Puis le son se fondait dans le bruit de la rue, elle cessait de se balancer et le présent reprenait ses droits.

Cependant, Sarah levait souvent les yeux depuis sa place assignée à table et la voyait, là, miroitante et mystérieuse. Quelque chose se passait dans son cœur ou plutôt dans son estomac de fillette. Une vague chaude et froide à la fois, un serrement de gorge, une tristesse sans rime ni raison.

Sarah avait souvent demandé à Grand-Mère pourquoi elle était accrochée là. Pourquoi, dans toutes les maisons qu'ils visitaient dans le voisinage, une sœur presque jumelle se trouvait, bien en vue, pendant à un mur, scintillante. Et dès que retentissait l'écho de clochette, les regards s'embuaient, le silence se faisait, et ce sentiment mélancolique envahissait la pièce.

— Parce qu'un jour, on reviendra, répondait simplement Grand-Mère.

Pas un mot de plus. Personne ne parlait jamais beaucoup de là-bas. Peut-être que plus personne, pas même les plus anciens, ne se souvenait vraiment. En attendant, elle pendait là, accrochée à un clou sur le mur par un petit cordon de chanvre cuivré. La clé scintillante d'une autre maison. De la maison. Parce qu'un jour, on reviendra.

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